La métropole veut cartooner


Cartoon movie
Copier le lien Partager sur FaceBook Partager sur Twitter Partager sur Linkedin Imprimer
Temps de lecture 5 min

Publication PUBLIÉ LE 07/02/2017 PAR Romain Béteille

Tout part d’une volonté politique. Lors d’une annonce en novembre dernier, Virginie Calmels, Vice-présidente de Bordeaux Métropole et toujours adjointe au maire de Bordeaux en charge du développement économique, avait confirmé les ambitions métropolitaines pour les « industries créatives numériques », en chiffrant plus de 5000 emplois sur le territoire des 28 communes et une croissance de +20% entre 2009 et 2015. Bientôt, cette réalité s’animera par le biais de deux évènements majeurs pour cette industrie créative, plus spécialement pour le microcosme du monde de l’animation. Du 8 au 10 mars prochain, Bordeaux a déjà prévu d’accueillir Cartoon Movie, rendez-vous européen majeur des projets d’animation et de dessin animé. Après avoir pris ses quartiers à Lyon pendant sept ans, c’est la région Nouvelle-Aquitaine et sa capitale qui ont été choisies par les organisateurs de ces rencontres économiques où environ 800 professionnels de 35 pays différents sont attendus pour la tenue de cette dix-neuvième édition. Si vous connaissez « Kirikou » ou le merveilleux « Ma vie de Courgette », sachez qu’il s’agit là de deux exemples de films qui ont été financés grâce aux rencontres de cette manifestation. 

Une manifestation légitime

Aymeric Castaing, directeur du studio d’animation I Can Fly basé à Bègles, serait à l’origine de la venue de Cartoon Movie à Bordeaux. On a voulu en savoir plus sur ce point. « En tant que studio, on participe au Cartoon Forum (même type de rencontres professionnelles mais pour les séries d’animation) depuis 2009. A l’époque, je faisais toute l’activité d’I Can Fly sur Paris. Quand j’ai décidé de venir m’installer ici en 2014, je m’étais dit que ce serait super d’avoir un évènement Cartoon à Bordeaux. J’étais allé voir quelqu’un de l’équipe qu’on connaissait bien à New York en février 2014. On a fait un Cartoon Masters, des master class très professionnelles avec environ 80 personnes la même année. Vu que ça s’était bien passé, le directeur m’en avait reparlé en 2015 ». Le Cartoon Movie n’est pas un évènement isolé parmi tant d’autres pour les professionnels de l’animation, comme il le confirme dans un second temps. « On ne peut pas rêver mieux en termes de manifestation pour la profession. Aujourd’hui, c’est sans doute la meilleure plateforme de réunion entre des producteurs et des diffuseurs pour pitcher des projets. Pour les producteurs, c’est une garantie d’avoir toutes les personnes présentes sur place. Pour les diffuseurs, c’est l’assurance que tous les projets sont déjà de qualité puisqu’ils sont validés par un jury professionnel », précise-t-il.

Aymeric Castaing 

« En Europe, tous ceux qui auront quelque chose à présenter cette année seront là ». Selon Aymeric Castaing, Bordeaux dispose d’une entière légitimité à organiser ce type de manifestation, avec la proximité d’Angoulème où un vivier est déjà présent, sans compter le fait que des acteurs majeurs s’installent localement grâce à l’attractivité de Bordeaux ».
Cartoon Movie est largement soutenu par la métropole : en janvier dernier, elle lui a accordé une subvention de 175 000 euros (pour un coût total de l’évènement d’un million d’euros). Du côté de la région Nouvelle-Aquitaine, on confirme que le soutien est aussi à plus vaste échelle en termes de cinéma et d’audiovisuel. Un rapport datant du 7 février précise l’aide de 203 projets cinématographiques en 2016 pour un investissement total de 5,7 millions d’euros et compte réunir les trois fonds de soutien des anciennes régions en un seul dès cette année. Plus précisement, on comptabilise un volet spécifique pour l’aide à la création des longs métrages, des documentaires de création, de l’animation et des magazines d’intérêt culturel : 300 000 euros pour l’Aquitaine, contre (logiquement), 914 000 euros pour Poitou-Charentes. 

Un secteur local dynamisé

Mais l’animation n’est évidemment pas qu’une histoire de gros sous, et si on nous annonce de nombreux acteurs du secteurs, c’est aussi une manière pour les organisateurs de teaser une multitude de projets différents. Chacun disposera d’une vingtaine de minutes pour pitcher son projet auprès d’investisseurs. Pour beaucoup d’acteurs bordelais, la participation de cette manifestation est un peu un baptème du feu. C’est notamment le cas de Martine Vidalenc, productrice au sein de la société Marmitafilms. Elle y pitchera un mélange intéressant entre un film d’animation et un documentaire, « Single Mom in Corea », réalisé par Jung Henin et parlant d’un sujet difficile : l’abandon des enfants via l’adoption par les mères coréennes. Le dessin devrait y servir de support aux prises de vues réelles. Pour la productrice, le simple fait de présenter une intention avant même l’écriture finale du scénario est un « bon moyen d’avoir de premiers échos sur le thème et sur la forme. C’est un premier diagnostic, et puis ça permet également de voir ce qui se fait ailleurs. C’est une chance que Bordeaux nous permette de pitcher pour un festival de cette envergure, ça nous permet d’être à la bonne place . Ici, il y a une multitude de petits studios qui font plein de choses différentes, mais nous sommes complémentaires. Le soutien à la création est aussi une vraie philosophie politique régionale. La seule différence, c’est qu’ici on jouera à domicile ». 

Même son de cloche du côté de Thibaut Ruby, producteur chez Schmuby (également producteur exécutif du magnifique « Ernest et Célestine », pour info). « C’est une manifestation cruciale dans notre secteur qui arrive au moment où la fusion des régions devient active. Avec Angoulème d’un côté et Bordeaux de l’autre, on relie deux parties de la région spécialistes de l’animation qui étaient autrefois séparées. Les pitchs font souvent du buzz positif et permettent de déclencher les contrats. Sans compter le fait qu’on en profite pour mettre en avant notre actualité et qu’on fait des rencontres. Ce soutien à la culture se fait un peu à contre-temps par rapport à d’autres régions. Les aides régionales, c’est aussi de l’emploi qualifié », déclare le responsable de cette société d’une dizaine de personnes qui a plusieurs projets sur le feu dont un qu’elle présentera sur place aux investisseurs; « Unicorn Wars », projet basé sur un court métrage espagnol de 2013 qui vise à parodier des figures de l’enfance (comme les licornes et les oursons, où deux camps qui s’affrontent) avec un ton plus adulte.
Ces deux projets bordelais et 53 autres seront donc au centre de toutes les attentions en mars prochain, dont 17 français sélectionnés. Hasard du calendrier (ou pas), c’est juste avant le démarrage du Cartoon Movie que se tiendra, le 8 mars au matin, « La Grande Jonction » (évènement économique organisé par la ville, la métropole et le mouvement French Tech). Elle aura pour thème l’animation, la réalité virtuelle et le transmédia. D’une pierre deux coups. 

Partagez l'article !
Copier le lien Partager sur FaceBook Partager sur Twitter Partager sur Linkedin Imprimer
On en parle !
À lire ! MÉTROPOLE > Nos derniers articles