Le lycée horticole du Haillan change de mains


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Temps de lecture 4 min

Publication PUBLIÉ LE 09/06/2020 PAR Romain Béteille

Les incertitudes du contexte n’ont visiblement pas signé le coup d’arrêt pour le projet d’intégration du lycée privé professionnel horticole Camille Godard, dont les 177 élèves intègreront bien à la rentrée de septembre le lycée agricole de Blanquefort. Ce mardi 9 juin, semaine de rentrée pour de nombreux lycées agricoles régionaux, la région, la métropole et la ville de Bordeaux sont venus signer une convention pour permettre à cet établissement, créé après le legs à la mairie de Bordeaux en 1893 d’un négociant en vin qui lui donna son nom, de s’intégrer au lycée agro-viticole de Blanquefort et de devenir, ainsi, un « plateau technique » pour les travaux pratiques des jeunes qu’il accueille, de la 3ème au BTS au travers de différentes formations (notamment un BTSA et un Bac Pro aménagements paysagers »). La directrice de l’établissement, Corinne Dupont, évoque une « rentrée plutôt sereine. Ça s’est fait de manière naturelle avec seulement 45 élèves pour le moment, mais sans aucun décrocheur pendant le confinement ».

Plusieurs sites en un

Mais, concrètement, comment va se passer ce « transfert » du privé au public pour ce lycée horticole, dont la visite n’a fait que souligner des algecos qui ont pris racine ? Les 21 professeurs qui officiaient au sein de l’Établissement, rattachés au ministère de l’Agriculture, vont intégrer l’établissement de Blanquefort pour assurer les cours théoriques. Quatre agents des espaces verts de Bordeaux Métropole, eux, seront chargés de servir de « moniteurs » aux élèves sur ce lycée public, désormais multi-sites qui, à entendre Corinne Reulet, directrice de l’EPLEFPA (Établissement public local d’enseignement et de formation professionnelle agricole) de Bordeaux-Gironde, budgétairement le premier lycée agricole de France (20 millions d’euros de budget annuel, 120 hectares de vignes) et qui regroupe plusieurs sites dont les lycées agro-viticiles de Blanquefort et Libourne, l’école de viticulture et d’oenologie de La Tour Blanche. 

« Le but, c’était de réfléchir à comment on pouvait continuer à faire évoluer ce lycée. Petit à petit, (depuis 2016 et selon les souhaits conjoints de l’ancien maire de Bordeaux Alain Juppé et d’Alain Rousset), l’idée a fait son chemin pour qu’il soit intégré dans l’enseignement agricole public. On va donc garder sur le site actuel un maximum d’activités concernant la professionnalisation des jeunes, que ce soit les travaux pratiques, l’observation, les chantiers de mise en place de massifs ou les travaux de taille. La ville de Bordeaux s’est engagée à ce qu’il y ait toujours, sous forme de tutorats, des moniteurs (agents des espaces verts) qui vont continuer à encadrer les jeunes, ce qui vient compléter les apports des professeurs et donner cette dimension concrète et réelle dans ce type d’enseignement. En fonction du niveau d’enseignement et des projets qui pourront se faire, la venue des élèves sur ce site sera calibrée mais le site de Blanquefort se prête aussi, par sa taille, à pouvoir être un terrain de jeu pour la mise en place d’aménagements paysagers. On pourrait imaginer un concours, par exemple, et développer des liaisons entre les lycéens et les apprentis du CFA puisqu’on regroupe l’ensemble des trois voies que sont la formation scolaire, l’apprentissage et la formation continue ». 

Travaux pratiques

Ce n’est pas le premier exemple d’une configuration particulière à intégrer l’EPL (on pense, par exemple, à la Tour Blanche, évoquée plus haut, à Bommes, lui aussi né d’un legs). « Au travers de la fusion, ce petit lycée a gardé son identité et sa singularité, son esprit très communautaire. On est volontariste pour dire qu’il faut à tout prix conserver cette culture particulière pour le lycée Camille Godard, au travers d’une pédagogie de projets, ce qui est souvent notre manière de faire dans l’enseignement agricole. Il faut la faire perdurer ». Corinne Reulet, si elle est moins volubile dès lors qu’il s’agit de parler de l’avenir des stages professionnels des lycéens, souligne tout de même que le coup d’arrêt provoqué par le confinement n’a pas forcément fait du bien. « Dans notre enseignement agricole, le rôle essentiel des stages doit être rappelé et considéré comme une priorité. Il faut espérer que pour la rentrée prochaine, il n’y aura pas de telles restrictions, ce serait un manque incontestable. Même si les sites font des travaux pratiques ou nos exploitations, ça ne fait pas tout et il y a une dimension particulière dans une entreprise grandeur nature qui est importante à découvrir pour nos jeunes ».

Le décrochage et l’absence de perspective pour des stages professionnels, pourtant, le président de la région ne cesse jamais, dès qu’il le peut, de s’en émouvoir. Ce mardi, il s’est dit encore une fois « très inquiet. On risque d’avoir des jeunes qui vont décrocher massivement, ce qui serait un drame humain mais aussi économique pour les entreprises. Nous avons écrit au ministre de l’Éducation Jean-Michel Blanquer il y a quinze jours pour lui demander ce que devenaient les jeunes diplômés à la rentrée. Pour l’instant, cette lettre n’a reçu aucune réponse. On a l’impression que l’État, sur les grandes nécessités, a toujours entre quinze jours et un mois de retard », a-t-il souligné. Le gouvernement a toutefois annoncé récemment le renforcement de l’aide à l’embauche pour les entreprises qui recruteront un apprentis à partir du 1er juillet et l’extension de la durée (de trois à six mois) de la sécurisation des parcours des apprentis.

Ce mariage entre les deux sites, de l’aveu de Magalie Fronzes, adjointe à Bordeaux en charge de la nature et des espaces verts, devrait permettre au lycée public de Blanquefort de « devenir un plateau d’excellence en travaux pratiques en viticulture et en matière d’aménagements paysagers et donner des perspectives plus larges en matière de nouvelles formations ». Du reste, ce transfert de rentrée n’est pas le seul chantier qui attend le lycée Camille Godard dans les mois qui viennent. Trois millions d’euros ont en effet été mis sur la table par la ville et la région pour réaliser d’importants travaux sur ce site aux locaux jugés « vêtustes » par sa directrice. Ils comprendront notamment le retrait des algeco et la création de trois nouvelles salles de cours, la destruction des vestiaires et la rénovation du laboratoire. Pour les internes, déjà accueillis à Blanquefort, la situation ne devrait pas beaucoup changer. Pour les autres, il va falloir attendre septembre pour pouvoir reprendre un peu racine.

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