Les pluies du mois de mai mettent en danger des vignerons de Loupiac


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Temps de lecture 3 min

Publication PUBLIÉ LE 21/10/2020 PAR Yoan DENECHAU

« Là vous avez 10 mètres de fossé, si on ne fait rien, mes vignes seront au fond après l’hiver». Pierre Tourré est démuni face à l’ampleur des dégâts. Le viticulteur a été touché de plein fouet par les épisodes de pluie du 11 mai, qui ont provoqué des glissements de terrain dans plusieurs de ses parcelles en bord de cours d’eau, mais aussi chez d’autres viticulteurs. « 150 millimètres en quinze minutes. Je n’ai jamais vu ça, raconte le vigneron. Le lit du cours d’eau est monté de plus de trois mètres et a emporté une partie du talus ». Ce glissement de terrain rend impossible, pour des raisons de sécurité, le passage des tracteurs de la propriété. « On risque notre vie, et encore, heureusement que mes fonds sont enherbés sinon tout serait tombé », ajoute le viticulteur.

« On ne peut plus travailler »

Pierre Tourré a immédiatement prévenu la police de l’eau, qui est venue constater l’ampleur des dégâts. Il a à nouveau fait part de sa détresse à la Direction Départementale des Territoires et de la Mer (DDTM) en juin pour faire reconnaître l’état d’urgence de la situation et savoir comment la régler au plus vite. « Ils m’ont demandé de faire une étude d’impact sur la faune et la flore et sur la faisabilité de travaux de consolidation, reprend le vigneron. Je veux bien, mais je ne suis pas le seul à être au bord de ce cours d’eau, donc j’estime ne pas devoir financer seul une telle opération ». En effet, dans le cadre de la loi Gemapi de 2014 sur la gestion des milieux aquatiques, la charge de l’entretien des bords de cours d’eau relève des riverains. En cas de défaut d’entretien par ces derniers, cette charge peut être déléguée aux intercommunalités, soutenues par les syndicats de bassin versant. La Chambre d’Agriculture de la Gironde, organisatrice de la visite de terrain chez Pierre Tourré, appelle les pouvoirs publics à entretenir davantage les cours d’eau pour éviter d’autres situations de ce genre, mettant en danger tant les viticulteurs que la vigne.

Pour le moment, la parcelle est condamnée. La visite de la DDTM ce mardi 20 octobre sur la propriété est le premier contact physique entre l’organisme et le viticulteur depuis juin. « Ici, je reconnais la nécessité d’une procédure d’urgence, même si nous sommes cinq mois après l’incident », affirme Hervé Servat, directeur adjoint de la DDTM de Gironde. Ce dernier indique que des travaux seront menés pour consolider le talus, mais qu’il va falloir suivre la situation de près pour éviter tout risque de nouvel effondrement. Pierre Tourré n’est pas le seul vigneron pour qui les intempéries ont provoqué des glissements de terrains. Sur l’autre versant de la colline, Jean-Christophe Darriet (Château Dauphiné-Rondillon) a constaté, impuissant, l’apparition de talus en plein cœur de ses vignes. « On ne peut plus travailler les sols, on a des talus d’un mètre qui se sont creusés au milieu des rangs », regrette-t-il.

Rapport de l’ANSES sur le glyphosate : des mesures « obscures »

Autre sujet au cœur des discussions lors de la rencontre de Loupiac entre la Chambre d’Agriculture, les vignerons et la Direction Départementale des Territoires et de la Mer : le récent rapport de l’Agence Nationale de la Sécurité Sanitaire (ANSES) sur l’utilisation du glyphosate en agriculture. Dans la viticulture, l’ANSES préconise notamment la réduction de la dose annuelle de glyphosate à 450 grammes par hectare, soit « une baisse de 80 % par rapport aux dosages actuellement autorisés ». L’organisme demande également la limitation de l’usage du glyphosate à 20 % de la surface de la parcelle. « Cela manque de clarté : l’ANSES nous parle en pourcentage alors qu’il faudrait parler de centimètres », souligne Joël Ortiz, responsable viticole du Sud Gironde pour la Chambre d’Agriculture départementale.

L’expert prend un exemple pour illustrer ces recommandations. « Les mesures de l’ANSES signifient que dans une vigne où les rangs sont espacés de 2 mètres, le viticulteur ne pourrait désherber que sur 40 centimètres (20 cm de chaque côté du rang), le reste du fond, 160 centimètres, sera à entretenir en tonte ou labour ». Dans le travail des sols, il faut rajouter 10 centimètres au gabarit de la machine afin de recouvrir la totalité du rang. Une fois les calculs faits, les viticulteurs pointent que cette contrainte d’espace empêcherait donc les vignerons de travailler les sols et manœuvrer leurs tracteurs sans abimer les pieds de vigne.

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