Interview : Bruno Millet, Président d’Uniagro « Vers une agronomie du sur-mesure »


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Publication PUBLIÉ LE 17/05/2012 PAR Solène MÉRIC

@qui ! : Bruno Millet, vous-êtes le Président de l’association Uniagro Aquitaine, avant d’aborder le colloque, pouvez-vous nous rappeler la raison d’être de cette association ?

Bruno Millet : Uniagro Aquitaine est une association qui fédère les adhérents des amicales des anciens élèves des écoles supérieures d’agronomie. En Aquitaine, on compte 1000 adhérents. Au-delà de maintenir un lien d’amitié entre les membres, l’association sert de plateforme d’accueil à de nouveaux arrivants dans la région, organise des sorties et des visites de sites professionnels; grâce à l’effet réseau on accompagne les jeunes en sortie d’école, pour les aider à trouver du travail. Nous réalisons, également, des interventions auprès des classes préparatoires pour promouvoir auprès d’eux les métiers du vivant. Et enfin, une fois par an, Uniagro organise un colloque à l’occasion du Salon de l’agriculture.

@!: Et quel était le thème de cette conférence annuelle ?

B. M.: Cette année nous avons échangé autour de la nouvelle agronomie pour répondre à l’agriculture de demain. L’agriculture doit répondre à de nouveaux défis alimentaires, environnementaux, climatiques, mais aussi sur le plan du partage de l’espace, la gestion des ressources naturelles qui font que les attentes sociétales sont très différentes d’il y a 50 ans. L’agronomie est une science qui permet de concevoir des itinéraires techniques répondant à un besoin commun. Si ce besoin commun change, l’agronomie change. Pour simplifier et, pour reprendre l’expression d’Henri Nallet que nous avions la chance d’avoir à nos côtés lors de ce colloque, jusque-là l’agriculture raisonnait de manière verticale et parcellaire. Elle n’intégrait pas les interactions, avec l’unique optique d’optimiser les productions. Aujourd’hui, on bascule dans un système horizontal global, notamment en tenat compte davantage des interactions au niveau du sol, du territoire, etc. C’est une agronomie plus complexe qui conduit à une gestion de l’exploitation beaucoup plus fine. Une agronomie en rupture avec la reproduction d’un modèle stéréotypé, qui fait au contraire de plus en plus du « sur-mesure ».

@!: Est-ce que cela veut dire, comme on l’entend souvent, que durant cette période concentrée sur la production on a perdu un savoir de la terre vers lequel on retourne aujourd’hui, tel un retour en arrière ?

B.M.: Non, ce n’est surtout pas un retour en arrière ! Cette agriculture du 21ème siècle a besoin de beaucoup de recherche pour mieux connaître les éco systèmes et les interactions. Des interactions que l’on cherche désormais à connaître à l’échelle d’un territoire et pas d’une parcelle. Ça demande beaucoup de connaissance, de recherche et d’expérimentation, et de relation à mettre en réseau. Ca n’est vraiment pas une marche arrière, bien au contraire.

@! : Vous l’avez évoqué, Henri Nallet, ancien Ministre de l’agriculture ainsi que Thomas Nesme, enseignant-chercheur à Bordeaux Sciences Agro ont participé à ce colloque… quels ont été leurs regards sur le thème de cette nouvelle agriculture, et donc nouvelle agronomie ?

B.M. : Thomas Nesme a apporté un regard historique intéressant sur le débat. Il a en effet retracé une brève histoire de l’agriculture et a positionné la place et le rôle de l’agronomie face à ses évolutions. Quant à Henri Nallet, il a insisté sur la nécessité de lancer une véritable politique agricole qui puisse peser sur les orientations à mettre en oeuvre.  Selon lui, le modèle simplificateur de la spécialisation aurait peut-être atteint ses limites, entrainant la nécessité de repenser différemment cette agriculture.
Mais, il a également noté que l’agronomie n’est malheureusement pas au cœur des débats de la nouvelle Politique Agricole Commune, ni même, de manière plus générale, assez présente au cœur des institutions européennes.  Selon lui, pour que cette évolution se fasse, il faudrait associer un maximum de compétence or, la Commission européenne a sans doute trop d’économistes et trop de juristes mais pas assez d’agronomes…  Il a d’ailleurs plus globalement regretté que la forte tradition agronomique française ne soit pas suffisamment exploitée y compris dans les réflexions sur l’agriculture.


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