Jérémy Houdeline : l’exemple d’une installation en COPP, un fermage nouvelle formule


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Temps de lecture 6 min

Publication PUBLIÉ LE 15/05/2019 PAR Julien PRIVAT

Quand on le rencontre, on perçoit immédiatement la passion de Jérémy Houdeline pour son métier : Il est agriculteur. Le jeune homme de bientôt 25 ans s’est récemment installé en Groupement Agricole d’Exploitation en Commun (GAEC) avec son père, sur la commune de Pleuville au nord du département de la Charente. Au milieu de ses brebis, il est heureux et fier. D’ailleurs, ses bêtes lui témoignent leur affection, dès qui leur tend une main remplie de graines. Le reste du temps, elles pâturent sur l’ensemble des terres de l’exploitation, dont une partie autour d’un étang où il fait parfois bon pêcher. 

Agricuteur : une vocation

Cette passion pour l’agriculture est presque naturelle pour Jérémy Houdeline. Transmise par ses parents, tous deux agriculteurs. Sa mère, Marylène, s’occupe d’un cheptel de 230 chèvres laitières (nous sommes au pays de la chèvre). Son père, Jean-Luc, était à la tête d’un troupeau de 320 brebis. Après l’installation de son fils, ils en possèdent désormais plus de 500. « D’ici deux ans, nous espérons disposer d’un troupeau de 650 à 700 brebis », confie Jérémy qui participe au développement de l’exploitation familiale. Un peu timide au premier abord, il se détend et se confie peu à peu. 

 

L’agriculture, une vocation pour Jérémy Houdeline, bientôt 25 ans. Il est à la tête de plus de 500 brebis qui pâturent en pleine nature

Jérémy Houdeline a décidé de devenir agriculteur très jeune. Comme si sa voie était déjà tracée. À 15 ans, après le collège, il décide d’entrer dans un Centre de Formation d’Apprentis (CFA) agricole. Il y a passé un Certificat d’Aptitude Professionnelle (CAP) en bovin, un Brevet d’études professionnelles agricoles (BEPA) en caprin/ovin, un Brevet Professionnel Responsable d’exploitation agricole en productions animales (BPREA) en vaches laitières. Même s’il n’aimait pas trop l’école, il a suivi des formations pour apprendre toutes les facettes de son futur métier. Le garçon a même opté pour l’apprentissage pendant cinq ans jusqu’à ses 21 ans. « J’ai voulu m’intéresser à toutes les productions, mais la brebis c’est ce qui me plait le plus », explique-t-il. La curiosité et l’envie d’apprendre sont deux de ses traits de caractère, ce qui lui a sans doute permis d’aller plus loin en se lançant dans une installation, le 2 février 2018. Jérémy était alors âgé de 23 ans. 

Une rencontre providentielle

C’est mi-2016, que le jeune agriculteur est allé à la rencontre du couple Legendre. Dans le village de Pleuville, 365 habitants, les nouvelles vont vite. Jérémy a appris que l’exploitation de Daniel et Françoise Legendre était à reprendre. « Je les ai rencontrés deux ans avant l’installation. Car il fallait faire des études de faisabilité avec la chambre d’agriculture et d’autres organismes, voir si mon projet était viable pour que les investisseurs puissent me suivre », indique Jérémy Houdeline. Car c’est l’investissement des économies de toute une vie, ou presque. « Quand on voit les sommes mises en jeu, ça peut faire peur », poursuit le jeune homme. Mais Jérémy a montré qu’il en voulait, qu’il était motivé. Il a monté puis soutenu son dossier de bout en bout. Début 2018, il reprend l’exploitation familiale des Legendre, soit 29 hectares de terres et des bâtiments qu’il a achetés (106 000 euros pour les terres et 12 500 euros pour les bâtiments) ; à cela s’ajoute 35 hectares qu’il exploite en fermage (110 euros par hectares). Jérémy bénéficie d’une Convention Occupation Précaire et Provisoire (COPP) pour une durée de 10 ans. Une convention montée grâce à un partenariat entre le Crédit Agricole et la Société d’Aménagement Foncier et d’Établissement Rural (SAFER). « Cette opération permet de bloquer les prix des terres », résume Jérémy Houdeline.

Françoise et Daniel ont suivi durant deux ans toutes les démarches de Jérémy et l’ont soutenu dans son projet. « Cela a toujours été notre politique de vouloir transmettre à un jeune agriculteur du village. Jérémy est venu nous voir nous disant qu’il était intéressé. Il nous a démarchés, sachant qu’on allait s’arrêter. Cela s’est fait tout seul », déclarent les Legendre. Il n’y a pas eu vraiment de négociation au niveau des prix. Jérémy leur a proposé ce qu’ils espéraient, même s’ils auraient sans doute pu en tirer un peu plus, car dans la région des entreprises de travaux agricoles (ETA) viennent parfois s’installer pour capter la plupart des terres, ce qui augmente forcément le prix du foncier. Ce n’était pas une option envisagée par Françoise et Daniel qui ont préféré vendre à un petit du village. Tous les deux étaient dans la vache laitière jusqu’en 2013, à la retraite de Daniel. Il restait alors cinq ans à Françoise qui cultivait en céréales et fourrage les terres. Quand Jérémy se rend sur l’exploitation, le chien de Françoise et Daniel garde un oeil sur lui. « Nous ne pouvons rien lui conseiller. Nous n’y connaissons rien en brebis », rigole le couple. Françoise et Daniel paraissent contents de voir la ferme familiale perdurer et conserver son activité. Elle avait été montée en 1962 par les parents de Daniel. « Cela aurait été idiot que cela reste à l’abandon » conclut Daniel. Avec sa femme, ils sont à la retraite et profitent enfin du temps et de leurs petits-enfants. Daniel est également le maire de Pleuville depuis 2000, il effectue son dernier mandat et essaie de trouver un remplaçant sur la commune. 

En pleine évolution

Cette installation a permis à Jérémy et son père d’agrandir leur troupeau de brebis, car ils disposent de plus de terres et de nouveaux bâtiments . Au total, il y en a eu 110 en plus en 2018 et cette année, une soixantaine de plus. Jérémy a également investi dans l’achat de matériel : un tracteur et de quoi clôturer les champs. En un peu plus d’un an, il est toujours en train d’aménager les bâtiments et l’extérieur. Il a déjà posé plus de quatre kilomètres de clôture, il lui en reste encore six.  « Tous les trois jours, les brebis doivent changer de parcelles. On les fait tourner pour le pâturage. Cela nous permet de valoriser l’herbe et les prairies » Car les brebis broutent tout de même 1,2 kilo d’herbe chaque jour et quand elles ont un petit dans le ventre ça peut monter jusqu’à plus d’un kilo et demi. Ces brebis et leurs agneaux bénéficient du « label rouge ». « Une preuve de qualité » pour Jérémy Houdeline. L’agriculteur ne compte pas vraiment son temps, notamment durant la période d’agnelage. La mise à bas des brebis se déroule entre novembre-décembre et mars-avril. « Il faut se lever toutes les deux heures la nuit pour surveiller les brebis, les aider et éviter la mortalité de leurs agneaux ». Avec le cheptel, ils produisent environ 400 agneaux. Il y en a un par brebis et rarement deux. Puis, il y a la tonte des brebis qui s’organise souvent quand arrivent les beaux jours. Mais à son grand regret, il est difficile de valoriser la laine. « Elle ne se vend plus. Cela peut nous rapporter entre 50 et 60 centimes le kilo à peine». Autre difficulté pour le GAEC familial des Houdeline, le temps sec du mois de mars et d’avril. « Là, on aurait dû semer, mais la terre était tellement dure que cela était impossible ». Avec son père, ils exploitent 14 hectares de céréales à paille, 18 hectares de maïs grain et un peu plus de 4 hectares pour le tournesol. Les céréales et le maïs leur servent pour de l’autoconsommation et la nourriture des brebis. Le tournesol, ils le vendent.

Pour la première année d’installation, comme beaucoup d’agriculteurs, Jérémy ne s’est pas octroyé de salaire et a surtout investi. L’important pour lui reste la qualité de ses produits. Il demeure toujours positif et a quelques idées pour développer l’exploitation avec son père. Sa polyvalence et son amour du métier le motivent chaque jour : ainsi s’écrit une nouvelle aventure.

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