Landes : une reprise en famille pour l’amour du poulet Label rouge


Agence de l'alimentation Nouvelle Aquitaine
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Temps de lecture 3 min

Publication PUBLIÉ LE 29/04/2020 PAR Julie Ducourau

Dans les prés de la route du Cassoua sur l’exploitation familiale, les poulets gambadent 81 jours minimum, plutôt même 90, bien loin des 40 jours d’élevage des volailles standards. Ici on fait du Label Rouge, du poulet élevé en totale liberté, sans clôtures ni grillages. Le volatile mange à 80% du maïs produit sur la ferme, 10 à 15% de protéines végétales (colza, tournesol) et 5% d’herbes, de vers de terre et autres insectes picorés par ci par là. Grâce à un système de cabanes en bois mobiles -les marensines- déplacées à chaque fin de cycle de trois mois, l’environnement a le temps de se renouveler d’un champ à l’autre, l’herbe de repousser, la biodiversité de se régénérer, bref la nature de se reconstruire, avant que de nouveaux poulets viennent y grignoter et muscler leurs gambettes. « Le fumier et la paille que génèrent ces animaux, on les remet aux champs comme engrais, c’est tout un cycle ».
Ce poulet landais de haute qualité, Thibault Tauzia le connaît bien puisque ses parents et son oncle en bichonnent depuis des décennies. Pourtant, le jeune homme a longtemps hésité avant de se lancer. « Ce n’était pas prévu, je n’en avais pas envie ». Bac dans l’environnement, BTS technico-commercial en produits alimentaires, il passe une licence assistant conseil en droit et gestion du secteur agricole. En alternance à Toulouse, la ville lui pèse ; quant à la vie de bureau aux ordres hiérarchiques, très peu pour lui. « J’ai appelé mon père pour reprendre, il n’attendait que ça ! », se remémore Thibault. Il y a bientôt trois ans, il est installé par la SAFER sur 30 ha dans le cadre d’un GAEC familial. La famille avait déjà une centaine d’hectares, et il en loue en plus une autre vingtaine.
« Croire en ce qu’on fait »« La première année j’ai récupéré du maïs semence par Maïsadour et on a augmenté les surfaces dédiées au fur et à mesure », explique celui qui travaille exclusivement avec la coopérative landaise et avec l’abattoir Fermiers Landais à St-Sever qui distribuent ensuite en boucheries-charcuteries de l’hexagone : « c’est un choix qu’on a fait, c’est plus simple à gérer », dit-il, tenté peut-être un jour par la vente directe qui demande, toutefois, plus d’investissement personnel et où il n’y a « pas forcément de place pour tous dans nos communes rurales ».
Au passage, après la crise aviaire, il récupère les terres à chapons d’un voisin parti à la retraite tandis que la famille arrête la production de haricots qui n’ont jamais bien pris. Aujourd’hui, il élève chaque année entre 100 et 110.000 volailles, incluant 2.000 chapons et poulardes pour Noël.
De son parcours de repreneur, Thibault retient les aides de la dotation jeune agriculteur (DJA), les précieux conseils de la chambre d’agriculture, le suivi de Maïsadour. Et sa faculté « à croire en ce qu’on fait » car on y passe « quasiment tout son temps ». Son prochain défi ? Trouver un associé ou des salariés, ses parents approchant de la retraite.
Avec le Covid, une prise de conscience?En attendant, il va falloir faire face au Covid19. « Jusqu’ici, le poulet se vend bien, les gens cuisinent plus et la crise est bien gérée niveau approvisionnements », dit-il. Mais l’agriculteur est « un peu inquiet pour la castration du maïs et la main-d’œuvre à trouver » : « on navigue à vue, à flou, il faudra de toute façon de nouvelles mesures de sécurité. L’avantage c’est qu’il y a déjà un mètre d’intervalle entre chaque sillon. On a l’habitude de manger tous ensemble, de convivialité, là tout va être plus compliqué », déplore Thibault, également soucieux de préserver la santé du papi face au virus invisible.
Alors quand Emmanuel Macron parle de « rebâtir l’indépendance agricole », ça lui parle, mais, dit aussitôt cet adepte de l’agriculture de précision, « on verra les actes, et on aimerait plus de marge plutôt que de la voir partir dans la grande distribution ». « Les gens sont complètement déconnectés de l’agriculture, ils ne savent pas ce qu’on fait sur nos fermes. Exemple sur les produits phytos : j’ai une parcelle que je vais passer en bio, derrière c’est beaucoup de désherbage mécanique et de main d’oeuvre, je la trouve où ? Qui veut venir couper de l’herbe payé 10€ au Smic ? Tant que l’Etat ne décide pas d’enlever des charges sociales pour qu’on puisse mieux rémunérer nos salariés, les produits seront plus chers à la fin ». Quoi qu’il en soit, s’il est une valeur à mettre à l’actif de cette crise du Covid, c’est « peut-être la prise de conscience des Français que l’agriculture est un pôle essentiel, et -je l’espère- la prise de conscience du gouvernement qu’on ne peut pas la gérer comme l’industrie automobile ».

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