Poitou-Charentes : comment la filière produits laitiers compte s’en sortir


Anne-Lise Durif
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Temps de lecture 3 min

Publication PUBLIÉ LE 18/06/2020 PAR Anne-Lise Durif

« La fermeture des rayons de vente à la coupe et des marchés a été un vrai couperet pour la filière », poursuit Joseph Giraud, « tous ceux qui étaient en mono-production avec un circuit de vente unique ont été les premiers touchés, en particulier ceux dédiés à l’export. » En deuxième ligne, tous les petits éleveurs dont le lait sert habituellement à confectionner des fromages de traditions, souvent en AOP, vendus à la coupe, sur les marchés ou aux restaurateurs. Conséquences : en pleine période de lactation, le lait produit a été récupéré en grande majorité par les coopératives, qui ont accepté de jouer le jeu afin de sauver la filière élevage.  Pour l’ensemble des coopérateurs, « l’objectif était de jeter le moins possible ». Le tout a été transformé en beurre congelé, en poudre de lait ou conditionné en lait UHT avec une DLC à 6 mois. Que représente la part de stockage supplémentaire par rapport aux années précédentes ? « C’est impossible à dire aujourd’hui, nous n’avons pas les chiffres », affirme Joseph Giraud. On sait tout de même que le niveau de production a baissé de 52% comparé à l’an dernier. L’interprofession a mis 10 millions d’euros sur la table pour compenser les pertes des exploitations. « Les conséquences de la crise restent moins fortes qu’en 2009 », assurent les dirigeants de l’ACLCCP.

Joseph Giraud, Patrick Roulleau et Laurent Chupin lors de l'AG de l'association le 18 juin 2020

L’ACLCLCP a fait son assemblée générale  le 18 juin 2020, avec notamment Joseph Giraud (à gauche) et Patrick Roulleau (au centre).

Du beurre en stock

Une chose est sûre, les frigos des coopératives picto-charentaises étaient vides juste avant la crise – victimes de leur succès en 2019. « La demande mondiale en produits laitiers avait été très forte l’an dernier. Les importations en Chine avait atteint un niveau record, avec +4% de progression », précise Joseph Giraud.  Ce succès avait permis d’écouler les stocks de 2017 et 2018. Le prix du lait de vache avait renoué avec son plus haut niveau depuis 2014, d’après l’ACLPP. Quant au lait de chèvre, ses stocks ont même été insuffisants pour répondre à la demande en 2019. Ces nouveaux stockages pourraient donc paraître de bon augure. Mais les transformateurs accèpteront-ils des produits non frais déjà passés par un premier conditionnement? Pas sûr, grimace Patrick Roulleau. Pour Joseph Giraud, « tout dépendra comment la consommation repart ». « On constate déjà un début de retour des particuliers vers des fromages de qualité, artisanaux, à la coupe et/ou en AOP », constate le président de l’ACLCCP. La filière a surtout les yeux rivés sur l’export et ses 40% de chiffres d’affaires annuels. Les petits pays producteurs de pétrole de l’Afrique du Nord représentent une bonne variable d’ajustement en la matière : « Quand leur économie va, ils s’autorisent des produits laitiers d’importation. Quand le marché n’est pas en leur faveur, c’est le premier produit dont ils se passent », constate Joseph Giraud.

Faire évoluer les pratiques

Cette crise aura au moins eu le mérite de faire réfléchir l’ensemble de la filière sur son fonctionnement. Elle envisage notamment de créer un plan de production marketing pour gérer les volumes et les stocks d’une année sur l’autre, à l’échelle de la filière. Objectif : éviter autant une surproduction qu’une pénurie tout en garantissant un revenu à tous ses acteurs. Pour se détacher de la fluctuation des marchés mondiaux, l’ACLCCP a également engagé un travail sur la constitution d’une gamme de produits équitables. Cette marque permettrait aux consommateurs d’identifier les produits régionaux mais aussi un certain nombre de pratiques agricoles et commerciales, « allant dans le sens des exigences du consommateur », devenu très regardant sur l’origine et l’usage des produits chimiques des produits.  

EN CHIFFRES

> 496 324. Les litres de lait de vache en moyenne par an et par exploitation en Poitou-Charentes. La productivité des exploitations est l’une des meilleures comparées à d’autres régions de France. La production a baissé de 2,5% entre 2018 et 2019.

> 359€, le prix moyen du lait de vache pour 1000 L en coopérative picto-charentaise en 2019

> 254 millions. Le nombre de litres collectés en lait de chèvres en 2019, soit +0,44% par rapport à 2018.

> 712€, le prix moyen du lait de chèvre pour 1000 L pratiqué par les coopératives picto-charentaises en 2019.  

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