« Une certaine dynamique », au niveau de la transmission des exploitations en Dordogne


Claude-Hélène Yvard
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Temps de lecture 4 min

Publication PUBLIÉ LE 20/03/2019 PAR Claude-Hélène Yvard

Aujourd’hui, plus de 52 % des agriculteurs de Dordogne ont plus de 52 ans. Dans les dix ans à venir, un exploitant sur deux va transmettre son exploitation. C’est plus de la moitié de la SAU du département qui va changer de mains. La chambre d’agriculture a organisé une journée dédiée à la transmission agricole, ce jeudi 28 mars au pôle interconsulaire de Coulounieix-Chamiers qui a accueilli 70 participants. « Aujourd’hui, les transmissions des exploitations agricoles se font de moins en moins dans le cadre familial. En Dordogne, ces repreneurs, qui ont eu d’autres aventures professionnelles avant de s’installer sont de plus en plus nombreux. Ils représentent plus de la moitié des reprises, explique Pascal Chabaud, chargé de mission transmission à la Chambre d’agriculture. Depuis quelques années, la chambre d’agriculture et ses partenaires ambitionnent que chaque départ soit remplacé, avec notamment la mise en place d’outlls, comme le répertoire départ  installation, site internet national qui permet d’accéder en temps réel à toutes les offres d’exploitations proposées à la reprise et à l’ensemble des candidats à la recherche d’une ferme par département et de l’accompagnement à chaque phase du projet. « Ce que l’on observe, localement, précise Pascal Chabaud, en ouverture de cette journée, c’est qu’il existe une dynamique de la transmission. » Les chiffres 2018 parlent d’eux mêmes : il y a eu 220 cessations, pour 230 installations, 140 conseils transmission. La Dordogne présente une certaine attractivité : de plus en plus de personnes non issues du milieu agricole souhaitent s’installer sur ce territoire, le nombre de petites exploitations à taille humaine, n’y est pas étranger. Le coeur de cible de cette journée, ce sont les exploitants de plus de 55 ans, ils sont plus de 2000 cédants potentiels. Parmi eux, Nadine et Daniel Duperret, viticulteurs à Monbazillac, âgés de 59 ans, ont franchi le pas de préparer la transmission de leur exploitation en intégrant deux  jeunes associés au 1er janvier 2019, sept ans avant la date officielle de la retraite de Daniel. 

La transmission, c’est organiser l’avenir de l’exploitation

Daniel et Martine Duperret sont viticulteurs à Monbazillac sur une exploitation d’une trentaine hectares qui produit 150 000 bouteilles dont 10 000 pour la vente directe : ils ont voulu anticiper leur cessation d’activité plusieurs années avant l’âge réel de départ. « La réflexion a débuté d’abord en famille, avec les neveux : la propriété vient de mes beaux-parents. Je me suis installé il y a 25 ans, à leur retraite. Au sein de la famille, nous n’avons trouvé de personne réellement intéressée et notre fille n’a que 17 ans. Elle est lycéenne et ne sait pas encore quels seront ses choix. Martine arrive à l’âge de la retraite mais il n’y avait pas d’urgence mais on souhaitait anticiper pour assurer le devenir de ce que nous avions construit ensemble, tout en préservant le patrimoine familial de notre fille. Nous avions aussi trois salariés dont l’un faisait valoir ses droits à la retraite. Et je voulais prendre un peu de recul tout en restant actif quelques années. La retraite, pour moi, c’est une échéance de six ou sept ans. Transmettre, pour moi, ce n’est pas forcément s’arrêter, c’est organiser l’avenir,  » explique le viticulteur. Pour transmettre, Daniel et Martine Duperret ont créé une forme sociétaire dans lequel ils ont fait rentrer deux jeunes repreneurs, David (35 ans) et Mathieu (32 ans). Tout est allé très vite, en quelques mois. Les deux jeunes hommes ne sont pas issus du miilieu : ils se sont rencontrés en passant leur diplôme de BTS oenologie à Bordeaux. Ayant eu tous deux des parcours professionnels antérieurs ils avaient le projet de s’installer ensemble mais plutôt dans le vignoble Bordelais. Le dossier de transmission n’était pas des plus aisé au premier abord : ce n’était pas le projet de départ de David et de Mathieu, qui ont du aussi convaincre leur compagne et famille respective. Il  y a eu de nombreux freins humains, juridiques, qui ont été levés les uns après les autres. « Tout est allé relativement vite : j’ai fait la première visite tout seul, pendant les vendanges de 2018, sans Mathieu, qui avait son travail. A chaque fois, qu’un problème était soulevé, Daniel mettait tout en oeuvre pour trouver la solution qui puisse convenir aux différentes parties, » explique  David. Pour Martine, aussi, il y avait des réticences : « Elles étaient d’abord humaines : il fallait accepter l’idée de faire rentrer des étrangers sur une exploitation familiale où s’étaient succédées trois générations. A un moment, nous avons des doutes sur le fait qu’il y ait bien deux repreneurs. »  « Notre but, souligne Mathieu, c’était de donner du sens à notre vie. Nous avons visité une quinzaine d’exploitations principalement en Bordelais avant celle-ci. Nous avons découvert par hasard la Dordogne en visitant une autre exploitation. Ce fut un vrai coup de coeur pour le terroir et sa diversité.  Cela ne s’est pas fait, car nous avons eu l’impression car le cédant n’avait pas la volonté de transmettre. On s’apprêtait à signer. Il faut que le cédant soit prêt sur le plan psychologique. Un des principaux facteurs de réussite, c’est l’humain. L’autre clef, c’est l’anticipation. Dans notre cas, il s’agit d’une reprise progressive de l’exploitation avec un investissement financier moindre au départ, mais avec une vraie passion. » 

Le second témoignage de transmission réussie concerne l’exploitation de M et Mme Pestourie, à Ladornac. Serge Pestourie a fait valoir ses droits à la retraite en novembre 2015, c’est son épouse qui a repris. Aujourd’hui, c’est elle qui cède son activité. La principale production, c’est l’élevage. Le jeune repreneur, Goeffrey n’est pas du milieu : Son père est militaire et sa mère enseignante. Depuis l’âge de 10 ans, il est passionné par l’agriculture, à force de passer ses vacances et son temps libre, chez un voisin exploitant, il a eu envie de faire ce métier. Il a passé son BTSA et a travaillé cinq ans comme ouvrier agricole avant de franchir le pas de l’installation. Le jeune homme est passé par un stage parrainage,  une période d’un an qui l’a conforté dans ses choix. « Le relationnel humain est essentiel, il faut aussi que le cédant soit capable de faire des concessions, surtout si au départ, on a des visions différentes de la manière de conduire la ferme. » Le jeune homme sera exploitant au 1er avril. 

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