Viticulture et « CMD grêle »: un outil foncier pour préserver la commercialisation


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Temps de lecture 3 min

Publication PUBLIÉ LE 04/11/2013 PAR Solène MÉRIC

Résiliable chaque année, la Convention de Mise à Disposition est un outil qui permet à un exploitant agricole de mettre en location des parcelles auprès de la SAFER qui à son tour les sous-loue à un autre exploitant. La durée maximale de cette convention est de 3 ans, renouvelable une fois, sauf exception pour les plus petites parcelles pour lesquelles la convention peut être plus longue. En bref, cet outil permet l’exploitation d’une parcelle par un autre agriculteur que son propriétaire «dans des conditions particulièrement souples en comparaison du traditionnel contrat de fermage agricole», explique Hervé Olivier directeur départemental de la SAFER Gironde. Elle est généralement utilisée «pour trouver des solutions temporaires à des situations délicates lors, par exemple, de successions difficiles ou de liquidations judiciaires», complète Antoine Chabanel, conseiller Safer en charge des CMD.

Une souplesse légaleSi ce dispositif dans sa forme classique connaît en viticulture, un regain d’intérêt depuis 2005, il peut également être utilisé de manière tardive dans la saison pour aider à passer des périodes sensibles et réajuster le volume de production au volume de commercialisation. Dans ce cadre, une convention de mise à disposition peut légalement se conclure jusqu’au 31 juillet, soit une date relativement avancée dans le cycle de culture. Une souplesse légale qui est de plus en plus utilisée par les viticulteurs constate Antoine Chabanel, même si la Safer reste attentive à ce que le dispositif ne devienne pas un objet de contournement de la législation agricole. « Il a par exemple été admis avec la profession qu’un viticulteur ne peut pas exploiter en CMD plus de vignes que ce que ce qu’il possède en propriété ou en fermage », illustre Hervé Olivier.

Cet outil foncier est chaque année un peu plus apprécié par les viticulteurs, et l’année 2013 en fait la particulière démonstration. Subissant un printemps plus que maussade, un certain nombre de propriétaires viticoles girondins ont pressenti que la récolte ne serait quantativement pas à la hauteur. Ils ont donc conclu des CMD (270 pour 1250 ha de vignes au total) avec la Safer Gironde pour pouvoir compenser leur pertes prévisibles par l’exploitation de vignes de même appellation. Ce système leur permettant en outre de pouvoir utiliser leur nom de château sur le vin issu de ces vignes mises à disposition qu’ils entretiennent et exploitent jusqu’à la fin de la convention.

Antoine Chabanel et Hervé Olivier, Safer Gironde

Limiter les risquesMais, cette année, les CMD ont vu leur utilisation s’élargir à un autre cas: la gestion des conséquences d’aléas climatiques graves. Comme ce fut le cas en 2009, suite à des orages de grêle estivaux, la date limite de conclusion de conventions de mise à disposition 2013 a été décalée du 31 juillet au 20 septembre par décision de l’Etat. Un délai supplémentaire qui permet aux viticulteurs touchés par la grêle du 2 août de pouvoir bénéficier de ce dispositif, et ainsi s’assurer de conserver leur marché, auprès notamment de la grande distribution. Grâce à la mise en place de pré-contrats, finalisés et conclus au cours du mois de septembre, la CMD s’est transformée en un véritable contrat viticole de crise. Aux 270 CMD actées au 31 juillet 2013, ce sont 115 contrats supplémentaires pour 620 ha de vignes qui ont été conclus en conséquence directe des orages de grêle, précise Antoine Chabanel. 620 ha, sur près de 6000 touchés à plus de 80% par la grêle (soit un peu plus de 10%), le chiffre reste à relativiser.

Un regard prudent que partage Hervé Olivier. Car si cet outil de crise permet bel et bien de limiter le risque des viticulteurs sinistrés de perdre un marché pour les années à venir, il n’est pas accessible à tous. Seuls ceux qui avaient de l’argent de côté ou dont les vignes étaient assurés ont pu se permettre d’y recourir. De plus, même pour ceux-là, cette «CMD grêle», ne permettra pas ou peu de gain de trésorerie puisque d’une part ils ne récupéreront pas l’argent investi dans les vignes saccagées, et d’autre part, même si la Safer a consenti à gérer ces dossiers gratuitement (ce qui n’est pas le cas des autres CMD), les viticulteurs doivent s’acquitter des loyers de la convention, ainsi que du remboursement des avances aux cultures effectuées par le propriétaire des vignes.
Si l’outil s’avère intéressant à moyen et long terme pour limiter les conséquences commerciales d’une crise, il ne peut malheureusement pas effacer les effets dramatiques directs des humeurs météorologiques. Mais peu le peuvent.

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