Rapport Lescure : la taxe sur les appareils connectés pourrait aider à sauver les labels indépendants


Thibaut Chapotot / MCC
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Temps de lecture 3 min

Publication PUBLIÉ LE 13/05/2013 PAR Elodie Souslikoff

Sur les 80 propositions émises par le volumineux rapport Lescure, trois grandes lignes se dégagent : la suppression de l’Hadopi, la taxe des appareils connectés (smartphones, tablettes, téléviseurs connectés…) et l’assouplissement de la chronologie des médias, c’est-à-dire le délai entre la sortie d’un film au cinéma et en DVD ou vidéo à la demande.

Place au CSA

Pour remédier au problème du téléchargement illégal, le rapport propose une évolution de l’Hadopi : l’instance serait supprimée et son champ de compétence transféré au Conseil Supérieur de l’Audiovisuel, le CSA, qui deviendrait « le régulateur de l’offre culturelle numérique ». La peine de suspension de l’abonnement internet, particulièrement contestée, serait supprimée et les amendes minorées (60 euros au lieu des 1500 possible aujourd’hui). La réponse graduelle (succession d’alertes avant la sanction) serait par contre conservée.

Philippe Couderc, président de la Fédération des éditeurs et producteurs phonographiques indépendants d’Aquitaine, est plutôt pour la suppression de cette instance impopulaire, qui pose selon lui un problème de forme : « Hadopi a été perçu comme un outil de répression. Il n’y a pas eu de pédagogie sur la copie ». Frédéric Vilcoq, conseiller culture, économie créative et numérique au Conseil régional d’Aquitaine, aurait cependant préféré une suppression totale de ce dispositif et non un transfert au CSA. Philippe Couderc regrette lui que les sites de partages illégaux ne soient pas directement sanctionnés. Sur ce point, Frédéric Vilcoq assure qu’il s’agit d’un combat à mener au niveau européen : « Un système de responsabilisation juridique plus fort va être mis en place pour ces sites mais le droit européen empêche de  prononcer des sanctions pénales et financières. » 

Une taxe pour les smartphones et autres tablettes

Sur le volet du financement de la création, le rapport de l’ex PDG de Canal+ propose que les fabricants et importateurs d’appareils connectés participent à la création de contenus culturels à travers une taxe, de l’ordre de 1%. Celle-ci serait donc incluse dans le prix de vente des appareils tels que les smartphones, tablettes, téléviseurs connectés ou consoles. Cette mesure pourrait à terme fusionner avec celle de la copie privée, qui consiste à imposer une taxe sur un appareil de stockage (CD vierge, clé USB, cartes mémoires…) pour la reverser aux créateurs, éditeurs et producteurs d’oeuvres. « Quand on paie 600 euros un téléphone et qu’on ne veut pas payer la musique, il y a quand même un problème » souffle Philippe Couderc. Une mesure que Frédéric Vilcoq juge lui « nécessaire », la copie privée tendant à s’affaiblir du fait du développement du cloud computing.

Selon le conseiller régional, cette taxe pourrait permettre de sauver la filière musicale indépendante à travers la création du Centre national de la musique. « Les labels indépendants sont vraiment fragilisés, ils sont en état de survie. On est dans une situation d’urgence. » Défenseur de ces labels en Aquitaine et directeur du label Vicious Circle, Philippe Couderc reconnaît que le secteur « ne se porte pas bien », en Aquitaine et en France de manière générale. « Mon chiffre d’affaires a été divisé par deux en dix ans », déplore-t-il.

Concernant le secteur du cinéma, pour faciliter l’accès à l’offre légale en ligne, le délai entre la sortie d’un film au cinéma et sur les autres supports serait réduit. Il serait de trois mois (et non quatre) pour les DVD et la VàD (vidéo à la demande) et de 18 mois au lieu de 36 pour la VàDA (vidéo à la demande par abonnement). « Un premier assouplissement avait déjà réduit très largement cette chronologie et avait eu un impact important sur la baisse des téléchargements illégaux. Il y a une pertinence économique à raccourcir la chronologie des médias.  Cela incite les citoyens à consommer du produit légal et payant » constate le conseiller régional.

Globalement, le rapport « trace quelques lignes » selon Philippe Couderc, mais « manque d’ambition et n’a rien de révolutionnaire » (ce que reconnaît Pierre Lescure lui-même). Frédéric Vilcoq salue toutefois le travail du directeur du théâtre Marigny, qui reprend quasiment tous les constats des professionnels du secteur. Il regrette toutefois que le rapport ne soit pas allé plus loin dans sa proposition de décentralisation.  » Nous souhaitions la mise en place d’un fond de soutien créatif sur chaque territoire financé en partie par la taxe nationale. Le schéma stratégique proposé par Lescure ne va pas assez loin dans la décentralisation car il serait piloté pr les DRAC et on aurait souhaité un co-pilotage avec les régions. »



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