Interview: Pierre Morel-à-L’Huissier, « l’avocat de la ruralité » part en campagne


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Temps de lecture 3 min

Publication PUBLIÉ LE 14/04/2011 PAR Joël AUBERT

@qui! : Votre colloque d’hier a rassemblé plus d’une centaine de personnes autour des attentes et des perspectives du monde rural concernant l’accès aux soins, l’attractivité économique, les nouvelles technologies ou encore les services publics. Quel en était l’objectif ?
Pierre Morel-à-L’Huissier : Je souhaite faire entendre et porter la voix de la ruralité actuelle, c’est-à-dire une ruralité moderne. Le monde rural connaît en effet un profond changement; c’en est fini de l’image d’Epinal du beau paysage avec le tracteur et la vache. La sociologie des habitants ruraux a beaucoup évolué. Il y a de jeunes couples, des ingénieurs, des personnes travaillant dans des activités tertiaires, de téléservice, de commerce par internet, tout un volant de nouvelles professions. En outre, depuis 1999, les territoires ruraux regagnent de la population. Cette dernière a besoin et envie de mobilité, d’équipements culturels, sportifs et de loisirs. Or, si les pouvoirs publics ne prennent pas conscience de ces bouleversements et de cette nouvelle réalité locale, ils seront en décalage avec celle-ci, ce qui se soldera pas une crise du monde agricole. Il faut prendre en compte les nouvelles attentes de ces territoires !


@ !: Comment comptez-vous faire passer ce message et promouvoir cette nouvelle ruralité ?
P M-à-L’H : Depuis le vote de la loi sur les territoires ruraux en 2005 et la tenue des assises de la ruralité en 2009, j’ai pu constater qu’il y avait un besoin d’expression du monde rural et en même temps un manque de visibilité. Mon idée est donc de fédérer et de coordonner ces expressions individuelles pour qu’elles soient audibles. J’ai d’abord créé le collectif ‘Droite rurale’, qui compte maintenant 56 députés de la majorité et se réunit tous les mardis. Début avril, nous avons été reçus par le ministre de l’Agriculture, Bruno Le Maire, puis par le Premier ministre, François Fillon, et enfin par le président de la République, Nicolas Sarkozy. En parallèle, j’ai lancé l’Association nationale de la ruralité qui nous allons maintenant essayer de faire vivre.


@ !: Concrètement, que demandez-vous pour le monde rural, notamment dans le « plan Marshall de la ruralité » que vous avez mis au point avec le collectif de députés ?
P M-à-L’H : Nous plaidons pour la mise en œuvre d’un nouveau régime de services de proximité, mixant recours aux fonctionnaires et à des associations d’intérêt général. Par exemple, une association locale ‘de revitalisation’ de deux personnes noue des partenariats avec l’ensemble des organismes parapublics (Caf, Pôle emploi, sécurité sociale, etc.), souvent installés dans la ville préfecture, de façon à répondre aux questions les plus fréquentes des habitants leur évitant ainsi de faire plusieurs dizaines de kilomètres pour aller chercher une réponse. On peut aussi imaginer un système de téléconférence ou de téléassistance avec Pôle emploi ou encore des bornes interactives d’informations. Il faut également encourager le transport à la demande, qui permet pour des personnes isolées et à faibles revenus, de se faire conduire à moindre frais, tout autant que le télétravail dont je suis un fervent partisan. Enfin, j’ai récemment déposé deux propositions de loi. La première vise à créer un fonds d’amortissement pour assurer la couverture de l’ensemble du pays en haut débit. Il s’agit de mettre à contribution les opérateurs (Bouygues, SFR et Orange), l’Etat et les citoyens, mais à hauteur de quelques euros sur leur facture. A raison d’un investissement annuel de trois milliards sur dix ans, nous pouvons avoir équipé la totalité du pays en une décennie. Le second texte de loi entend mettre en place une aide au développement du satellite pour les territoires ne pouvant bénéficier du haut débit. Je pense à une prestation de 300 à 400 euros par particulier souhaitant investir pour s’équiper.


@ !: Outre l’avenir de ces textes législatifs, quel est votre programme pour ces prochaines semaines ?

P M-à-L’H : Concernant l’Association nationale de la ruralité, qui comptera trois collèges, élus, associations et citoyens, nous avons comme objectif de rassembler 300 à 400 personnes dans les prochains mois. Surtout, j’ai demandé à Nicolas Sarkozy et François Fillon de lancer une consultation auprès de toutes les administrations centrales, soit près d’une trentaine de directeurs au sein des ministères, pour aboutir à un assouplissement des normes réglementaires dans le monde rural. Je pense par exemple au cas d’un hôtel qui, situé dans une gorge et donc contraint par l’espace, devrait perdre une chambre pour installer un ascenseur ou réaliser une habitation pour personnes handicapées. Il faut assouplir les normes de sécurité et d’accessibilité dans ce cas. Dans les deux mois, les administrations devront avoir identifié 50 mesures de la sorte à prendre au plus vite.

Photo : Pierre Morel-à-L’Huissier

Propos recueillis par Estelle Maussion


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