« A Moi Seule » de Frédéric Videau: Un film d’une rare intelligence sur un impossible sujet.


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Temps de lecture 2 min

Publication PUBLIÉ LE 02/04/2012 PAR Joël AUBERT

Ainsi Vincent dit-il à Gaëlle "je ne te ferai jamais de mal, je ne te frapperai pas, je ne te violerai pas"… C’est clair et précis et curieusement nous "faisons confiance" à Vincent. Cette confiance accordée d’emblée nous intrigue, nous questionne quant à notre propre attitude et c’est peut-être là une des choses les plus surprenantes de ce film "pudique et lumineux".

Un scénario d’une précision d’orfèvre
« A Moi Seule» est le troisième film de Frédéric Videau, film dont il signe un scénario d’une précision d’orfèvre. Pas un mot qui ne soit ciselé au plus près d’une vérité au service du propos, pas un plan qui vienne surajouter du contenu à une histoire dont le fil est tendu comme celui d’une arbalète, pas une note de musique qui s’égrenant au son d’un piano seul ne nous dise la dure fragilité des protagonistes.
Gaëlle (époustouflante Agathe Bonitzer aux accents gainsbouriens, ceux de Charlotte…) a été enlevée à l’âge de 8 ans par Vincent (émouvant, sobre et radical Reda Kateb). Nous le comprenons dès les premières images quand Gaëlle, devenue une jeune fille, est libérée par Vincent.

Pourquoi « A Moi Seule » nous bouleverse-t-il autant ? Parce qu’il nous entraine sur une piste inconnue. Frédéric Videau, montrant par là son grand talent de scénariste, ose poser la question sociétale fondamentale "qu’est-ce que la famille ?", mais sur un mode inimaginable, celui de l’enlèvement d’une petite fille, par un homme jeune qui in fine ne veut qu’une chose : instaurer avec sa victime un rapport père fille. Pendant son enfermement physique, si Gaëlle gagne sa liberté jour après jour contre Vincent, cela ne fait pas d’elle une jeune fille libre quand elle se retrouve à l’extérieur. La liberté s’acquiert, se conquiert, contre soi, contre et avec son histoire.

D’une histoire aussi terrible sortiront vaincus et déchirés certains protagonistes, mais pas forcément ceux que l’on croit. D’autres ne règleront pas la question de la culpabilité, mais pas ceux que l’on croit… En douceur, mais avec beaucoup de fermeté, Frédéric Videau bouleverse les codes, tord le cou aux clichés sur la question de la paternité, de la parentalité, de la filiation.

Ajoutons pour conclure que tous les comédiensd’ « A Moi Seule » sont exceptionnels et que les scènes entre Gaëlle et sa mère (Noémie Lvovsky), Gaëlle et son père (Jacques Bonaffé) sont d’autant plus époustouflantes de rigueur, de maitrise et d’émotion qu’elles sont rares. Car une des forces de Frédéric Videau cinéaste, est de n’avoir recours à aucune esbroufe, aucune tentative de récupération de nos émotions.

« A Moi Seule » est un film sombre et clair qui a commencé sa carrière par une sélection au Festival du Film de Berlin et mériterait non seulement bien d’autres sélections, mais des prix… Acceptons en l’augure !

Le film pour une grande part tourné en Dordogne, est co-financé par la Région Aquitaine et la Région Limousin à hauteur de 20%, via l’Agence ECLA. Quand un choix est aussi judicieux et intelligent, ne manquons pas de le faire savoir.

Sortie le 4 avril 2012

Réalisation Scénario: Frédéric Videau
Acteurs : Noémie Lvovsky, Agathe Bonitzer, Reda Kateb, Hélène Fillières, Jacques Bonnaffé
Genre : Drame
Durée : 01h31mn

Pascale Rousseau-Dewambrechies.

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