À Bayonne, l’événement Carlos Saura réalisateur et photographe


photos F. D.
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Temps de lecture 4 min

Publication PUBLIÉ LE 05/02/2016 PAR Felix Dufour

Chez cet hidalgo de 84 ans, originaire de la province de Huesca, la photographie est une maladie qui le suit depuis des années. « Mon carnet de notes », précise-t-il avec une sincère modestie en ce samedi, regardant couler l’Adour et portant son regard d’aigle vers les flèches de la cathédrale. La preuve? « La veille du vernissage de mon exposition à Bayonne, je suis allé me promener au marché de Bayonne avec ma fille Ana pour aller faire quelques clichés ».  Ana Saura Ramon, la fille de son troisième mariage avec la réalisatrice Eulalia Ramon. « Elle ne pouvait qu’être belle avec la mère qu’elle a », nous confiait-il. Âgée de 22 ans, la jeune fille est actrice et a joué en 2009 dans « Don Giovani, naissance d’une opéra », de…Carlos Saura.

« Nous avons besoin de vous Carlos Saura »Samedi encore, il portait encore son appareil autour du cou comme d’autres y nouent une cravate. C’est son élégance à lui. « Ma vocation photographique fut précoce raconte-t-il, par impératif amoureux. Je m’explique : à 9 ans je fis ma première photo avec une ICA 6X9 de mon père qui – comme je le découvris plus tard – avait un défaut de mise au point. C’était l’image d’une petite fille dont j’étais amoureux et qui vivait près de chez moi, à Madrid. Je décidais que je devais lui montrer mon amour et, en me cachant, je la pris en photo. Une photo un peu floue que je lui envoyais avec une lettre d’amour qui ne reçut jamais de réponse. Je suis un photographe occasionnel qui, trop timide pour être un photo reporter et sans la patience du pêcheur pour être un paysagiste à la manière de Weston ou de Ansel Adams, s’est contenté de se promener avec un appareil et de capturer les images qui attiraient son attention. Avec une mère pianiste et un père peintre, je ne pouvais qu’être attiré par un métier d’Art ».

Ce sont ces photos qui ne sont pas sans rappeler les illustrations en noir et blancs de nos manuels d’Epagnol en cinquième qu’il expose jusqu’au 24 avril au Didam, ce bâtiment art déco en bordure de l’Adour, qui appartenait aux affaires maritimes et que la ville a transformé en nouvelle salle d’exposition. Des portraits des années d’après guerre. Portrait del pueblo, du peuple, surpris dans les calle (rues) des villages inondés de soleil, la rue, la misère aussi, de la Castille à l’Andalousie

Lors du vernissage de cette exposition coproduite par la Ville de Bayonne avec la Fabrica de Madrid, le maire  et président de l’Agglomération Côte Basque Adour Jean-René Etchegaray était fort ému, en présence de nombreux Espagnols et d’une foule compacte, d’accueillir aussi le réalisateur d’une quarantaine d’œuvres cinématographiques. « Les visages que vous présentez sont d’une dignité exceptionnelle dans les moments les plus divers de leur existence, heureux ou dramatiques. Ces contrastes vous ont beaucoup inspiré et au travers de cette approche  il y a une profonde humanité. Nous sommes fiers d’accueillir cette exposition avant Madrid. Hier soir, lors de la projection de votre film « Flamenco » en présence d’un public en empathie vous avez délivré un acte très fort. Nous sommes ici dans un quartier qui reçoit les personnes en souffrance. Nous avons reçu des réfugiés basques à l’époque du franquisme comme nous avons reçu les Juifs à l’époque de l’Inquisition espagnole. Dans les temps difficiles et incertains que nous vivons, nous avons besoin de vous Carlos Saura… »

De Cannes au Festival latino de BiarritzCar outre les 92 clichés sélectionnés avec Oliva Maria Rubio, commissaire de l’exposition, le service culture de la Ville et l’adjoint Yves Ugalde ont apporté une cohérence à l’événement en projetant quelques-uns des quarante films de l’œuvre abondante de Carlos Saura qui débute par un documentaire en 1958, « Cuenca » se poursuit avec une première récompense au Festival de Berlin où il reçoit ‘L’Ours d’argent pour « La Caza » (la chasse) et recevra sa consécration dès 1975 au Festival de Cannes. Cette année-là il y reçoit le prix spécial du jury qui installera sa carrière internationale. Elle passe en 1992 par les Jeux Olympiques de Barcelone où il présente le film officiel de cette compétition « Marathon ».
L’Autre cinéma, présente d’ailleurs une rétrospective Carflos Saura avec « Anna et le Loups » (1972) et « Maman a cent ans » (Prix du jury au Festival de San Sebastian en 1979. Comme il auront pu voir un ses derniers films « Argentina » sorti en salle le 30 décembre 2015 qui a été projeté en avant-première lors de la clôture du Festival Biarritz Amérique latine. « J’aime beaucoup ce festival qui m’a souvent reçu. On m’a même offert un makila lors de l’un de mes passages… »

Désormais, Carlos Saura bénéficiera le mois prochain d’une ligne aérienne directe entre Madrid où il réside et Biarritz dans une Côte basque qu’il affectionne particulièrement. Mais en attendant il a particulièrement apprécié cette rétrospective qui coïncide avec Donostia 2016 (Saint-Sébastien), capitale  européenne d’une culture transfrontalière. Même s’il assure vivre surtout le présent et dans une Europe forte. Et de constater: « Je me souviens qu’il y a des années, quand je franchissais la frontière à Fontarabie, je devais montrer mon passeport en Espagne, puis en France, avec la possibilité de me faire fouiller la voiture. Qui eût cru que l’on puisse circuler dans nos deux pays quasiment sans le moindre obstacle? »

Carlos Saura et sa fille Anna

 

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