Le Hangar 14 est donc en quelque sorte un labo vivant de l’espace public, de son organisation et l’impact de cette organisation collective sur le comportement individuel. Mais l’exposition du deuxième étage, vient, à travers une série de 6 petits films de 5 minutes chacun, élargir la palette des possibles de l’espace public. Et quelle meilleure manière d’interroger l’Espace public que d’aller voir ailleurs ce qu’il s’y passe? Avec la projection de ces films, Youssef Tohmé ouvre ainsi 6 fenêtres sur des espaces publics de différentes villes du globe. Le visiteur est ainsi plongé dans la vie et la ville «poreuse» de Ouagadougou. Poreuse car l’espace public et privé s’y retrouve, on regarde la télé dans la rue. La raison de cette porosité pour l’urbaniste vient de ce que «la chaîne de production de l’espace public est bien plus visible». Hommes et femmes travaillent dans les carrières de pierre, taillent la pierre et la transportent là où se construit une rue. «On sait que l’on dépend des uns et des autres».
A Skopje, en Macédoine, l’espace public est espace de mémoire, de symboles. Les statues s’additionnent, les immeubles ont même été étêtés pour que la statue colossale d’Alexandre le grand, soit visible de partout dans la ville. «Un symbolisme qui se retrouve dans chaque ville du monde, mais qui ici est poussé à paroxysme», commente Youssef Tohmé. Vient ensuite Tokyo la géante, comme écraséee par le poids du collectif, mais qui en réalité voit son espace public humanisé dans les nombreux interstices permis entre les grands immeubles. Les trois derniers documentaires se consacrent à Mexico, Beyrouth, et Bordeaux, avec à chaque fois, un mot clé pour les caractériser. Sur Bordeaux, c’est la mobilité qui est mise en avant, la fluidité de cette mobilité (voiture /tram/vélo) autour du fleuve en contraste frappant avec le débordement des voitures de Beyrouth, où l’on en oublierait presque que la ville est en bord de mer.
17 architectes, urbanistes et paysagistesMais à l’étage, dans les espaces, un peu cocons, cloisonnés en souplesse par de grands rideaux, le commissaire de l’exposition donne la parole à 17 architectes, urbanistes et paysagistes qui partagent leurs visions et réflexions sur la notion d’espace public. Enfin, sur un grand écran, un autre film, établit un inventaire «des failles» (bienvenues) dans l’organisation ou les fonctions attribuées à l’espace public. Autrement dit, des appropriations imprévues de celui-ci. Plusieurs exemples de détournements artistiques (street art) , sportifs (skate) ou politiques (utilisation des places comme lieu de rébellion ou de résistance par exemple) de cet espace sont ici illustrés.
Si l’étage donne matière à réflexion, le rez-de-chaussée s’applique à l’exercice plus traditionnel d’Agora, l’exposition de multiples projets urbains de la ville. Les amateurs de maquettes seront servis. On y retrouve les grands projets architecturaux tels que le Grand stade, la Cité des Civilisations du Vin, le pont Chaban-Delmas (qui a même droit à une maquette en chocolat), ou encore le futur pont Jean-Jacques Bosc, accompagnés des différentes propositions présentées lors de l’appel à projet. Mais c’est aussi des quartiers entiers qui sont maquettés, avec un accent notamment sur les projets de Brazza, Garonne-Eiffel, ou encore Bordeaux Re-centre, sur la réhabilitation du centre ancien de Bordeaux. Bref, une vision de la ville de demain.
Mais Agora, jusqu’au 14 septembre, c’est aussi une foule d’évènements dans de nombreux autres lieux et… dans l’espace public bordelais. Au programme, expositions, débats, ateliers participatifs, projections cinéma, concerts, manifestations, performances et expérimentations artistiques, architecturales et urbanistiques…
Programme (très) complet ici: www.bordeaux2030.fr/bordeaux-agora/agora-2014