Alessandro Baricco et son « Emmaüs », roman autobiographique inavoué


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Temps de lecture 2 min

Publication PUBLIÉ LE 07/04/2013 PAR Laura Jarry

La foi perdue.Le nom du livre, « Emmaüs », il l’a choisi pour l’histoire de l’évangile, « très belle d’un point de vue narratif », contant l’hospitalité de disciples offerte à un homme, se révélant être Jésus ressuscité. Il s’agissait pour l’auteur de « la figure parfaite pour la description de ces jeunes-là que nous étions, reconnaissant les choses un peu en retard ». Si Alessandro Baricco dit plus facilement « nous » que « je », il ne faut pas s’y tromper, c’est de son expérience de la foi dont il parle. Une formation spirituelle qu’il a suivie jusqu’à 18 ans. Pourquoi a-t-il cessé de croire ?  » Ca, c’est ma vie, ce n’est pas intéressant », élude-t-il avant de s’expliquer, « j’avais l’intuition que la lumière trouvée dans la foi existait aussi dans le monde ».
« Nous aimions tous cette histoire sans savoir pourquoi. Maintenant je sais pourquoi, parce que nous étions comme lui. » Voilà comme il décrit le choix de son titre et son retrait du monde religieux. Pas entièrement tout de même, car pour lui, « en Italie, on est catholique même quand on n’est pas catholique, un peu comme la fumée passive ».

« La plupart des écrivains ont une existence minable »Ainsi le roman peut être considéré comme en partie autobiographique : « les histoires du livre, je les ai vues, à côté de moi », « les personnages sont la combinaison de plusieurs personnes ». Un manquement au genre autobiographique vient apporter ce sentiment d’une histoire racontée : l’absence des « années de plomb » italiennes : « Le terrorisme, c’est comme un tremblement de terre, ça peut arriver n’importe quand ; la vie, c’est quelque chose d’autre », déclare Alessandro Baricco à ce sujet.
Il a attendu pour écrire ce livre, de peur de faire du mal aux gens, mais aussi ne se sentant « la capacité de faire un livre si dur » qu’après avoir écrit une nouvelle pour Médecins sans Frontières sur des réfugiés birmans en Thaïlande. Il contredit pourtant ce sentiment apparent de douleur de l’écriture, déclarant qu’il n’a « jamais compris l’intérêt d’écrire sa propre vie », que « la plupart des écrivains ont une existence minable » et que c’est d’ailleurs pour cela qu’il « refuse de parler aux universitaires qui m’étudient : ils ont plus de chances de trouver quelque chose d’intelligent s’ils ne me rencontrent pas ».

« Ecrire un livre, c’est comme jouer du piano, et faire un film, c’est diriger un orchestre »Quittant la voix spirituelle, il a choisi Philosophie à l’université « parce que c’était l’assurance pour le chômage », tout en continuant à écrire à côté. « J’écrivais beaucoup de nourriture », dit-il en décrivant ces papiers pour la publicité, les politiques et autres ; les histoires, il y est arrivé un peu par hasard, « parce qu’une amie m’a demandé d’écrire un scénario avec elle ». Et là, « quelque chose a cliqué dans ma tête et j’ai découvert le plaisir de raconter des histoires et plus seulement des idées ».
Il avoue avoir fait un détour rapide par la télévision « pour l’argent », et vers le cinéma sans pour autant vouloir en faire son métier : « Mon impression c’est qu’écrire un livre, c’est comme jouer du piano, et que faire un film, c’est diriger un orchestre. Ça reste de la musique, mais ce ne sont pas les mêmes gestes. C’est difficile de faire les deux avec le même talent, le même résultat. » Il veut donc rester écrivain, même s’il considère que ce n’est pas un métier bon pour la santé : « c’est trop solitaire, les corps n’existent pas, les gens n’existent pas. Et quand tu en as fini un, tu recommences : tu es fou ! ».

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