Entre les Lignes: De la sincérité envers soi-même, Jacques Rivière.


Le Festin éditions
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Temps de lecture 2 min

Publication PUBLIÉ LE 26/01/2014 PAR Anne Duprez

Jacques Rivière est né à Bordeaux en 1886, moins d’un an après François Mauriac. Mort à Paris en 1925, à seulement 39 ans, il aura côtoyé les plus grands de la littérature, travaillé avec eux, échangé : Gide, Claudel, Mauriac, mais aussi Copeau, Gallimard. Directeur de la NRF en 1919, beau-frère d’Alain-Fournier dont il épousa la sœur Isabelle, Jacques Rivière n’a hélas pas aujourd’hui la place qu’il mérite dans le Panthéon des illustres : comme le rappelle Eric des Garets dans sa préface, Bordeaux fait peu de cas de cet enfant devenu pourtant une figure clé du monde des lettres contemporain. La belle endormie gagnerait en lumière à raviver la voix d’un homme pour qui « l’arrachement à soi » est la quête suprême afin de détourner toujours sa pensée de la facilité dans laquelle naturellement elle se terre. Le Festin et les Cahiers de l’Eveilleur, en réunissant ici trois textes de Rivière (« De la sincérité envers soi-même » 1912, « De la Foi » 1912 et « Chasse à l’orgueil » issu des Carnets de captivité écrits entre 1914 et 1917) jusque là publiés séparément mettent l’accent sur les fondements de sa réflexion : un homme face à lui-même « délivré de [ses] ridicules vapeurs d’homme de lettres ».

André Lacaze, ami commun de Mauriac et de Rivière, écrit en hommage à ce dernier, en 1925 que «  la vie lui paraissait beaucoup moins intéressante à vivre qu’à comprendre ». Là est sans doute la clé de la pensée et de l’écriture de Jacques Rivière. Une sorte d’urgence du plus juste, de la quête la plus aboutie, à l’extrême, et du questionnement infini. En ce sens, ce qu’il écrit en captivité (« Chasse à l’orgueil ») touche sans doute au plus vrai du combat qu’il se livre à lui-même. Prisonnier à Königsbruck dès le début de la Grande Guerre, il est mis par ce qu’il considère comme la Providence, hors du grand combat universel. « Insuffisant à moi-même » écrit-il alors, il parvient littéralement à l’éloignement personnel de toute suffisance, une faim de la pure vérité de lui-même, sans compromission, au cœur du difficile (mais nécessaire ?) combat intime. « J’ai été recréé par la honte » écrit-il encore.

L’écriture de Jacques Rivière que l’on redécouvre ici est un uppercut qui ébranle l’assise béate des certitudes. A la fin de l’ouvrage, sur une photo noir et blanc, l’auteur nous regarde droit dans les yeux et semble nous interpeler : « J’ai fait la part du travail qui m’a été donné de faire, et toi ? Où en es tu ? »…

De la sincérité envers soi-même, Jacques Rivière. Le Festin. Préface d’Eric des Garets.
www.lefestin.net

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