Fin de résidence pour deux artistes de la Villa Bloch


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Temps de lecture 5 min

Publication PUBLIÉ LE 20/12/2019 PAR Julien PRIVAT

Dans quelques jours, ils vont quitter la Villa Bloch, l’ancienne résidence de l’homme de lettres, Jean-Richard Bloch située à Poitiers. Kouam Tawa, auteur dramatique et jeunesse, poète, metteur en scène camerounais, et Jérémy Pengam, artiste plasticien, vont la quitter ce 30 décembre. Un séjour de six mois qui leur a permis de mener à bien un projet culturel. Ensemble, ils ont partagé leurs réflexions , développer leur sens et leur esprit créatif. La Mérigote – c’est ainsi que la nommait l’homme de lettres –  redevient un lieu d’accueil des artistes comme à l’époque de Jean-Richard Bloch. La sortie de résidence se traduit aussi par la présentation des réalisations. C’est dans une salle garnie de l’École Européenne Supérieure de l’Image (ÉESI) que les travaux ont été exposés . « J’ai hâte de découvrir le fruit de leur travail. Jérémy et Kouam vont avoir chacun trente minutes pour présenter les travaux qu’ils ont fait durant leur séjour à Poitiers », confie Sandra Beucher, chargée de la résidence des artistes à la ville de Poitiers. 

A Poitiers, la Villa Bloch accueille des artistes en résidence. Ancienne habitation de l'homme de lettres, Jean-Richard Bloch, elle reste un lieu de mémoire à la fois vive et vivante

La Villa Bloch : lieu de réflexion

Jérémy Pengam et Kouam Tawa ne sont pas que les deux seuls créateurs  à partager la Villa Bloch. Ils ont vécu en compagnie de Mohammad Bamm (poète iranien venu avec sa femme et ses deux enfants) et des artistes qui se sont relayés dans le cadre de la manifestation culturelle Traversées Kimsooja, en ce moment il s’agit de Thomas Ferrand, artiste-chercheur botaniste. « Je vois la Villa Bloch comme une maison, un lieu qui m’a poussé à beaucoup de réflexions. Habiter avec Kouam et Mohammad a influencé ma pratique. Je me suis autorisé plus de libertés que d’habitude. Les prochains vont adorer c’est une chance assez inouïe d’y vivre et d’y travailler. Nous sommes un peu dans une résidence princière », explique en souriant Jérémy Pengam. Lui a pu profiter de l’endroit dans le cadre du partenariat avec l’École européenne supérieure de l’image (ÉESI), dont il a été diplômé l’an dernier. Une vision partagée par Kouam Tawa, le poète camerounais. « La Villa est formidable. Je n’ai pas d’autre mot qui me vient à l’esprit pour la qualifier. Elle a été pour moi un havre de paix. Je suis parti du pays quand les choses n’allaient pas bien du tout, si j’étais resté j’aurais été dans une forme d’activisme pour me donner l’impression que je sers à quelque chose. Mais je ne pense pas que j’aurais produit de la littérature. Le fait d’être venu à Poitiers, de résider dans un cadre aussi agréable, m’a permis de me poser. Je regardais de loin et j’avais la distance qui me permettait d’écrire des poèmes qui réagissent à l’actualité mais en faisant l’effort de sortir de la circonstance », confie Kouam Tawa accueilli dans le cadre des résidences croisées menées avec la Cité Internationale des Arts de Paris.

Présentation des travaux

Le premier à s’élancer dans l’exercice est Jérémy Pengam avec son projet « Remonte et cours ». En août dernier, durant une semaine, il a remonté le Clain, la rivière qui traverse Poitiers et qui se jette dans la Vienne. Il voulait l’adopter, apprendre à le connaître et rencontrer les personnes au fil de l’eau. Une épopée qu’il a filmée et racontée. Livre en main, un livre joliment édité pour l’occasion, il commence à raconter son expérience. A l’écran des images de son périple et de ses rencontres fortuites sont projetés. Un partage. Lui qui montait pour la première fois dans un canoë a tout de même parcouru 80 kilomètres aller-retour. En amont, il avait reçu quelques conseils au club de canoë-kayak de Saint-Benoît. « J’ai commencé par suivre le courant. C’est plus simple pour découvrir le canoë. Sur le Clain, il y a énormément de barrages à franchir. Il fallait à chaque fois vider l’embarcation, sinon je faisais tout tomber à l’eau. » A l’image, il montre et partage certains moments de solitude, quand il lutte pour hisser son canoë sur la berge. Quant à l’écriture du texte, qu’il lit en même temps que défilent les images, elle est assez particulière. «  C’est l’idée du coup de rame qui vient briser la ligne naturelle de l’eau. J’ai pris la liberté de casser le rythme dans les phrases. Je me permets de jamais les finir, il n’y a aucun point ». Le rythme évolue aussi en fonction des moments. Jérémy va plus ou moins vite. Puis lorsque qu’il retrouve la terre ferme tout s’accélère. « Passer sept heures sur le canoë à écouter le son de la nature sans croiser un être humain, quand on débarque c’est le retour à la vie et on a l’impression que tout va très vite. » Fort de cette première expérience, l’artiste plasticien a réalisé un deuxième voyage en octobre. Il est parti cette fois-ci à contre-courant. Il a bien évidemment mis en boîte ce deuxième périple qu’il travaillera lorsqu’il aura quitter la Villa Bloch. « J’ai finalement fait plus que ce que je pensais. Je sortirai de la Villa avec deux films », sourit Jérémy Pengam

Kouam Tawa est venu à Poitiers avec pour objectif d’achever un recueil de poèmes qu’il a intitulé « chronique d’une guerre oubliée ». Il y travaille déjà depuis quelques années. Durant son séjour, il a écrit plus d’une soixantaine de poèmes et quelques récits pour les enfants. Il a d’ailleurs animé des ateliers d’écritures pour les jeunes. « Je suis venu en me disant que j’allais produire sur la guerre d’indépendance camerounaise quelque chose qui serait de l’ordre du Chant général de Pablo Neruda. Il l’a écrit quand il a quitté son pays. Moi, c’est un peu pareil. » Pourtant au début, Kouam Tawa a eu l’impression de ne pas avancer dans son projet. Il y est parvenu en écrivant régulièrement sur ses réseaux sociaux des poèmes en lien avec l’actualité de son pays. « Je me suis fait barde d’utilité publique comme Neruda l’a fait ». Lors de la présentation, il a lu une dizaine de poèmes. Évoquant des sujets comme la guerre, la lutte, les migrants et des sujets plus joyeux sur la vie, sa philosophie de la vie. Dès janvier, il retourne à Bafoussam au Cameroun où il va s’occuper de sa compagnie professionnelle de théâtre, Feugham. Au programme mise en scène et mise en lecture de textes.

Dès janvier, deux autres artistes vont prendre le relais et poser leurs valises à la Villa Bloch. Eux aussi vont pouvoir profiter du lieu pour développer des projets. Ils auront six mois de résidence pour les mener à bien. En attendant, Jérémy et Kouam quittent à regret ce cadre qui leur a permis d’avancer et de grandir. La Villa Bloch reste un lieu de culture où la création s’exprime. Un bel hommage à la mémoire à Jean-Richard Bloch qui a écrit un grand nombre de ses textes, ici, à la Merigote.

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