L’actualité du roman noir – Prendre les loups pour des chiens


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Temps de lecture 2 min

Publication PUBLIÉ LE 02/05/2017 PAR Bernard Daguerre

Elle est l’archétype de la femme fatale, assez peu ange et plutôt démon. Le désir poigne aussitôt Franck et, tout au long du récit, un sentiment confus d’attirance-répulsion le submerge face à cette jeune femme si troublante, « créature impossible, presque irréelle, peut-être inimaginable »,  qui tantôt l’attire et tantôt le repousse.  Elle l’emmène dans l’antre de sa famille, tapi dans la forêt de pins du sud de la Gironde : il y a là le père et la mère de la jeune femme, marginaux subsistant de petits boulots et de petits trafics ; et Rachel, la propre fille de Jessica, nimbée par le halo de ses attitudes mystérieuses, petite créature de 8 ans  comme ensevelie dans ses secrets.

Frank porte en lui, tout au long du roman, un sentiment pesant, mais diffus, d’angoisse, jusqu’à en ressentir un malaise physique, inexplicable : il « se sent ligoté au fonds d’un puit, écrasé par son propre poids ». Terrassé par la fatalité, chutant, au fond, d’un lieu de détention à un autre.

D’ailleurs tout paraît s’enchaîner pour le maintenir au sol, plaqué dans sa condition de vaincu : qu’il les subisse ou qu’il y participe, les trafics de voiture et de drogue, les sanglants règlements de comptes constituent son ordinaire de vie. Il n’est pas jusqu’à ce triste décor des bois de pins qui renforce cet enfermement : « Partout autour, la forêt dressée contre le ciel pâle qu’elle rayait de ses milliards d’aiguilles verdâtres. Nul horizon, toujours empêché par ces innombrables barreaux surgis du sol maigre. Paysage clos ». Tout comme la chaleur suffocante de l’été caniculaire.

Que faire alors ? Franck se débat, lutte quand même, cherche à savoir où se trouve Fabien, tente de prendre sous son aile la petite Rachel. Et voici que le roman paraît célébrer un autre Aragon que celui du titre même du livre, le poète qui ouvrait, malgré tout, le front positif de « la beauté des choses ». On n’en dira pas d’avantage.

Oui, un roman noir par le thème- celui de l’ordinaire des faits divers qui fait le pain quotidien des polars – et par la puissance d’un style qui balance les mots au lecteur comme dans un combat de boxe, violent et saturé.

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