Le Film d’histoire à Pessac : Quand la révolution a commencé dans les familles arabes…


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Temps de lecture 3 min

Publication PUBLIÉ LE 18/11/2011 PAR Malika Ouaddah

Point de départ de ce mouvement qu’on allait appeler le  printemps arabe : la Tunisie, où un 17 décembre 2010, une date qui restera gravée dans l’Histoire, un jeune homme originaire de Sidi Bouzid s’immole par le feu. Emna Ben Jemna l’avoue, au départ elle ne prend pas au sérieux cet acte isolé. Pourtant, sur les réseaux sociaux,  « une vraie déferlante »  est en train de se former. La contestation monte, elle s’appuie sur le web 2.0 et les chaînes télé Al Jazeera et France 24, très regardées dans le monde arabe,  qui relaient les vidéos des insurgés. En cause, «  un contexte  difficile où  les richesses sont accaparées alors que le peuple a  faim »  explique la journaliste. Elle rappelle « qu’il n’y a jamais eu de  vraie démocratie en Tunisie ». A Bourguiba, « le despote éclairé », avait succédé Ben Ali, un autre dictateur qui engrangeait  « 99%  » des suffrages. Le point de rupture avec le pouvoir est atteint lorsque la révolte atteint la capitale Tunis. Lâché par les élites et l’Occident, le  régime de Ben Ali « aux obsessions ridicules ; le chiffre 7 et la couleur mauve » est prêt à tomber. Et dans cette chute, contrairement à l’Egypte où les manifestants auront l’intelligence de la mettre  de leur côté, l’armée tunisienne restera neutre ; l’ancien dictateur pourra  en effet fuir par l’aéroport militaire.

La jeunesse en colère a-t-elle le monopole de la Révolution?
« Non » répond Youssef  Courbage ; « toutes les catégories d’âge et les deux sexes se sont révoltés ». Un aspect important qui contredit magistralement la thèse de Samuel Huttington sur le choc des civilisations qui avait appuyé sa théorie sur la proportion élevée des jeunes dans la population. Le démographe de l’Ined précise: «  la transition démocratique survient après la transition démographique ».  Et ajoute qu’en quelques décennies, le visage de la société a changé dans les pays arabes. La femme arabe a statistiquement moins d’enfants aujourd’hui qu’il y a 40 ans, elle est plus éduquée, parfois plus que son mari. La révolution  a donc commencé dans les familles. Voilà qui explique la présence des femmes au cœur de la Révolution et particulièrement en Tunisie où le Code du statut personnel est avant-gardiste comme le rappelle E. Ben Jemna. Les analyses des chercheurs.

Les chercheurs pris de vitesse
Les révolutions arabes ont surpris les chercheurs qui « excellent à prévoir le passé » et en premier lieu Henry Laurens qui projetait l’avènement de la démocratie dans cette zone du monde en 2030-2040, soit à la fin de sa transition démographique. Explications : dans les années 80, certaines zones du monde sont gagnées par la démocratie ; l’Amérique Latine puis l’Europe de l’Est avec la chute du mur de Berlin. Mais dans le monde arabe, c’est l’immobilisme. Un quasi statut-quo que les analystes ont justifié par des raisons économiques et sociales. A posteriori, quels étaient les signes avant coureurs de ces révoltes populaires?  Pour le professeur au Collège de France : « la 1ère intifada où l’on trouve les mêmes mécanismes à l’œuvre ; les gens agissent malgré la peur et la révolution du Cèdre au Liban ».

Pour l’heure, si l’année 2011 a bouleversé le Sud et l’Est de la Méditerranée, les lendemains de la révolution laissent parfois un goût amer selon Valérie Hannin. Notamment en  Tunisie où le parti islamiste Ennahda  est arrivé en tête avec 37% des suffrages aux élections constituantes du 23 octobre dernier. Cependant comme l’a montré le débat qui s’est déroulé dans la salle Fellini du cinéma Jean Eustache, chaque pays a ses propres caractéristiques et la Tunisie devra trouver le chemin de la démocratie comme tous les peuples qui y ont accédé ou qui y aspirent. Sinon, « on refera une révolution  » plaisante à moitié la tunisienne Emna Ben Jemaa.

Malika Ouaddah

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