« Les Sisyphes » : un projet de film indépendant sur les violences conjugales


Nils Martin
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Temps de lecture 4 min

Publication PUBLIÉ LE 30/04/2020 PAR Lucile Bonnin

Une jeune femme se fait frapper par son conjoint dans un bel appartement à Bordeaux, dans le quartier Saint-Michel. Son voisin est témoin de ces violences. Il entend les cris. Pourtant, on peut le voir hésiter entre agir, et ne rien faire. Il décide finalement de ne pas laisser sa voisine se faire massacrer. Il intervient. La porte s’ouvre. La jeune femme poignarde son agresseur dans le dos. Ce dernier cherche à porter le coup fatal sur sa compagne. Spectateur de tout cela, le jeune voisin saisit le couteau et porte un deuxième coup. L’auteur des coups meurt. Puis, ellipse temporelle. Le voisin se retrouve dans le désert, portant un cadavre emmitouflé dans un grand drap noir… Il essaye de l’enterrer, se tue à la tâche… Puis, il hallucine. Mais qui se trouve dans ce drap ? Est-ce la voisine, morte sous les coups de son amant ? Est-ce l’homme violent ?

Tout ceci n’est pas un cauchemar, mais le résumé du prochain film imaginé par Nils Martin et son équipe de production composée d’une bande de jeunes passionnés et en début de carrière : Emil Karimov, Yara Atz, Rob Lawrence, Loïc Monks, Zoé Sicard-Delage, Manu Senut, Marie Lachaud, Elise Sintot et Iseult Imbert. « Les Sisyphes » sera un court métrage d’une forme hybride. Entre le western et le film noir, les scènes seront tournées au mois d’août prochain, entre la belle ville de Bordeaux et l’inquiétant plateau de l’Aubrac dans le Tarn.

Les Sisyphes

De la réalité à la fiction

Ce désir de réaliser un film sur les violences conjugales ne vient pas de nulle part. Il est ancré depuis plusieurs années dans la tête du réalisateur. Nils Martin, se souvient avec effroi de certains cas qu’il a pu rencontrer dans sa vie personnelle. « J’ai été témoin moi-même d’un moment un peu difficile avec une voisine qui a eu des problèmes avec son mec, lorsque j’étais étudiant, explique Nils. Plus récemment, la copine d’un ami s’est faite agressée. Pour porter plainte, cela a été un micmac infini ! Cela m’avait choqué, profondément. Je voulais alors faire un sujet là-dessus. Un documentaire aurait été compliqué à réaliser alors j’ai conjugué mon désir de faire de la fiction avec ce sujet qui me touchait. »

 Nils Martin

Dans la fiction imaginée par Nils, la jeune femme attaquée ne cesse de répéter : « lâche-moi, lâche-moi ! ». Puis une phrase glaçante vient se glisser d’entre les lèvres du compagnon violent. Les spectateurs pourront entendre : « la dernière fois, les flics n’ont rien fait, ce n’est pas maintenant que ça va changer ! ». On comprend alors que cette posture de défense n’est pas nouvelle pour la jeune femme, et qu’un appel à l’aide a déjà été fait. Dans les affaires de féminicide, les alertes sont souvent négligées par les forces de l’ordre. Parmi les 120 femmes tuées en 2018, un tiers avait déposé une plainte ou une main courante. Cet intolérable, le jeune scénariste a voulu le représenter à travers le prisme de sa caméra. « Je ne dis pas que la justice est mal faite, assure t-il, mais elle n’est pas assez sensible sur certains points. Ce film peut montrer qu’il faudrait davantage sensibiliser les policiers dans leurs formations, pour savoir recevoir une plainte lorsque c’est difficile psychologiquement. C’est quelque chose dont il faut parler. »

L’indépendance comme clé de voûte

« Le Sisyphes » sera un film indépendant, c’est-à-dire qu’aucune chaîne de télévision ou agence de distribution (cinéma) ne le finance.  Le budget repose uniquement sur des aides régionales et sur un appel à financement participatif (crowdfunding) via la plateforme Ulule qui permet à quiconque de contribuer au projet en ligne. Il y a deux mois, en effet, un financement participatif a été lancé. « Le Ulule servait aussi à voir si le synopsis pouvait plaire », explique le réalisateur. Visiblement, cela a été le cas. Le scénario de Nils a, malheureusement, commencé à raisonner de plus en plus avec l’actualité ; le confinement ayant multiplié les cas de violences conjugales en France. Le projet a réussi à atteindre aujourd’hui les 2 200 euros grâce au financement participatif.

Les Sisyphes

Pour son premier court-métrage, Nils Martin voulait l’indépendance totale. « C’est important pour moi d’être libre de pouvoir exprimer ce que je veux et de travailler avec l’équipe de mon choix », confie Nils. La liberté de l’écriture, la possibilité de concrétiser un projet directement après son écriture : ce sont les motivations principales qui ont poussé le réalisateur à s’engager dans la voie de l’indépendantisme. S’ajoute à cela la sensibilité humaine du jeune amoureux du cinéma. Nils Martin avait également envie de faire émerger de jeunes talents (locaux pour la plupart), qu’il soient techniciens ou acteurs… Des amis, de belles rencontres, des affinités personnelles et professionnelles : voilà de quoi est faite l’équipe du réalisateur. « La relation presque familiale que peut avoir n réalisateur avec son équipe se ressent forcément dans les films, et c’est aussi ce que je veux transmettre avec « Les Sisyphes ».»

Si vous voulez soutenir ce projet, c’est encore possible jusqu’au vendredi 1er mai à minuit sur la plateforme Ulule

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