Trois questions à Paul Mironneau, directeur du Musée national du Château de Pau


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Temps de lecture 3 min

Publication PUBLIÉ LE 04/08/2011 PAR Olivier Darrioumerle

@qui ! : Pourquoi des touristes du monde entier viennent jusqu’à Pau pour visiter le château d’Henri IV ?
Paul Mironneau : Le château de Pau est de dimension modeste, mais conserve une collection importante. Certains musées détiennent des collections plus riches, mais ils n’ont pas l’histoire du château de Pau. L’histoire d’Henri IV est irremplaçable dans l’histoire de France, même si aujourd’hui nous connaissons mal le XVIème siècle, nos points de référence ayant beaucoup changé. Certes le château de Pau jouit d’un paysage magistral dans une position géographique idéale, mais notre perception de l’espace varie avec le temps. Je dirais que le château de Pau est un lieu vraiment imprégné d’Histoire. Il existe d’autres lieux plus magistraux, et le château de Pau n’est pas forcément irremplaçable. Mais ony revient toujours, parce qu’il s’y est réellement passé quelque chose: ce retour est pour ainsi dire inscrit dans l’ADN de l’homme. Pour résumer, le château de Pau établit une cohésion forte entre la Mémoire, le Paysage et certaines expressions artistiques. Tout ceci étant bien considéré, ces jours de météo maussade contribuent aussi à grossir les rangs de nos visiteurs…

@ ! : De quel type de collection dispose le château de Pau ?
P. M. : Il dispose d’une grande diversité de collections, de styles, d’époques tout en respectant une forme de spécialisation. Lorsque le visiteur vient avec une idée il trouve autre chose. Le visiteur qui vient dans l’idée de découvrir un musée spécialisé risque cependant de passer à côté de tout le reste. Celui qui part à la rencontre du roi Henri IV ne trouve que la partie émergée de l’iceberg. Le château de Pau est avant tout un petit palais royal. Un palais royal restauré sous Louis Philippe pour des raisons politiques : revendiquer la figure royale d’Henri IV et se rapprocher de la branche dynastique des Bourbons d’Espagne. C’est ce qui nous vaut un ensemble décoratif complet mais composite, appartenant à des époques et des styles fort différents. C’est une construction artificielle initialement destinée à servir l’idéologie orléaniste. Ce n’est pas directement Henri IV qui était visé. La priorité était de faire du château de Pau une demeure royale. Cette demeure est devenue fameuse et, visite après visite, le château de Pau s’est ouvert jusqu’à devenir Musée national en 1921. Henri IV n’a cessé d’y être célébré, dans un véritable mélange de modèles : monarchique et républicain.

@ ! : Quelle est votre politique d’acquisition ?
P. M. : Une politique d’acquisition active s’est précisée au début du XXème siècle. L’objectif était de réunir des scènes, des portraits, des épisodes de la légende, un aperçu des contemporains du roi Henri IV, pour peu que les œuvres retenues aient une réelle qualité artistique. La thématique henricienne a fait du château de Pau une référence en terme de recherche et de pédagogie. Quand sort un ouvrage sur Henri IV, la majeure partie des œuvres reproduites en illustration viennent de la collection du château de Pau. Nous disposons d’un bel ensemble de peintures, du XVIème au XXème siècle, de porcelaines, de sculptures et d’œuvresgraphiques (le public voit très peu ces dernières mais elles sont d’une réelle richesse et font l’objet d’un catalogue en ligne librement accessible). Aujourd’hui, nous fouillons le terrain pour trouver des œuvres peu connues qui ont eu une postérité significative. Rubens, pour peindre Marie de Médicis, a dû travailler à partir d’esquisses ou d’images aujourd’hui souvent oubliées. Ainsi, il y a une généalogie à rechercher dans des noms moins connus de l’histoire de l’art qui ont travaillé à l’époque d’Henri IV. De la cohorte d’inconnus aux grands noms, « le va-et-vient constant » est un grand pilier de l’histoire de l’art. Les œuvres du musée nous montrent bien comment se forme, puis évolue, le reflet d’une personne, selon des constructions idéologiques, politiques et artistiques.

photo : Aqui.fr


propos reccueillis par Olivier Darrioumerle

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