Un Orphée aveugle qui vaut le coup d’oeil


Clémence Ravion
Copier le lien Partager sur FaceBook Partager sur Twitter Partager sur Linkedin Imprimer
Temps de lecture 1 min

Publication PUBLIÉ LE 16/12/2013 PAR Lise Gallitre

Orfeu Cego (Orphée aveugle), c’est prendre les mots dans l’ordre, c’est Orfeu avant Cego, c’est l’amour avant le handicap, ce sont des bouches qui parlent d’amour avant des yeux qui n’y voient pas. Imaginée et envisagée à partir de témoignage de non-voyants, cette pièce écrite et mise en scène par Arnaud Poujol inversait alors les schémas habituels. Plus qu’inverser, elle plaçait la salle et la scène dans une obscurité commune, une fragilité contagieuse: bandeaux sur les yeux des spectateurs disposés en cercle autour d’un plateau occupé par cinq personnages qui n’y voient pas non plus. Un aveuglement partagé par toutes et tous, une belle manière de d’achever ces quinze jours de Festival Hors Jeu/En Jeu, manifestation conduite par la Ligue de l’Enseignement de la Gironde souhaitant faire de la culture la chose du monde la mieux partagée, de Cenon à Ambarès, de Bordeaux à Gradignan et hier à Eysines, pari tenu.

Des voix pour mieux voir Orfeu Cego, c’est entendre tout ce qu’on ne voit pas, c’est l’oreille toute puissante au secours de l’oeil malade, c’est la gloire du mot sur le hasard des maux. Plongé dans l’absence du voir, on entend mieux, on écoute, tout. Successivement, les voix tantôt fortes, tantôt fragiles de Cécile Delacherie, Florence Marquier, Elise Servières, Sonia Millot et Vincent Nadal s’expriment et deviennent des phares au milieu de cette obscurité; oubliant rapidement le fin bandeau qui l’empêche de voir, le spectateur se laisse alors guider par le ton, le grain de voix, l’inflexion et bien-sûr les histoires de celles et de celui qui parlent et, pendant près d’une heure, il oublie ce qu’il ne voit pas et écoute alors avec toute son attention ce qu’il n’aurait peut-être qu’entendu si son oeil avait vu. Le texte d’Arnaud Poujol, la justesse des comédiens et les notes du musicien (Serge Korjanevski) s’allient alors dans ce spectacle singulier où le handicap n’exlut pas, bien au contraire. Difficile ici de dire qu’Orfeu Cego est une pièce à voir, ce serait surprenant. Elle est à entendre, c’est évident.

Partagez l'article !
Copier le lien Partager sur FaceBook Partager sur Twitter Partager sur Linkedin Imprimer
On en parle ! Gironde
À lire ! CULTURE > Nos derniers articles