Aménagement foncier: opération réussie pour la SAFER en Sauternais


Comment faire lorsque plusieurs châteaux, dont Yquem, sont acquéreurs des mêmes vignes? Voici la solution mise en oeuvre avec succès par la SAFER Aquitaine-Atlantique

Bilbil
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Temps de lecture 3 min

Publication PUBLIÉ LE 28/12/2008 PAR Gilbert Garrouty

Si dans certains secteurs du sud-ouest la friche gagne du terrain au fur et à mesure de la disparition de l’agriculture paysanne, sans que cela n’entraîne d’autre émoi que celui de quelques nostalgiques d’un passé pas si lointain, il en est d’autres, où le sol conserve, voire conforte sa valeur. Exemple : la zone AOC de Sauternes, avec la présence de ce géant des châteaux viticoles, peut-être le plus connu et le plus célèbre au monde, Yquem. A première vue de quoi faire stresser quelque peu les responsables des structures professionnelles départementales et régionales, en particulier ceux d’organismes qui ne passent pas pour être des enfants du libéralisme à tout crin tels que les SAFER (Sociétés d’Aménagement Foncier et d’Etablissement Rural). C’est pourtant dans ce secteur de Sauternes-Barsac, en Gironde que la SAFER Aquitaine-Atlantique (président : Francis Massé, directeur : Pierre Pouget) a dernièrement été amenée à régler un dossier délicat. En voici le déroulé.

Préemption avant rétrocession
Tout a commencé il y a guère plus d’un an lorsque les tenants d’une indivision en plusieurs parcelles de vignes de 2ha 27 sur les communes de Bommes et de Barsac, jusque là en location, décident de vendre. C’est un domaine voisin, château Haut-Bergeron (famille Lamothe à Barsac) qui se portera acquéreur, et c’est par le canal des notifications des transactions qui lui sont obligatoirement communiquées que la SAFER Aquitaine-Atlantique apprendra l’opération. Peut-être les choses en seraient-elles restées là si la SC Château d’Yquem, elle-même voisine contigue de certaines parcelles, n’avait pas, en même temps, manifesté son intérêt pour ces vignes en invoquant l’heureuse incidence en matière d’aménagement foncier si un tel échange pouvait être possible. Au point où en étaient les choses- d’autant qu’un autre riverain, château Raymon-Lafon (famille Meslier à Sauternes) était lui-aussi intéressé- il n’y avait pas d’autre procédure possible que celle de la préemption. La loi accorde en effet aux SAFER le droit d’intervenir en pareil cas en acquérant les biens en cause avant de les rétrocéder conformément aux décisions des instances concernées. Mais comme on l’imagine, on allait y regarder à deux fois avant de désigner un attributaire, à plus forte raison s’il s’agissait d’Yquem. La SAFER fut cependant convaincue des arguments du représentant de la SC d’Yquem, d’autant que celui-ci faisait preuve d’une volonté réelle de conciliation et de recherche des meilleures solutions avec ses voisins. Ce qui fut fait au cours de multiples contacts et réunions en présence de la conseillère de la SAFER en charge du secteur, Sophie Errien avec, pour cette dernière, une stricte consigne: faire en sorte qu’Yquem n’agrandisse pas une propriété qui s’étendait déjà sur 188ha, dont 106 de vignes. Pour ce faire la seule issue était, pour tenter de satisfaire toutes les parties, de mettre en place une procédure d’échange en même temps que la SAFER rétrocèderait les 2ha 27 de vignes AOC, objet de la transaction.

 Avant l'opération   Après l'opération
Avant l’opération  Après l’opération
 
En moins d’un an
Après arpentage, un plan de réaménagement parcellaire sur la base d’un prix identique pour toutes les surfaces (alors que les parcelles préemptées étaient en mauvais état) donnant satisfaction au célèbre château du sauternes, mais aussi à ses deux voisins fut accepté par tous. Sophie Errien indique que l’opération n’a pas exigé la réunion de la commission locale des structures, mais qu’il fallut toutefois expliquer l’opération, et convaincre les deux commissaires du gouvernement (ministère de l’Agriculture et des Finances) qui siègent à la SAFER de ce qu’il n’y aurait pas d’agrandissement d’Yquem. Ainsi l’opération allait pouvoir aboutir par la signature en l’étude d’un notaire de Langon, le 30 juillet de cette année, quelques mois seulement après la formulation des propositions de la SAFER, le 4 mars 2008. Pour la petite histoire, on notera que l’acte comporte en avenant une convention qui interdit notamment aux acquéreurs recevant d’anciennes vignes d’Yquem de s’en prévaloir en matière de commerce et de communication. Mais Haut-Bergeron a obtenu 2ha 0127 de vignes, et Yquem tout en bénéficiant d’une restructuration, comme château Raymond-Lafon, ne s’agrandit pas. Les surfaces en questions ont été rétrocédées par la SAFER, comme le veut la loi, au prix d’achat majoré des frais. Une opération réussie, la première du genre dans ce secteur viticole girondin, qui a pu aboutir sans tensions insurmontables, grâce, souligne Sophie Errien, à la compréhension de tous, et en particulier à la franche coopération de la SC du château d’Yquem.
Gilbert Garrouty

Nos illustrations:le parcellaire avant et après (en jaune:SAFER; rouge:Yquem; bleu:Raymond-Lafon; vert:Haut-Bergeron. Photo : Bilbil

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