De nouvelles perspectives pour la filière bois construction de Nouvelle-Aquitaine


S.Laval
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Temps de lecture 5 min

Publication PUBLIÉ LE 04/11/2019 PAR Romain Béteille

Les 28 et 29 novembre prochains, les Journées Régionales de la Construction Bois de Nouvelle-Aquitaine prendront leurs quartiers au Zénith de Limoges. Plus de 150 professionnels y sont attendus, des constructeurs aux architectes en passant par les bureaux d’études ou constructeurs. La manifestation remettra ses « prix régionaux de la construction bois » pour lesquels les professionnels ont déposé 124 candidatures dans différentes catégories, de la réhabilitation d’équipement à l’aménagement neuf. Le jeudi 28 novembre permettra ainsi aux professionnels d’ouvrir plusieurs débats, notamment autour de la ressource forestière mobilisable pour la construction. Car à entendre le président de l’interprofession, Christian Ribes, le bois est une filière d’avenir dans la construction. Une enquête nationale publiée en juin dernier va dans son sens : elle précise qu’en 2018, la construction en bois de logements collectifs a augmenté de 19,4%, même si l’ossature bois reste leader autant dans la construction de maison individuelle que dans les bâtiments collectifs ou tertiaires (respectivement 84,83 et 75%).

Une envolée en cours ?

« Ce qui est important, c’est de mettre en avant des gens qui ont pensé à mettre du bois dans leur projet, que ce soit un architecte, un maître d’œuvre ou un maître d’ouvrage, de façon à créer une émulation de ces exemples-là », souligne Christian Ribes au moment d’évoquer les prix qui seront remis cette année et qui figureront au catalogue servant clairement de vitrine à une filière dont les premières prévisions de production dans les dix prochaines années sont clairement exponentielles. Selon le Comité Stratégique de la filière bois, la consommation du matériau dans la construction et la rénovation de bâtiments pourrait grimper de 32% en 2035 par rapport à 2015, et même de 40% en 2050. Une évolution qui pose notamment la question de la hausse des capacités de production. En Nouvelle-Aquitaine, le bois est la quatrième filière en termes de poids à l’export. Avec 2,8 millions d’hectares de forêts (soit un tiers du territoire), le bois qui y est récolté représente 26% du total national et 56 353 emplois. En termes de construction de bâtiments en bois, la Nouvelle-Aquitaine et la région Auvergne-Rhône Alpes sont les deux plus dynamiques (4310 réalisations en 2018 pour la première, 4340 pour la seconde), soit une part de marché nationale de 10,9%. 

Pour Christian Ribes, les perspectives décrites dans les deux études citées sont réalisables. « Aujourd’hui, la très grande majorité de nos scieries en Nouvelle-Aquitaine travaillent en une seule équipe, on peut donc quasiment doubler la production du sciage  (deux millions de mètres cubes sciés par an, dix millions de mètres cubes de bois récolté) tout en faisant baisser les coûts de production. On a des capacités et de nouveaux outils qui sont déjà dans les tuyaux et vont voir le jour dans les deux ou trois ans qui viennent. En matière première, on n’exploite pas la totalité de la croissance annuelle de nos arbres, on en a encore sous le pied. Pour la variété Douglas, par exemple, on peut par exemple fournir 30% de volume supplémentaire parce que le massif arrive à maturité dans les années 2020. Pour ce qui est du pourcentage d’évolution de la production, si ce n’est pas 32, ce sera peut-être 18 ou 20, mais en tout cas ça devrait être une progression à deux chiffres, fulgurante. Euratlantique est un exemple fort, mais les projets de construction en bois vont se développer sur tout l’arc atlantique de La Rochelle à Bayonne, ça fera aussi partie des projets des nouveaux maires… », glisse le responsable.

Équation foncière et freins

L’une des grandes ambitions de l’interprofession, c’est de se glisser dans la complexe équation du foncier disponible dans des métropoles comme Bordeaux, toujours plus étendues, en proposant une alternative : la densification, oui, mais pas sans eux. »On a un gros travail à faire pour pousser à la rénovation des établissements publics, notamment les collèges et lycées, par le bois ». En 2018, parmi les prix régionaux de la construction bois, on retrouvait notamment un centre de formation d’apprentis aux métiers du bâtiment à Chasseneuil-sur-Bonnieure (16), labellisé biosourcé niveau 3 ou encore l’extension d’une école à Bosdarros (64), projet à 830 000 euros. Alexandre Lacaze, par exemple, s’est occupé en 2017 de rénover une barre d’immeubles à Mourenx (64) pour pouvoir le rendre accessible aux personnes à mobilité réduite. Originalité : une partie du bâtiment (coursives et gardes corps) est constituée entièrement de bois. Pour l’architecte, « le bois était plus compétitif pour la mise en accessibilité de ce bâtiment que l’acier ou le béton, la finesse de la structure était plus importante. Ça participe aussi à une meilleure circulation des gens dans leur manière de se déplacer dans le bâtiment ».

Le marché, on l’a vu, est voué à s’ouvrir. Et, pourquoi pas, à participer à la surélévation de bâtiments pour lesquels un ou deux étages supplémentaires en béton seraient devenus un problème. « Grâce au bois, on peut surélever une échoppe et un ou deux étages sans mettre en danger les fondations. Ça ne veut pas dire que l’aspect extérieur sera en bois, ce qui nous importe c’est la structure ». L’extension et la surélévation sont significatifs en termes de nombre de projets en Nouvelle-Aquitaine : en 2018, ce chiffre (1485) a augmenté de +26% par rapport à 2016 (+9% au niveau national). L’utilisation de panneaux massifs pour la construction de bâtiments collectifs, de son côté, grimpe de 10% en 2018, plus du double par rapport à 2016 (+4%). Reste encore des freins à lever : l’importation au détriment de l’utilisation du bois local et national (en mars dernier, la France a été pointée du doigt par Greenpeace concernant l’importation de bois tropical) et surtout la manière de rendre cette économie plus durale, moins dans le gestion de ses parcs que dans celle de la production de déchets et des coûts en transports qu’elle mobilise. À l’aube d’un objectif bas carbone prôné par le future Règlementation Environnementale (2020), la croissance devra nécessairement être la plus verte possible.

Dans le dernier rapport du CESER Nouvelle-Aquitaine, on trouve un accompagnement nécessaire des forestiers vers « la transition des surfaces » et l’augmentation des échanges. Ce dernier point, c’est justement tout l’objectif de l’interprofession régionale. Elle ne s’interdit d’ailleurs pas, même si ce concours et ces journées sont avant tout destinées aux professionnels, d’organiser des évènements plus grand public. « On a participé à plusieurs salons de l’habitat, dont celui de Limoges en septembre. On est en train d’imaginer un salon public en association à Bordeaux, dans lequel seraient présents tous les matériaux biosourcés, une sorte de biennale qui aurait lieu les années impaires, pour ne pas rentrer en concurrence avec le Carrefour International du Bois, qui se tient les années paires à Nantes », rajoute Christian Ribes. Même si dans la dernière étude 2018 de France Forêt Bois, on note un sérieux repli pour la filière dans l’isolation thermique (-9 points à 47%, la baisse la plus importante de France avec la Bretagne), les pistes autour du bois (matériau, oeuvre ou construction) sont largement identifiées : la Nouvelle-Aquitaine est, selon l’Agreste et l’INSEE, la « première région française en termes de travaux de recherche sur la forêt et le bois ».

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