Mérignac : Sabena Technics poursuit son développement


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Publication PUBLIÉ LE 22/01/2020 PAR Romain Béteille

Ancien site de la Sogerma situé aujourd’hui au cœur de l’Aéroparc, à deux pas de Dassault, Sabena Technics s’est depuis déployée au travers de six hangars sur 32 hectares et emploie aujourd’hui 1000 salariés dont environ 10% en alternance, avec le concours d’un certain Aérocampus. Il faut dire que le secteur, très concurrentiel, a sans cesse besoin de bras. Dans un baromètre Adecco paru en juin 2019, la fabrication de matériel de transport, notamment l’aéronautique, prévoyait 5245 recrutements l’an dernier.

Changement d’échelle

Selon les responsables de Sabena Technics, le développement exponentiel de l’activité et des embauches ne s’arrêtera pas aux portes de 2019. « Quand on a fait notre plan stratégique, on a vu les tendances qui s’offraient à nous. On avait un boulevard, mais pour le prendre il fallait du monde. Notre programme en alternance représente un emploi sur dix, on le décline sur nos différents sites. Sans l’Aérocampus, ça aurait été beaucoup plus compliqué parce qu’il fallait une proximité géographique entre l’école et la société qui accueille. On s’est posés la question d’avoir notre propre organisme de formation, mais aujourd’hui nous avons de bons partenaires à proximité de chacun de nos sites. Aujourd’hui, avec Aérocampus, on recrute par promos complètes », a ainsi commenté Philippe Rochet. Ce dernier a dévoilé de grandes ambitions pour le site inauguré mardi devant environ 1000 personnes : 200 000 heures de travail par an, quasiment 300 recrutements en 2019 dans le groupe en France dont environ la moitié à Mérignac, et « le même rythme pour 2020 et 2021 », la grande majorité étant embauchés en CDI. En dix ans, Sabena affirme avoir doublé son effectif initial.

Les perspectives d’évolution de ce marché mondialisé de la maintenance sont en effet propices au développement : selon le groupe Airbus, la flotte mondiale d’avions de ligne devrait doubler d’ici 20 ans, et 640 000 nouveaux techniciens seraient nécessaires pour faire face à cette hausse. Le trafic aérien, lui, continue aussi à progresser de 4% en 2019, même si la DGAC a récemment prévu un coup de frein. En 2020, le groupe Sabena prévoit un chiffre d’affaire de 520 millions d’euros, et de 600 millions en 2021. « On a un rythme de croissance de 5 à 10% par an depuis plus de cinq ans, ça se confirme encore dans les chiffres de 2020. Il nous faut des actionnaires capables de soutenir ce développement organique. Avec le tour de table qu’on a effectué, je pense qu’on les a », a continué Philippe Rochet. En juin dernier, le groupe TAT a en effet signé la mise en vente de Sabena Technics (tout en restant actionnaire minoritaire) à un consortium d’investisseurs (Sagard, Bpi France et TowerBrook).

Sabena Technics 2020

Carnets remplis

En décembre dernier, le groupe a inauguré l’extension de son site dans la région toulousaine dédié à la mise en peinture d’avions long courrier Airbus (A350 et A330). Début 2019, la société a fait l’acquisition de la société New EAS à Perpignan pour y installer un nouveau centre de maintenance. Pour ce qui est du nouveau hangar basé à Mérignac, Sabena a obtenu une AOT (Autorisation d’Occupation Temporaire) d’une durée de 35 ans. La stratégie dédiée à la maintenance à la fois civile et militaire n’est pas le seul atout de Sabena, selon ses principaux pilotes. « Notre activité de maintenance est basée à 75% sur de l’airframe (maintenance de cellules d’avion). Cette complémentarité transforme nos concurrents en clients », a ainsi lancé Philippe Rochet. Parmi les clients de Sabena, on retrouve en effet des poids lourds : Airbus, Lufthansa ou encore IAG, groupe gérant notamment la compagnie British Airways. Sabena s’est notamment spécialisée dans le remodelage de cabines. « Aujourd’hui, sur un avion de compagnie aérienne, on refait presque plus souvent la cabine que la peinture, pour des raisons d’adaptation à la concurrence ». Confort, insonorisation, connectivité, système vidéo… autant de travaux qui risquent d’occuper l’entreprise encore un moment. « Nous avons un carnet d’avions en modification de cabine rempli jusqu’à mi-2022 et on a déjà des projets au-delà ».

Enfin, le groupe a misé plus récemment sur la maintenance digitale. En novembre dernier, la société a réussi un premier test : une opération de maintenance complète sur un A330 Corsair… sans aucune feuille de papier. « Au lieu d’avoir 10 000 pages A4, les techniciens disposent d’une tablette sur laquelle se trouve l’intégralité des opérations à effectuer. Les défauts remontent en temps réel aux équipes de pilotage et à celle responsables du planning. Le client est informé d’un défaut en quelques heures, là ou avant ça prenait bien plus de temps. On gagne en réactivité. Cette méthode va être déployée sur tout le site de Mérignac en 2020. Pour nous, c’est une réalité. Dans la modification, la réalité virtuelle est aussi devenue une brique complète de notre processus de développement », a ainsi précisé François Doré, directeur stratégie et innovation. « On répare également environ 10 000 pièces d’équipement par an. Pour faire parler ces pièces, on y associe des tags qui servent d’outils digitaux aux mécaniciens ». Le boulevard semble donc s’agrandir pour Sabena, dont les dirigeants ont assuré « ne pas vouloir s’arrêter à ce hangar ». Ce n’est d’ailleurs pas les défis qui manquent. 

Croissance et impact

Au cours de cette cérémonie d’inauguration, Philippe Rochet s’est arrêté un instant sur l’impact environnemental d’une telle croissance du trafic aérien. La culpabilité écologique du voyage en avion est en effet sujette au « flight shame ». Selon les chiffres fournis par l’Ademe au niveau national, les avions, qui représentent 1,8% des déplacements, polluent davantage que les voitures (77% des déplacements) : 144,5 grammes de CO2 par kilomètre contre 85,5. Selon une enquête réalisée par Toluna pour Easyvoyages, plus de 60% des français seraient prêts à dépenser plus pour un vol plus écoresponsable, jusqu’à 200 euros sur l’ensemble du voyage. La taxe carbone sur les billets d’avion, entrée en application en début d’année, devrait rapporter environ 180 millions d’euros par an pour un coût supplémentaire au billet compris entre 1,50 et 18 euros, reversés à l’Agence de Financement des Infrastructures de Transport en France (AFITF), dont le budget pour 2020 est de 3 milliards d’euros. En attendant une potentielle taxe sur la kérosène au niveau européen, l’augmentation de la TSBA divise. Pour le président exécutif de Sabena, l’impact environnemental « ne réduit pas la croissance du transport aérien, il n’y a aucune tendance qui dit le contraire. S’il y a bien un secteur qui a fait des progrès en matière de réduction des émissions de CO2, c’est l’aéronautique. Les nouveaux avions type A350 ou Boeing 787 consomment 20 à 30% de moins que les vieux avions de type DC-10. Suivre l’évolution de ces avions, c’est notre première contribution. Le service de proximité que l’on propose à nos clients leur permet d’aller moins loin pour assurer leur maintenance ».

Les promesses sont nombreuses : biomimétisme pour Airbus, multiplication des objectifs de réduction sur les vols intérieurs pour Air France… Autant de pistes qui pourraient inverser la tendance d’une industrie qui pourrait peser 16% des émissions mondiales de carbone d’ici à 2050. La digitalisation étant déjà en marche chez Sabena, l’avenir devrait aussi être… électrique. « On sait aujourd’hui mettre en électrique le roulage des avions, qui représente entre 20 et 25% de la consommation. Il faut qu’on s’y prépare », a souligné le président de la région Nouvelle-Aquitaine, Alain Rousset. La démocratisation n’est cependant pas encore en marche : en décembre, on apprenait le refus d’Airbus pour l’installation d’un nouveau système de roulage électrique fabriqué par Safran sur les nouveaux A320 Neo. Pour Sabena, en revanche, les carnets de commande ne devraient pas désemplir : avec 45 000 appareils prévus en vol en 2035, le marché des services aéronautiques devrait, selon une étude du journal Les Échos, « connaître une croissance enviable de 4% à 5% par an durant les deux prochaines décennies ». Largement de quoi rentabiliser l’investissement.

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