Tourisme de Bordeaux Métropole : attractivités et incertitudes


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Temps de lecture 7 min

Publication PUBLIÉ LE 18/02/2020 PAR Romain Béteille

Le bal annuel est plus que rôdé, mais il sert toujours d’indicateur sur la santé financière, les points forts et ce qu’il reste encore à améliorer sur le tourisme bordelais et métropolitain. Ce mardi 18 février, l’Office de Tourisme de Bordeaux Métropole a dégainé ses chiffres annuels sur la fréquentation touristique de la métropole bordelaise en 2019. La première tendance à retenir, c’est qu’à entendre les responsables locaux, l’attractivité, malgré un commerce marqué et impacté par les mouvements sociaux, ne se dément pas. Ainsi, la métropole a enregistré l’an dernier 6,35 millions de nuitées (contre 6,1 millions en 2018) dont 55% dans des hôtels et 20% dans des résidences hôtelières, soit une progression de +4,8% par rapport à 2018. Sans les locations touristiques (de type Airbnb), on arrive à 5,22 millions de nuitées (+3%). 2862 loueurs réguliers ont été recensés selon Stephan Delaux qui a aussi dénombré 1200 comptes clôturés actant la revente d’appartements et que 69 PV étaient « sur le bureau de la justice », en attente d’instruction. 25% de ces nuitées sont attribuées aux visiteurs étrangers (+3,6% selon l’INSEE), principalement des espagnols (5,3%), britanniques (4,9%), américains (4,4%), italiens (2,8%) et allemands (2,4%).

Fréquentation en hausse

À l’inverse, 75% des visiteurs de l’agglomération bordelaise sont français dont 17,4% de néo-aquitains. Cette offre et ces performances hôtelières servent d’indicateur fiable sur la bonne ou la mauvaise santé du secteur. Le dernier baromètre édité par la CCI de Bordeaux et de la Gironde en février 2020 recense d’ailleurs 194 hôtels et résidences de tourisme sur la métropole en 2019 (+2,6% en un an), 9550 chambres et 3534 appartements de résidence. 55% de cette offre est classée en « économique ou super économique » et 11%, à l’inverse, en offre de luxe (en baisse de 0,8%). Le taux d’occupation, lui, a progressé de 0,4 points. Autre fait instructif : la comparaison avec les autres grandes agglomérations. Ainsi, en termes de taux d’occupation, Bordeaux, avec 74,6% se situe en première position devant Nantes (72,2%) et Lyon (71,05%). Les prix moyens, eux, sont plus élevés à Lyon (83,7€) et Marseille 89,5€) qu’à Bordeaux (80,8€), mais ces derniers ont tout de même progressé de 21,4€ depuis 2011. Une augmentation des prix et des établissements qui ne désemplissent pas, voilà qui forme plutôt une belle équation, sauf peut-être pour le portefeuille… La dépense moyenne d’un séjour à Bordeaux est de 873,3€ soit 156€ par nuitée et par personne : 38% pour l’hébergement, 31% pour la restauration, 12% pour la culture et 10% pour le shopping. Le prix moyen d’une nuitée, lui, est de 102,3€.

La hausse de la fréquentation ne touche pas que les hôtels, les lieux d’exposition et musées ont aussi droit à leur embellie avec 1,49 millions de visiteurs en 2019 (+16,8%), « directement liée à l’ouverture du Muséum de Bordeaux en mars (212 000 visiteurs à lui seul) et de la MECA régionale en juin (35 000 visiteurs) ». Le tourisme fluvial, lui, est moins en forme que les croisières maritimes : le nombre de passagers a connu une baisse de 18% en 2019 pour le fluvial et une hausse de 26% pour le maritime (53 paquebots dont 43 jusqu’au centre-ville de Bordeaux en 2019, soit neuf de plus qu’en 2018). Les balades fluviales bordelaises, en revanche (Bordeaux River Cruise, Burdigala, Marco Polo, Yacht de Bordeaux), affichent une hausse de 16%. Les bornes électriques pour les paquebots fluviaux pourraient offrir de nouvelles perspectives, même s’il font partie d’une stratégie économique plus globale affichée récemment par le Grand Port Maritime. La performance de la Cité du Vin reste toujours notable : elle représente pas loin du tiers (28% pour 415 000 visiteurs) du visitorat total, même si les responsables de l’Office de tourisme ont évoqué une « fréquentation stable » en 2019, soit le quatrième musée le plus visité en province. En 2020, 350 000 visiteurs sont attendus pour assister à l’ouverture des Bassins de Lumière, dédié à l’art numérique, au sein de la Base sous-marine.

Chiffres tourisme Bordeaux 2020

Selon une étude Travelsat menée en 2019, les visites culturelles sont d’ailleurs, à 89%, la principale activité pratiquée sur place par les touristes. Le shopping et les visites de châteaux, avec 34%, sont loin derrière mais tout de même devant les activités gastronomiques (19%) ou les théâtres/spectacles/festivals (8%). Cependant, moins de la moitié des sondés (40%) déclarent avoir visité uniquement Bordeaux : en général, ils en profitent pour aller faire un petit tour à Saint-Émilion (34%), sur le Bassin d’Arcachon (34%), dans le vignoble (29%) ou dans une station balnéaire de la côte atlantique en Gironde (6%). Des données qui, poussent Stephan Delaux, adjoint au maire chargé du tourisme et de l’activité économique, à se féliciter d’un « tourisme choisi et pas subi, basé sur le contenu. Il y a une raison de fond derrière laquelle on vient nous voir, que ce soit pour le business, la gastronomie, l’attrait pour le fleuve… On a eu des propositions pour accueillir d’autres formes de tourisme comme des parcs d’attractions, mais l’on les a refusées. Le fait que les visites culturelles arrivent en tête, c’est l’illustration d’un tourisme construit et réussi », termine l’élu. 

Indice de satisfaction

Il y a toutefois des efforts à faire sur la satisfaction de la clientèle, toujours selon la même étude Travelsat, dont la norme de comparaison se base sur la moyenne Eurocities (plus de 35 destinations urbaines européennes). Ainsi, si l’accueil du personnel est au-dessus de la Norme France issue du rapport DGE 2019 basée sur 3500 visiteurs étrangers en séjour, la qualité générale des hébergements est en dessous à Bordeaux (176 contre 199). Même chose pour le rapport qualité-prix mais avec un écart moins important (142 contre 157). Côté restauration, là encore, des efforts sont à fournir sur la qualité générale (169 contre 200). En mai dernier et pour la cinquième année consécutive, Bordeaux s’est dotée d’un classement dont elle aurait bien aimé se passer : elle est la première sur le podium des villes françaises comptant le plus de fast-foods par habitant. Peut-on y voir un rapport direct avec la qualité générale de la restauration ?

Difficile d’être catégorique, mais le président de la Chambre de Commerce et d’Industrie de Bordeaux et de la Gironde admet avoir reçu « des retours négatifs de touristes considérant qu’ils ont été mal accueillis et servis. Il faut que la profession fasse des efforts. Les restaurateurs sont souvent les premiers à réclamer des subventions, mais des gens insatisfaits ont dénoncé le fait qu’ils payaient trop cher par rapport à ce qu’ils avaient dans l’assiette. On surfe sur le succès mais il faut faire attention à ne pas décevoir. Il faut surtout améliorer l’accueil et la formation des collaborateurs ». L’étude révèle toutefois une surprise : une satisfaction globale nettement supérieure à la moyenne Eurocities sur les transports publics, qu’elle se base sur l’accès (273 contre 214), l’accueil (217 contre 134) ou les prix (211 contre 126). Sans revenir sur l’intégralité des mesures, on peut citer deux principaux points faibles : la vie nocturne côté loisirs (128 contre 190) et la qualité de l’artisanat local et des souvenirs pour le shopping (107 contre 160). 

Affaires et contexte

Le tourisme d’affaires se porte visiblement tout aussi bien que le reste : il représente 47% du total. Selon un classement ICCA (International Congress and Convention Association) paru en 2018, Bordeaux se situe à la quatrième place des villes françaises pour l’organisation de congrès en nombre de participants. En 2019, la métropole a ainsi accueilli 180 congrès dont 54 internationaux. Vinexpo a fait le plein en mai, avec 40 000 visiteurs. La récente annonce de la nouvelle entité créée par l’alliance de Vinexpo Holding et de Comexposium, en grande partie pour concurrencer plus efficacement le salon ProWein allemand, devrait permettre à l’édition bordelaise de dévoiler prochainement une nouvelle stratégie. Mais quelques incertitudes demeurent encore quant à l’organisation des autres salons à venir. « Il y a une incertitude sur Vinexpo Hong Kong qui se tient en mai. Pour l’instant, on maintient l’évènement mais avec un point d’interrogation. Une solution de repli a été envisagée pour juillet, mais c’est une date plus compliquée pour la profession ».

La cause principale de ce flou temporaire, c’est l’épidémie de coronavirus en Chine. « L’impact sera très important si ça dure. Deux manifestations privées organisées par des chinois au Palais de la Bourse ont été annulées récemment », confie Patrick Seguin. « S’il y a une prolifération du virus en Afrique, ça pourrait remettre en question la tenue du sommet Afrique-France en juin », rajoute Stephan Delaux. « Cela dit, il est encore trop tôt pour mesurer les effets sur le tourisme ». Ce n’est pas le seul point d’inquiétude pour l’interprofession du vin : le poids de la taxe américaine a récemment poussé le CIVB à attirer une nouvelle fois l’attention. « La profession du vin est dans l’inquiétude, notamment au niveau des taxes, mais on ne maîtrise rien. J’ai demandé à Didier Guillaume lundi dernier de mettre la pression sur les américains, mais ça doit être une pression européenne, une pression française ne suffit pas. Aujourd’hui, la pression européenne n’existe pas, les allemands traînent des pieds et on est un peu seuls. On va tenir Vinexpo New York dans trois semaines et on a bien l’intention d’en profiter pour taper du poing sur la table auprès du gouvernement Trump », révèle le président de la CCI Bordeaux Gironde. Pour Christophe Chateau, directeur de la communication du CIVB, en revanche, pas question de remettre en cause l’édition 2020 de Bordeaux fête le vin, même dans un « contexte économique compliqué. On a plusieurs évènements qui nous touchent mais sur lesquels on n’a pas de prise, mais ce n’est pas parce qu’il y a des évènements géopolitiques qui compliquent nos marchés qu’il faut arrêter de communiquer ou d’exister. Il y a une nouvelle stratégie en place au CIVB qui est de dire que c’est parce que c’est difficile qu’il faut aller davantage au contact des consommateurs sur le terrain. On a organisé fin janvier la tournée des vins de Bordeaux pour la Saint-Vincent qui a mobilisé 1300 vignerons et négociants. La fête du vin reste l’une des dates majeures de l’année pour nous ». L’évènement a déjà pris date : il se déroulera du 18 au 21 juin prochain. 

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