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L'ÉDITO

 par Joël AUBERT Joël AUBERT
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13/04/2014

Département, façon Valls: Des élections de 2015 en manière de requiem?

C'était ce fameux acte 1 de la décentralisation qui marquait un tournant dans l'histoire de ce pays désespérant à force de jacobinisme. Trente ans plus tard, la France s'apprêterait donc à mettre à bas cet échafaudage politique et administratif, au prétexte qu'elle n'a plus les moyens de le faire vivre...

Le débat n'est pas nouveau: il l'est d'autant moins que certains hommes de gauche comme Michel Rocard l'avait lancé, de bonne heure, et que la présidence Sarkozy s'était elle-même saisie à belles dents du millefeuille, décrétant une réforme territoriale, la création d'un élu unique à double casquette, le conseiller territorial siégeant au Conseil régional et au Conseil général. Mal lui en prît d'ailleurs parce que la fronde de nombre d'élus a certainement concouru à son échec de 2012...Et au succès de François Hollande qui s'empressa de faire abolir ce conseiller hybride et de confirmer la capacité du Département comme de la Région à jouir de la compétence générale. C'est à dire, d'intervenir non seulement dans les domaines dont l'Etat s'était délésté, les collèges, l'aide sociale par exemple pour l'un ou les Lycées et les trains régionaux pour l'autre mais aussi, ici et là, en fonction des demandes que tout un chacun pouvait leur adresser.

Le nouveau premier ministre, en manière de point d'orgue à son discours de politique générale, n'a donc pas craint de rouvrir le chantier, de faire volte face par rapport au président et de prendre à contrepied les élus de sa majorité. Incitation au regroupement des Régions dont le nombre devrait diminuer de moitié en 2017 mais, plus encore, disparition à l'horizon 2021 du Département. Cette nouvelle donne, et il ne faut surtout pas l'ignorer, est inséparable de la refonte annoncée du périmètre des intercommunalités, tandis que les métropoles récupéreraient, comme cela est en train de se faire à Lyon, pour le département du Rhône, les compétences de celui-ci.

Ce chantier est d'autant plus lourd et périlleux pour ce gouvernement qu'il est, d'une part relancé en pleine contradiction avec la réforme votée l'an passé et, d'autre part, au lendemain d'une déroute électorale. En créant, au lieu et place du Conseil général un Conseil départemental et redessinant la carte de France des cantons dont le nombre était diminué de moitié, tandis que celui des conseillers doublait et que la parité devenait obligatoire, la gauche l'an passé changeait la donne politique...suscitant d'ailleurs la fronde de nombre d'élus de droite face au redécoupage. Et des recours devant le Conseil d'Etat.. Manuel Valls, fort d'une popularité en totale contradiction avec celle de François Hollande, s'attaque à forte partie. Imagine-t-on que ce département nouveau, prévu par la loi, pourra se présenter dans un an au suffrage des Français, alors qu'il est condamné à disparaître, certes en 2021, mais à disparaître quand même? La lourde défaite du PS aux municipales annonçait des élections cantonales risquées; elles s'annoncent acrobatiques. Une campagne en manière de requiem selon le mot d'un élu qui, au passage, suggérait que l'on reportât d'un an ces cantonales prévues au printemps 2015, le temps de rebattre les cartes des compétences et du qui fera quoi. Et ce, d'autant plus que l'intervention de l'assemblée départementale, notamment sur le terrain du social, entre les prestations autonomie, handicap ou encore le RSA sont lourdes d'enjeux de société, spécialement en milieu rural.

Pour les Régions qui seront, dans une certaine mesure, avec les intercommunalités, les gagnantes de la réforme annoncée, le chantier est ouvert. Le gouvernement leur donne deux ans pour prendre la main et s'entendre, de voisine à voisine. L'argument toujours avancé, selon lequel la taille de grandes régions serait une garantie de plus de poids mérite réflexion. Les deux Normandie ne devraient pas avoir trop de mal à fusionner mais si une Aquitaine de Bayonne et Pau à Angoulême et La Rochelle a du sens, en a t-elle autant en allant jusqu'aux limites de la Vienne et des Deux-Sèvres?..Et comment réaliser de véritables économies en étirant les territoires? Autant de questions qui méritent d'être étudiées et débattues avant de bouleverser les paysages.

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