Municipales: L’abstention s’installe et le FN progresse dans son implantation locale

Le constat est d'autant plus rude que cette abstention record s'accompagne de la percée des candidats du Front National qui non seulement virent, ici et là, en tête de façon spectaculaire comme c'est le cas à Perpignan ou Forbach à moins qu'ils ne soient en mesure de se maintenir au second tour, ce qui va troubler le jeu habituel et valider la stratégie de Marine Le Pen. Celle-ci est donc en passe de réussir à implanter, à la faveur de ces municipales, son mouvement dans le tissu local profond, celui qui autorise d'autres perspectives politiques. Le FN émerge désormais dans le paysage et s'installe clairement comme la formation concurrente de l'UMP, dans le sud est en premier lieu, ce qui n'est pas une surprise, mais plus encore du PS dans le Nord et dans l'Est, en particulier dans les villes et régions où la crise se fait le plus durement sentir.

Pour la gauche ces élections sont plus qu'une sanction; elles signent un divorce profond avec le pays. La défection de l'électorat socialiste est à la source de ses nombreux échecs y compris dans des villes, comme Toulouse ou Strasbourg, où on pouvait penser que le bilan des maires sortants les mettrait davantage à l'abri de déconvenues. Le pouvoir, à commencer par le chef de l'Etat, ne saurait comme Jean-Marc Ayrault l'a fait ce dimanche se contenter d'un rappel des mesures qu'il a prises pour faire face à la dette; il est placé devant l'urgence d'une nouvelle donne dont le pays comprendrait mal qu'elle s'organise autour de l'ancien maire de Nantes. Imaginons l'effet multiplicateur dans l'opinion, et bien au-delà de nos frontières, d'un vote Front National en tête lors des élections européennes toutes proches...

Le triomphe d'Alain Juppé à Bordeaux, il n'y pas d'autres mots pour qualifier un succès à 60% qui se double d'une probable reconquête de la Communauté urbaine - notons le faible score du FN dans la ville centre de l'agglomération - apporte un éclairage singulier par rapport à la tendance générale observée lors de cette élection. Certes, le bilan et la personnalité de l'homme ont joué à plein et son image nationale du moment aussi mais, au-delà du seul contexte, le discours empreint de modération dont il fait preuve a rencontré un écho qui a débordé le cadre de sa famille politique. Son coup de main à François Bayrou n'est, d'ailleurs, sans doute pas étranger non plus au résultat qui place le fondateur du Modem dans les meilleures conditions pour l'emporter à Pau. Difficile épreuve de second tour pour le député socialiste David Habib comme le sera la retombée de Vincent Feltesse qui n'est pas battu sur ses qualités propres mais est victime, en dehors d'une notoriété encore insuffisante à Bordeaux, de la très faible mobilisation de la gauche. Il fallait vraiment croire en son étoile pour se lancer dans la bataille à Pau comme à Bordeaux dans un pareil moment de la vie politique nationale...