icone plume

L'ÉDITO

 par Joël AUBERT Joël AUBERT
Copier le lien Partager sur FaceBook Partager sur Twitter Partager sur Linkedin Imprimer
07/12/2008

La Fronde des élus locaux, ou le syndrome du Duché d’Aquitaine


Si Nicolas Sarkozy pensait qu’avec un PS coupé en deux il pouvait s’autoriser une remise en cause frontale de la décentralisation il s’est trompé ; car s’il existe un espace politique où la gauche est capable de se rassembler et de faire corps c’est bien celui des collectivités locales et territoriales. Le congrès des régions de France, à Caen, vient d’en apporter la preuve. On y a vu les présidents socialistes des Régions, au coude à coude, mobilisés contre ce que Michel Vauzelle, président de la région Provence Côte d’Azur, appelle « une grande marche arrière de la décentralisation »; Alain Rousset le président de l’ARF déclarant, de son côté : « nous n’accepterons pas un changement de mode de scrutin pour les élections régionales en 2010. » On y a entendu, aussi, le secrétaire d’Etat aux collectivités, Alain Marleix, l’homme qui en catimini est en train de redessiner la carte électorale du pays, se faire copieusement siffler par d’autres élus…Et même le président UMP des maires de France se joindre au concert de réprobations contre l’Etat !

La méthode choisie par le pouvoir central est, en effet, marquée du sceau de l’autoritarisme et du favoritisme. Dernier exemple en date : ce courrier à Sarkozy des deux figures les plus influentes de l’UMP en Poitou-Charentes, Jean-Pierre Raffarin et Dominique Bussereau, l’ancien président de la Région et premier ministre et l’actuel président du Conseil général de Charente-maritime, secrétaire d’Etat aux transports. Un appel à fusionner Aquitaine et Poitou-Charentes, le retour du Duché d'Aquitaine qui pourrait d'ailleurs être agrandi. « Totalement surréaliste » pour Alain Rousset qui ajoute : « Si c'est comme ça qu'ils croient se débarrasser de Ségolène Royal je pense qu'ils se trompent ».
Ce genre de ballon d’essai participe, évidemment, de la ligne choisie à l’Elysée : on confie à Edouard Balladurune mission d’études et propositions, très centraliste dans son fonctionnement, et on tente de créer le débat localement. D’ailleurs, l’homme de l’Elysée y a d’ailleurs en parti réussi lorsqu’il a relancé l’idée d’une seule et même région Bretagne de Nantes à Rennes ou plutôt de la Vendée aux Côtes-d’Armor… Les deux Normandie sont aussi sur la sellette.

Sur le fond, cette question de la taille des Régions françaises resurgit, périodiquement, selon un vieux principe assez cartésien pour que l’on s’en méfie : elles seraient trop petites, nos régions, sources de gaspillages, et l’économie en pâtirait. L’exemple du pays basque espagnol bien moins étendu que l’actuelle Aquitaine mais pourtant beaucoup plus florissant témoigne que la question de la taille est bien moins cruciale que ne l’est le niveau réel de décentralisation. Que les moyens financiers dont une collectivité autonome bénéficie.
En réalité, le vrai débat français, aujourd’hui, devrait tourner autour de la simplification et de la redistribution des compétences, de la création d’ensembles plus logiques pour l’éducation, la formation, l’économie… Où départements d’une part, régions d’autre part, rendraient de meilleurs services et, sans doute, à un moindre coût.
Le pouvoir central avide de « ruptures » se rendra-t-il à depareils arguments où cherchera-t-il à toute fin à casser le système actuel de ces contre-pouvoirs qui lui sont, politiquement, hostiles ? Le bras de fer ne fait que commencer et l’an prochain nous rentrerons en plein dans la campagne pour les régionales de 2010…

Joël Aubert

A lire ! Éditos précédents