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L'ÉDITO

 par Joël AUBERT Joël AUBERT
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25/06/2013

Lendemains de Villeneuve-sur-Lot et limites du Front Républicain

Le Front républicain était une totale évidence dans un second tour de l'élection présidentielle. Il ne se trouvait guère de français, hormis quelques nostalgiques des guerres coloniales et de l'Action française, pour imaginer, ne fût qu'un seul instant, un président nommé Le Pen. Les républicains ne pouvaient concevoir que la République tombe entre les mains d'un personnage qui a passé sa vie entre l'activisme et la provocation.

Est-ce à dire que la fille serait décidément plus fréquentable que le père, que ce qui était impossible, hier, ne le serait plus demain? Par exemple dès 2017? Poser pareille question, en manière d'enjeu de la vie politique pour les quatre ans à venir, c'est tout simplement renoncer à faire preuve du moindre esprit critique, dès lors qu'il existe dans ce pays un mouvement qui porte le nom de Front National.

Le premier barrage à opposer au Front, c'est d'abord celui des idées et des mots pour le combattre. Et le parti socialiste, plutôt que de s'interroger gravement pour savoir si, dans un moment d'égarement, quelques uns de ses électeurs lot-et-garonnais n'auraient pas fauté, ferait mieux de contribuer à démasquer les impostures du FN. Le réel talent de Marine Le Pen consiste d'une part à peser ses mots, d'autre part dans la foulée de son père, à amalgamer en permanence, et plus que jamais, le PS et l'UMP. Ce qui, dans les eaux calmes des années Chirac, faisait sourire prend désormais, en temps de crise, de déficits qui se recreusent, de chômage de masse, une résonance assassine. Puisque la gauche au pouvoir ne semble pas pouvoir faire mieux pour lutter contre LA plaie de la vie sociale de ce pays que ne le faisait la droite, puisque s'agissant de la préoccupation majeure de nos concitoyens, l'emploi, « le changement maintenant » ça ne marche pas, ou pas assez vite, de plus en plus de français se disent, sans penser à mal, alors « pourquoi ne pas essayer » le Front ? Voici qu'avance, presque sans un mot de trop, la fille de son père face à un peuple déçu et désinformé. Car ce qui est saisissant dans la dérive actuelle de la vie politique française c'est, au nom du peuple et de son désarroi, cette manière d'acceptation d'une parole policée, la complaisance de bien des médias à l'égard des amalgames de Marine Le Pen. La faillite de la gauche à lui répondre, les terribles ambiguités et les calculs d'une partie de la droite qui commence à trembler pour son leadership.

Les prochains rendez vous électoraux, municipales et européennes, vont offrir au FN, l'an prochain, deux occasions idéales pour s'installer un peu plus dans le paysage. A bien y regarder voilà deux scrutins qui risquent de faire son affaire: les municipales pour investir quelques mairies et s'enraciner davantage, notamment par le biais d'un nouveau mode de scrutin dans les petites communes, voulu par les socialistes; les européennes pour occuper le devant de la scène avec un PS déchiré sur sa conception de l'Europe et débordé sur sa gauche.

De pareils horizons nécessitent, sans plus attendre, qu'au lieu de gloser sur le Front républicain évidemment nécessaire pour cantonner le FN dans son rôle d'exutoire, au PS comme à l'UMP, à l'UDI comme au Modem, on démontre et démonte les invraisemblances sociales, économiques, juridiques de son discours, au lieu de laisser Jean-Luc Mélenchon, seul, trop seul, s'en charger en alimentant du même coup le rejet des institutions et de ceux qui les servent.

 

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