Covid-19 : En Charente-Maritime, les vacanciers ne sont pas les bienvenus


Anne-Lise Durif
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Temps de lecture 4 min

Publication PUBLIÉ LE 04/04/2020 PAR Anne-Lise Durif

Vendredi matin, les huit maires de l’île ont pris des arrêtés interdisant la location de meublés de tourisme ou apparenté, ainsi que le séjour en résidence secondaire pour les personnes qui ne seraient pas déjà confinées sur l’île. Ils espèrent ainsi renforcer le pouvoir de police des 500 gendarmes (1) et 130 policiers déployés par la préfecture sur l’ensemble du département, à compter de ce week-end. Les opérations de contrôle vont être renforcées de jour comme de nuit, sur les routes, mais aussi en sorties d’autoroutes et de gares et à l’entrée des îles. « Les prochaines semaines de vacances, les gendarmes vont se relayer d’une semaine sur l’autre pour être en effectif constant de 350 sur le terrain », précise le colonel Bruno Makary, le commandant de groupement de la Charente-Maritime. Objectif : éviter un nouvel afflux de touristes et de résidents secondaires, après la vague d’arrivées des 16 et 17 mars.

« Le virus n’est pas en congé et le confinement n’est pas des vacances. Chacun doit rester dans son lieu de villégiature. L’objectif est d’empêcher le virus de voyager », martèle Pascal Massicot, invitant les résidents secondaires déjà présents à rester là où ils sont. Si les élus oléronais ont pris ces mesures drastiques, ce n’est pas contre eux : « Nos équipements médicaux sont  trop faibles en capacité et en personnel en cette saison pour accueillir davantage de monde », estime-t-il.

En attente d’un retour des services de l’Etat

A travers leur démarche, les maires d’Oléron espéraient surtout interpeller l’Etat, afin que soient pris des arrêtés préfectoraux à l’échelle départementale, voire régionale. C’était également le souhait du président de la communauté de communes  de l’île de Ré Lionel Quillet, qui, sans prendre de tels arrêtés, avait interpellé les services de l’Etat sur ce point dans le courant de la semaine. Les élus ont été entendus, puisque le préfet de Charente-Maritime Nicolas Basselier a pris ce samedi matin la décision « d’interdire la location, à titre touristique, des chambres d’hôtels ainsi que des meublés de tourisme ou de tout autre logement destiné à la location saisonnière situés sur l’ensemble des communes littorales de la Charente-Maritime, jusqu’au 15 avril 2020. » Difficile légalement d’interdire aux résidents secondaires de venir s’installer dans leur pied à terre. Mais sur Oléron, peu importe les éventuels recours qui pourraient survenir à terme. « C’est l’état d’urgence sanitaire qui prime », estime Pascal Massicot, qui place ses arrêtés sous la tutelle du pouvoir du ministère de la santé.  

Les vacanciers sommés de faire demi-tour

Les opérations de contrôle ont commencé vendredi matin vers 10h30. Une quinzaine de gendarmes étaient déployés à l’entrée du viaduc de l’île d’Oléron, et autant du côté de l’île de Ré. Les contrevenants sont désormais sommés de faire demi-tour, après s’être acquittés d’une amende de 135€. « Pour la journée de vendredi, nous n’avons eu qu’une seule tentative d’un Parisien confiné à Marennes (en face d’Oléron, ndlr) qui voulait se rendre sur l’île sans motif valable. Nous l’avons renvoyé dans son lieu de résidence », explique le chef d’escadron Ludovic Burette, commandant de compagnie de Rochefort. Le dispositif est relativement dissuasif : en plus d’un déploiement conséquent d’hommes et de véhicules sur ce pan de départementale à l’entrée du viaduc, les gendarmes sont appuyés par le survol régulier d’un drone. Deux hélicoptères venus de Limoges et de Mérignac se relaient pour sillonner le littoral.

A l'entrée de l'île d'Oléron, le vendredi 3 avril 2020, chaque véhicule doit justifier de la nécessité de se rendre sur l'île.

A l’entrée de l’île d’Oléron, le vendredi 3 avril 2020, chaque véhicule doit justifier de la nécessité de se rendre sur l’île. Seuls les convois sanitaires (Samu, ambulances, EFS) et les corbillards ont le droit de passer sans se justifier / credit ALD 

« Même si les règles ont globalement été bien intégrées, on a encore des gens qui se baladent en forêt de Saint-Trojan et de la Coubre, à qui il faut rappeler de rentrer chez eux », constate Bruno Makary. Les agents de la brigade mobile de Marennes ont d’ailleurs troqué leurs motos de route contre des engins tout-terrain pour faire la chasse aux contrevenants jusque dans les bois. « Ca reste une minorité, et quand on intervient, en général ils obtempèrent rapidement », poursuit le colonel.  

La criminalité ne prend pas de vacances

Depuis le début du confinement, les forces de l’ordre ont réalisé pas moins de 4000 contrôles, pour environ 150 verbalisations par jour sur l’ensemble du département. En mer non plus, ça ne plaisante pas. La brigade nautique a verbalisé six propriétaires de bateaux de plaisance pour être sortis en mer en plein confinement, et deux pêcheurs à pied. S’ils sont moins nombreux, les contrôles de vitesse  sont toujours de mise. « Certains ont tendance à oublier que les limitations de vitesse restent effectives même pendant le confinement », note avec humour Ludovic Burette, qui a entendu en trois semaines toutes sortes d’arguments fallacieux de conducteurs pour justifier leurs excès. Quatre accidents avec des dommages corporels ont été enregistrés pour cette seule première semaine d’avril. « La bonne nouvelle, c’est que la mortalité sur la route est en baisse pour le moment, à l’instar des cambriolages (-30%). Pour cela, nous avons notamment appliqué le dispositif Opération tranquillité vacances aux commerces et aux entreprises fermées », poursuit Bruno Makary, qui constate qu’en ces temps de confinement la criminalité prend un autre visage : « essentiellement des escroqueries sur le web », de la vente de pseudos masques, gels hydro-alcooliques ou médicaments, à de fausses cagnottes d’entraide. Le vandalisme prend aussi une autre figure, celui d’une xénophobie « ordinaire » : depuis le début du confinement, 18 plaintes ont été déposées sur l’île de Ré pour des dégradations de voitures, toutes immatriculées en île-de-France.  

 

(1)    500 gendarmes, dont  un renfort des escadrons de Marmande et de Verdun, ainsi que 27 élèves officiers et 33 cadres de l’école de Rochefort. Quelques dizaines de réservistes sont également sur le qui-vive.

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