Marais de Brouage : les avancées du plan de sauvegarde


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Temps de lecture 6 min

Publication PUBLIÉ LE 04/07/2019 PAR Anne-Lise Durif

Une association pastorale pour gérer le foncier

Début juin, l’Union du Marais, qui réuni les deux syndicats de gestion des marais côté Marennes et côté Rochefort, a créé une association foncière pastorale (AFP). Lancé en en 2017, son projet de création a été validé seulement cette année par arrêté préfectoral. Cet établissement public à caractère administratif regroupe les 1595 propriétaires de terrains (privés ou publics) des marais de Brouage, adhérents de fait par leur possession d’une ou plusieurs des 4 825 parcelles des 7 530 hectares de surface que compte le marais de Brouage, de Bourcefranc-le-Chapus à Saint-Agnant-les-Marais. Concrètement, l’AFP va désormais gérer l’entretien du réseau hydraulique tertiaire des marais et servir d’intermédiaire dans la location des terres.

« Les actions de l’association pastorale sont complémentaires à celles des deux syndicats », explique Carlos Origlia, responsable administratif et financier de l’association foncière pastorale des marais de Brouage. Officiellement, les deux syndicats ne peuvent intervenir que sur le réseau hydraulique primaire et secondaire, qui regroupe le Canal de Broue et tous ses canaux secondaires, qui représentent une centaine de kilomètres linéaires. Le canal Charente/Seudre est géré par son propriétaire, le Département. Et le réseau tertiaire, que représentent les petits cours d’eau et fossés courant entre les marais, et servant souvent de délimitation entre les terres, est à la charge des propriétaires des parcelles. Le problème, c’est qu’ils ne sont pas toujours entretenus, certains propriétaires étant loin géographiquement et pas toujours du milieu agricole.

 « Quand il a été question de l’entretien et de la gestion du foncier du réseau tertiaire, on s’est demandé s’il ne fallait pas tout simplement étendre la compétence aux syndicats, mais il est vite apparu qu’il était compliqué de tout mélanger », explique Carlos Origlia, « les syndicats ont pu par exemple mener des opérations ponctuelles et localisées de curetage dans les marais, dans la limites de leurs compétences législatives. Le statut de l’association pastorale va nous permettre de mettre en place une vraie politique d’entretien régulier du réseau tertiaire ».

L’AFP pourra par exemple être à l’initiative d’opérations de débroussaillage des parcelles, de la réfection des barrières de délimitation, de l’entretien des canaux et des fossés et la création de zones de contention, des plaines dédiées au pâturage avec des accès repensés, dans le but d’éviter de multiplier les passages dans les environnements les plus vulnérables. En tant qu’organisme public, elle pourra également lancer des appels d’offres auprès des entreprises pour faire réaliser ses opérations, et demander des subventions auprès des collectivités locales et de l’Etat, voire de l’Europe. Les adhérents de l’association seront consultés au fur et à mesure pour savoir quels types d’opérations les intéressent, et paieront leur part en fonction du coût global des projets et des subventions accordées. Objectif : mutualiser les moyens pour faire baisser l’addition par exploitation.

Mais le côté le plus novateur de l’association pastorale, c’est sa partie gestion locative de foncier. « Nous avons des personnes non exploitantes qui ont hérité d’une parcelle, qui habitent loin et qui ne savent pas quoi en faire. Plutôt que de la laisser en friche, nous nous chargeons de sa location, en prenant la responsabilité de trouver un locataire, d’encaisser et de reverser l’argent », explique Carlos Origlia. Cette compétence va permettre à l’AFP d’avoir une vue d’ensemble des terres disponibles, et de proposer celles vacantes à la location, voire de servir d’intermédiaire pour des échanges de terres entre propriétaires consentants, toujours en location. « L’APF ne remplace pas la SAFER, ce n’est pas son rôle », prévient le président de l’Union des Marais Jean-Marie Gilardeau, qui craint les amalgames, « Notre seul objectif, c’est d’éviter d’avoir des terres en friche pour remettre de l’élevage dessus. Et pour pouvoir le faire, il faut attirer de nouveaux agriculteurs, et pour les faire venir, il faut leur proposer des terres exploitables ». Instaurer un cercle vertueux, en somme.

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Des opérations pédagogiques

Durant ces douze derniers mois, l’Union des Marais de Brouage a mené plusieurs actions pédagogiques auprès des enfants du territoire. Six structures associatives à vocation environnementale, dont le Centre Permanent d’Initiatives pour l’Environnement (CPIE) de Marennes-Oléron, sont intervenues auprès de 18 classes autour du thème « habiter le marais », en partenariat avec leurs enseignants. Les jeunes ont pu découvrir en classe et sur le terrain la faune et le fonctionnement du marais. Ils ont rencontré des naturalistes, des agriculteurs et des ostréiculteurs qui leur ont expliqué leur métier et leur approche du marais. Les intervenants ont également fait le lien avec le projet Adapto, mené par le Conservatoire du Littoral, sur la fragilité du trait de côte et la nécessité de préserver le littoral. Objectif : sensibiliser les enfants a un environnement qu’ils connaissent peu voire pas du tout, même en habitant à proximité.

Jean-Marie Gilardeau a reçu en juin les insignes de Chevalier de l'Ordre National du Mérite pour son engagement auprès du Marais de Brouage

Jean-Marie Gilardeau a reçu en juin les insignes de Chevalier de l’Ordre National du Mérite pour son engagement auprès du Marais de Brouage.

Les projets à venir, à court et à long terme

Après un état des lieux et un travail de définition d’actions à mener qui a duré deux ans, un Contrat territorial des zones humides devrait bientôt être signé avec la Région, le Département et l’Agence de l’eau Adour-Garonne pour l’Etat. Le dossier doit être soumis au vote du comité de pilotage de l’Entente Intercommunautaire (rassemblant la CdC de Marennes et la CdA de Rochefort) le 9 juillet.   Ce contrat territorial devrait permettre de déboucher sur le financement d’un premier volet d’actions sur trois ans, pour un peu plus de 3 millions d’euros : opérations de curage des fossés, mise en place d’équipements (écluses et vannes) pour laisser passer les anguilles sur le réseau secondaire et tertiaire. Avec une validation attendue à l’automne, les travaux pourraient commencer l’an prochain.

Autre projet en cours : Avec la Somme et le Cotentin, le Marais de Bouage est devenu l’an dernier un site expérimental sur la gestion des marais, suite à un appel à projet de l’Etat concernant la « Préservation de l’élevage extensif, gestionnaire des milieux humides ». « Depuis août dernier, nous avons commencé à améliorer des modalités d’élevage, avec l’aide de l’Inra », explique Jean-Marie Gilardeau, «  Nous avons par exemple mis en place une nouvelle forme de lutte contre le parasitisme. Nous menons des travaux avec les vétérinaires pour changer les traitements des animaux. Non pas qu’ils manquent d’efficacité, bien au contraire, mais ils étaient nocifs pour la faune et la flore du marais, par l’intermédiaire des excréments des bovins ». L’Entente Intercommunautaire et l’Union des Marais ont également un projet de construction d’atelier de découpe à la périphérie du territoire. Il ne reste plus qu’à trouver l’endroit idoine, entre Rochefort et Marennes.

Troisième projet, à plus long terme : mettre en place auprès des éleveurs un système de paiement pour services environnementaux à ceux qui sont prêts à s’investir dans l’entretien. Pour y contribuer, Jean-Marie Gilardeau rêve d’une aide de la PAC : « Notre modèle pourrait préfigurer comme une expérimentation dans le cadre de l’évolution de l’attribution de la PAC. Un projet qui devrait en out cas faire écho à un programme de protection et de sauvegarde des Marais que compte lancer la Région d’ici la fin de l’année, et dont les modalités restent à définir. D’ici 2020, le Parlement des marais de Brouage compte également lancer une réflexion sur l’adaptation au changement climatique et aux submersions marines.

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