Choix d’Aqui ! – Egrégore la galerie associative de Marmande

Au départ, il y a certes l’intérêt que le fondateur, commissaire priseur avait pour l’art mais, surtout, le désir de mettre en valeur l’oeuvre d’une épouse, Catherine qui sculpte depuis 2003, avec un talent que l’on découvre, ébahi. Catherine Guérard entretenait, avec une infinie modestie,une relationavec l’art depuis une enfance et adolescence familiale en Grèce. Elle avait rêvé de faire les Beaux Arts mais l’interdit familial était tombé lorsqu’elle avait quinze ans. Heureusement, elle n’avait cessé de dessiner, reçu un premier choc en découvrant les statuettes de Tanagra dans leur berceau d’Athènes, et un second face aux moulages des corps morts de Pompeï. Aujourd’hui, le fil semble indiscutable entre les petites merveilles votives de terre cuite de Tanagra et les sculptures de Catherine Guérard. De l’argile elle est passée au bronze, fortement encouragée, en cela, par son mari. Le résultat est magnifique : quarante pièces exposées à Egrégore, dans deux salles, où elles sont servies par un éclairage particulièrement étudié. D’emblée on est frappé par la finesse du travail de l’artiste, l’expressivité des visages pour la réalisation desquels elle se sert souvent du pinceau. Le sentiment, aussi, que chacun à sa façon témoigne, sans titre, de la condition humaine, avec une dimension métaphysique qui surgit, ici et là, de ces visages souvent implorants.

Rien de surprenant dans cette confidence de Catherine Guérard: « Un des mes peintres préférés c’est Egon Schiele. » Mais là ne s’arrête pas l’intérêt d’une visite à Egrégore dont l’ouverture remonte à à peine plus de deux mois. L’ambition des Guérard est désormais partagée par d’autres artistes au sein de l’association que Jean Guérard avait en tête depuis de nombreuses années. « Ce concept de galerie associative nous le voulions tous les deux, afin de proposer un lieu à des artistes pour qu’ils puissent exposer sans être ponctionnés. » Une affirmation à laquelle acquiesce, pleinement, le sculpteur Jean-Pierre Dall’Anese, figure de la sculpture bien au-delà du Lot-et-Garonne où il réside et qui expose, ici, justement, quelques unes de ses œuvres si originales, alliance maîtrisée du métal et du bois. Dall’Anese autour des Guérard mais aussi d’autres artistes présents depuis l’ouverture d’Egrégore, les peintres Anne Ragel et son travail original sur le thème des corps entre équilibre et déséquilibre, Noska et Madore, tiennent beaucoup à cette approche associative qui se veut garantie de qualité. C’est ainsi qu’on est fasciné par une autre découverte en poussant la porte de cet endroit, la peinture de Madore, témoignage à la fois très fort et souvent bouleversant sur l’enfermement psychiatrique. Des visages tourmentés, des portraits où le rouge et le noir, à grands traits, dévoile l’univers de ces« Habitants de ma toile » que le peintre côtoie et sublime. Egrégore convainc de son ambition dès sa première exposition ; une rétrospective Bernède est en préparation. Et, déjà, Jean Guérard travaille à agrandir un espace qui a les meilleures chances de devenir un lieu animé, de culture, dans une ville qui a besoin de ce genre de défi.

J.A