Tribune Libre: LGV, le pari insensé de Réseau Ferré de France


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Temps de lecture 2 min

Publication PUBLIÉ LE 17/02/2010 PAR Joël AUBERT

Nous sommes entièrement favorables au projet LGV qui reliera Paris à Bayonne en 3 heures au lieu de 5. Faut-il pourtant ajouter une ligne nouvelle entre Bayonne et Hendaye comme le prétend RFF, arguant d’une saturation inéluctable et prochaine de la ligne existante ? Ce point de vue de RFF n’est ni plausible économiquement, ni honnête intellectuellement.

D’abord, l’augmentation du trafic passager en provenance de Paris peut être largement absorbée par la ligne actuelle qui n’est utilisée qu’à 20% de ses capacités. A ceux qui rêvent d’une ligne Paris – Madrid à grande vitesse, nous répondons que ce n’est ni un besoin ni un marché : pour un temps de trajet supérieur à 3 heures, le train subit de plein fouet la concurrence de l’avion. Enfin tous les essais de TER et de trams effectués jusqu’à présent ont donné des résultats insignifiants : il est clair que le train cadre mal avec la configuration du Pays Basque et la dispersion de son habitat.

Reste le fret et l’autoroute ferroviaire, « locomotives » supposées de la nouvelle ligne, dont RFF nous annonce un déferlement prochain au Pays Basque: une multiplication par 10 du trafic en 10 ans. Ces prévisions deviendront-elles un jour une réalité ? Il est permis d’en douter tant le bilan fret de la SNCF parle en sa défaveur : 5 plans successifs en 9 ans, soit 4 à 5 milliards de subventions versées en pure perte, n’ont jamais permis d’enrayer le déclin du fret en France. Le budget 2010 de la SNCF prévoit 2 600 postes en moins au fret. Pire encore : les prévisions de RFF sont systématiquement surévaluées depuis 25 ans, au point d’être jugées par la Cour des Comptes « fragiles, coûteuses et peu cohérentes ».

Où sont alors les « analyses raisonnées » de RFF pour le fret au Pays Basque ? Où sont les analyses détaillées du trafic transfrontalier susceptible de passer du camion au rail ? Où sont les enquêtes sur les motivations des affréteurs de camions intéressés par le fret ? Quelle incidence de la plate-forme logistique de Saragosse coté espagnol? Où en est la coordination avec nos partenaires espagnols ? Un vide saisissant dont Etienne Davignon, coordonateur européen du projet, s’est inquiété dans son dernier rapport.

Le coût de ce projet enfin. Beaucoup pourraient se dire: pourquoi rater une occasion de bâtir une infrastructure financée par d’autres ? Mais qui peut honnêtement penser que la Région Poitou-Charentes ou le département de la Vienne vont verser le moindre sou pour financer la ligne nouvelle Bayonne-Hendaye, dont le coût représente quand même 15.000 euros par foyer du Pays Basque ! Il en va du financement des infrastructures publiques comme celui des copropriétés : les habitants du rez-de-chaussée ne sont pas prêts à payer l’ascenseur dont leurs voisins du 6eme étage ont tant besoin.

Le souci de l’intérêt général n’est pas le monopole des entreprises publiques ni des politiques parisiens, loin s’en faut. Nous l’avons également chevillé au corps. Il n’émergera que d’un dialogue authentique entre les partie-prenantes du dossier et d’une analyse approfondie de la situation. Il n’est plus admissible que le projet de nouvelle ligne dépende d’un « pari » insensé dont les chances de réussite ont été si peu et si mal étudiées. Sur la base de projections réalistes, des alternatives crédibles et ambitieuses existent.


Pour le Cercle de Burrunz,

Jacques Saint Martin, ancien Président de la Chambre de Commerce de Bayonne et du Pays Basque.
Jean-Philippe Larramendy, chef d’entreprise, auteur du livre Être Basque Aujourd’hui.

Photo: fredpanassac


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