Mérignac esquisse 2018


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Temps de lecture 5 min

Publication PUBLIÉ LE 11/01/2018 PAR Romain Béteille

Tout le bonheur du monde

« Le bonheur d’un individu ne dépend pas que de l’action publique ». C’est ainsi qu’Alain Anziani, le maire de Mérignac, a choisi d’introduire ses voeux de l’année 2018. Et puisqu’il faut bien commencer quelque part, autant parler de ce que ce dernier feind de déplorer. « Nous entendons beaucoup parler des nuisances que subissent les habitants de la métropole. Il y aurait trop d’habitants, trop de circulation, trop de constructions » suppose-t-il très certainement à raison. « Lors de la conférence des territoires qui s’est tenue à Cahors le 14 décembre, la plupart des villes de taille moyenne se sont plaintes de l’effondrement de leurs centres-villes, des rideaux baissés, du chômage massif. Nous n’avons pas ces difficultés », a réaffirmé Alain Anziani en soulignant le statut privilégié de la commune qui « offre 53 000 emplois ». Évidemment, on voyait mal comment Dassault, Thales, Sabena et l’aéroport auraient pu ne pas être parmi les exemples cités, puisqu’ils l’ont déjà été, entre autres, dans le dernier bilan économique municipal de novembre. À leurs côtés, le tissu associatif, la culture, des infrastructures de transports en commun « performants et qui vont encore s’améliorer » occupent aussi une place. « Ne pensons pas que les habitants viennent ici par hasard (…) J’ai demandé un nouveau baromètre municipal. Les résultats montrent que 94% des mérignacais sont satisfaits de vivre à Mérignac, qu’ils apprécient la qualité des services et ont plutôt confiance en l’avenir ». Le propos, bien que logiquement élogieux, est tout de même nuancé. « Nous n’avons pas ces difficultés des villes pauvres, mais nous en avons d’autres. C’est le prix à payer de notre attractivité : la circulation, le stationnement, l’urbanisation, des équipements toujours insuffisants ». La rançon du succès, c’est aussi la justification que ne manque jamais d’apporter un certain Alain Juppé face aux problèmes structurants de Bordeaux. Sans la remettre en cause, précisons que le parallèle entre le discours du maire de Bordeaux et de celui de Mérignac comporte aussi quelques nuances.

Roues motrices

Si Alain Anziani apparaît en effet satisfait du fait que Mérignac profite pleinement de l’engouement et de la dynamique de la métropole bordelaise, il n’en oublie pas pour autant les obstacles. La dernière séance extraordinaire du Conseil métropolitain, dont il a rapidement fait le rappel, est d’ailleurs là pour le confirmer. « J’y ai évoqué un ras-le-bol de nos habitants. Notre agglomération semble avoir été surprise par la rapidité de son développement économique ». Et même si, assure le maire de Mérignac, « beaucoup a été fait (…) sans doute avions-nous pris vingt ans de retard dans nos décisions sur les infrastructures ». Un aveu d’échec ? Répondons à cette question en la contournant. « Le contournement maritime a été un échec économique. Le contournement ferroviaire n’a pas abouti. Le contournement routier a été abandonné. La LGV vient seulement d’être mise en circulation et elle ne vas toujours pas jusqu’à l’Espagne ou à Toulouse (le président de la région Nouvelle Aquitaine, Alain Rousset, partage sans nul doute cette déception), la mise à 2×3 voies de la rocade n’est pas achevée, l’utilisation de la bande d’arrêt d’urgence attend encore une décision préfectorale », a déploré Alain Anziani, tout en soulignant le récent plan adopté par la métropole à ce sujet comprenant notamment un barreau routier entre Langon et Mussidan, du co-voiturage, une volonté d’interdire les poids lourds sur la rocade aux heures de pointe ou de nouvelles pistes cyclables). « La voiture est encore une solution incontournable et pour longtemps, toutes les études le confirment. Nous devons en tirer les conséquences : préparer l’avenir tout en n’oubliant pas le présent et les difficultés quotidiennes de nos habitants ». Le récent plan de 220 millions d’euros adopté début décembre pour améliorer la mobilité autour de la zone de l’Aéroparc est sans aucun doute une des manières de le préparer, face à la grogne des institutionnels et des acteurs économiques locaux, d’autant qu’il comprend le prolongement du tramway vers l’aéroport en 2021. Entre temps cela dit, pas sûr que le projet de BHNS entre Saint-Aubin et la gare Saint-Jean arrive aussi tôt que prévu : octobre et la décision du tribunal administratif d’annuler la DUP (déclaration d’utilité publique) du projet sont passés par là…

On construit bien… ou on ne construit pas

Évidemment, la situation problématique du logement sur la métropole n’a pas échappé au maire de Mérignac. « Notre volonté d’une ville agréable à vivre écarte toute densification. Depuis février, nous pouvons appliquer un plan local d’urbanisme qui correspond mieux à notre vision urbaine et depuis, nous avons refusé plus de demandes de permis de construire d’immeubles collectifs que nous n’en avons acceptées. Le virage est pris », assure l’élu, tout en confirmant souhaiter « poursuivre cette orientation ». Via une charte du bien construire, qui s’adaptera au cahier des charges de la métropole en matière de qualité de construction autant que de maîtrise des coûts, Mérignac compte aussi « définir avec précision nos attentes en matière d’urbanisme négocié : concertation avec les riverains, respect de l’identité des quartiers pavillonnaires, refus d’une densification excessive, retour de la nature en ville y compris dans les zones du projet 50 000 logements ». Plus vite, plus haut, plus fort : voilà visiblement une politique que l’élu socialiste, dans tout les domaines, veut à tout prix éviter.

Social Economy

L’économie municipale et les problématiques sociales ont été les deux derniers points importants évoqués par Alain Anziani. « Nous savons depuis plusieurs années que nous ne pouvons plus attendre de l’État davantage de dotations. Il nous faut affronter cette nouvelle donne financière plus contraignante que par le passé, et ce en tenant l’engagement de ne pas augmenter la pression fiscale. Nous devons le faire d’autant plus que la loi nous impose désormais de ne pas accroître nos dépenses de fonctionnement de plus de 1,2% chaque année (…) cette limite sera difficile à respecter. Ce sera le défi des prochaines années : faire autant, sinon plus, en dépensant moins ». Ça sonne bizarrement comme le contraire d’une phrase qu’on a déjà entendu quelque part… « Je me suis prononcé pour une autre logique des finances locales qui reposerait sur un transfert de pouvoir fiscal et donc sur une vraie responsabilité locale. Plus de trente ans après les premières lois de décentralisation, il est temps d’instituer cette autonomie financière des collectivités locales », a terminé Alain Anziani, optimiste. Pas sûr que les tendances gouvernementales adoubent cet argument… 

Enfin, bien que maire d’une commune plutôt privilégiée en matière de difficultés sociales, Mérignac, selon son maire, « doit réserver un peu de sa richesse aux plus pauvres. Prochainement, nous inaugurerons de nouveaux locaux plus fonctionnels du CCAS (…) L’accueil des roms, bulgares, roumains, constitue un enjeu de notre agglomération. Mais in fine, chacun sait que les explusions ne font que déplacer la question d’un lui à un autre ». Au rayon des solutions durables, Alain Anziani préfère reparler de ces « emplacements temporaires d’insertion » annoncés par la métropole quelques semaines plus tôt, affirmant d’ailleurs que Mérignac avait pris sa part en choisissant d’en créer un chemin Darwin. Mérignac compte aussi 152 demandeurs d’asile (soit 0,2% de la population de la commune), et le maire s’est montré plutôt conciliant : « nous avons les moyens de les accueillir sans crééer de drame ni porter atteinte à ceux qui habitent ici depuis longtemps ». Qu’on se le dise : en 2018, Mérignac restera diplomate.

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