À Aérocampus, Hervé Morin défend la régionalisation de l’apprentissage


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Temps de lecture 3 min

Publication PUBLIÉ LE 16/05/2018 PAR Romain Béteille

Big Brother

« Lui qui a signé un livre qui s’appelle « Révolution », qui évoque dans les premières pages, l’idée que dans ce monde nouveau il faut penser une société nouvelle, fait preuve d’un césarisme qui est un schéma du XIXème siècle. Ce que l’unanimité des présidents de régions et de collectivités affirment, c’est qu’une partie de l’initative, de l’innovation, de la capacité à construire des modèles dans ce pilotage commun, comme le montre Aérocampus, il n’y a que nous qui pouvons le faire ». En vadrouille au sein d’Aérocampus, Hervé Morin ne mâche pas ses mots. Si le président du Medef craint le « Big Bang », le président de l’Association des Régions de France, lui, a plutôt peur de l’État Big Brother. Et pour cause : selon lui, ce que prépare le gouvernement et qui a été présenté il y a trois semaines en conseil par la ministre du travail, Muriel Pénicaud, a largement de quoi susciter la colère des élus locaux. La réforme de l’apprentissage, deuxième chantier social chaud du gouvernement après les ordonnances du Code du Travail, prévoirait notamment de transformer la logique selon laquelle les CFA seraient financés auprès des régions en un turn-over de marché, en fonction des contrats signés. Si, pour Aérocampus, qui ne manque jamais une occasion de prouver son développement, cela ne devrait pas forcément être un drame annoncé, dans le principe, c’est plus compliqué.

Ventes privées

« J’étais hier devant la Commission des Affaires Sociales à expliquer aux députés En Marche qu’ils se trompaient sur le modèle qu’ils allaient voter sur l’apprentissage et les formations par alternance », a précisé Hervé Morin. « On est en train de créer une usine à gaz qui sera un échec absolu parce que bâti sur une conception qui ne correspond pas à l’agilité dont on a besoin pour bâtir des modèles de formation qui sont tous différents même s’ils ont un socle commun. Cette granulométrie fine de la construction d’un organisme de formation doit être créée avec une collectivité capable d’avoir une certaine agilité. Ce que nous défendons, c’est un modèle où le monde de l’économie construit avec nous des formations nouvelles, les adapte, et non pas un modèle où la formation sera financée selon la loi de l’économie de marché où il n’y aura plus aucun mécanisme de régulation dans l’éducation ». En clair, cette recentralisation des financements ne plaît évidemment pas du tout aux Présidents des Régions, alors même qu’elles sont désignées responsables de la politique des formations professionnelles depuis 2014. Ce que les élus craignent, en plus d’une « marchandisation » de l’éducation déjà évoquée, c’est aussi un renforcement de l’inégalité des territoires. « Demain matin, n’importe qui pourra ouvrir un centre de formation dès lors qu’il aura les certifications le permettant; donc la construction d’un modèle avec un prix pour chaque formation va aboutir à la désertification et à l’affaiblissement de l’offre de formation sur beaucoup de territoires. Cela va créer des espaces entiers dans lesquels on aura une réduction des offres de formation voire leur disparition. Il y a une erreur fondamentale de conception puisque si l’offre de formation disparaît, l’économie part derrière ».

Schéma régional

Bien que n’étant pas forcément de la même formation politique, le président de la Nouvelle Aquitaine, Alain Rousset, y est aussi allé de son commentaire entre deux visites. « Le problème des entreprises aujourd’hui, ce n’est pas de licencier, c’est de recruter. Il fallait prendre à bras le corps le problème de l’apprentissage, mais critiquer les régions qui n’auraient pas assez augmenté le nombre d’apprentis depuis 2014, c’est une erreur de fond. Chaque région fait un travail, même inégal, pour mettre l’appareil de formation à un niveau de qualité et d’accueil attractif pour les familles ». « Il faut rétablir un schéma régional avec une perspective et une vision à moyen terme. On nous dit que les régions ont 180 millions d’euros pour financer l’investissement, mais pourquoi mettre de l’argent dans un centre de formation plutôt que dans un autre ? Il faut aussi que l’on puisse alimenter l’apprentissage en laissant les régions alimenter l’orientation et la formation », poursuit Hervé Morin, en parlant de quelques 700 CFA, majoritairement situés en zone rurale, concernés par une menace potentielle. Si le message pouvait difficilement être plus clair, il sera certainement répété à l’envie dans les prochaines semaines, avant un examen plus poussé du projet de loi au Parlement cet été. L’Aérocampus ne sera d’ailleurs pas la seule visite dans des centres de formation pour le Président de l’ARF, qui a déjà annoncé un « grand meeting » le 26 septembre, à la veille du Congrès des Régions de France, « au nom des libertés locales ». A taxer le Gouvernement de jacobinisme, autant jouer les Girondins jusqu’au bout…

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