Climat et finances: le Conseil régional et ses élus courent après le temps


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Publication PUBLIÉ LE 24/10/2018 PAR Solène MÉRIC

Le corollaire du temps, sans doute est la patience. Et il en aura fallu aux auditeurs des débats de cette séance plénière… Tant les bisbilles et chamailleries furent nombreux entre élus, sur la question de leur temps de parole mal ou peu respecté par les uns, mais il faut le dire aussi, mal ou peu défini par les autres. Des échanges et interpellations dignes des cours d’écoles que la plupart des élus régionaux, ont pourtant quitté depuis (fort) longtemps. De quoi venir régulièrement polluer les débats pour au total, et sans conteste, faire perdre plus de temps, et d’intelligibilité aux propos qu’autre chose… Pourtant, des dossiers méritant des échanges passionnés sur le fond, plus que sur la forme, la plénière de ce début de semaine n’en manquait pas, et les messages, de part et d’autres de l’assemblée sont, malgré tout, passés.

Dépenses: « un mur infranchissable » en 2021 ?
Sur les orientations budgétaires 2019 présentées par Andréa Brouille, vice-présidente chargée des finances, en même temps que des projections de dépenses et de recettes sur 3 ans, ce sont presque des félicitations que l’on a pu entendre dans la bouche des opposants, reconnaissant la bonne santé financière de la collectivité, « portée par une conjoncture positive en terme de recettes », souligne notamment Olivier Chartier, vice président LR de la Commission des finances. Un opposant qui, à l’image des autres représentants des partis de l’opposition, lâche un « banco !» presque enthousiaste à la proposition de l’exécutif de baisser de 4% les dépenses de fonctionnement de la collectivité… Tout en mettant en doute la faisabilité de la chose, et, à plus long terme, la tenabilité de la stratégie budgétaire régionale à 3 ans, « malgré les efforts affichés ». « Vos objectifs pour la durée du mandat étaient affichés à un taux d’épargne brute de 20% du budget, à une capacité de désendettement contenue dans les clous des 7 années, et d’un investissement à hauteur de 30% du budget. Est-ce tenable ? Votre taux d’épargne brute est à 17% pour 2019, c’est assez inférieur aux objectifs. L’endettement se dégrade de façon constante et inéluctable, et pour 2021 vous nous annoncez une capacité de désendettement à 6,1 années : on sera proche de la barre fatidique des 7 ans. En 2021, l’encours total de la dette sera de 2,8 Mds€, soit 1Md supplémentaire par rapport à la situation initiale. Si l’objectif en 2021 est d’être au taquet de l’endettement et de l’épargne brute, qu’est ce qu’on laissera aux successeurs ? »

Un questionnement et des inquiétudes qu’Alain Rousset dit « partager », tout en soulignant la difficulté de l’exercice que suggère l’élu LR : diminuer encore les dépenses. « Quel arbitrage devons-nous faire ? Je ferme la moitié des lignes de TER ? Je diminue les dotations des lycées ? Quelles politiques dois-je supprimer? »
Du côté du Rassemblement National, « extrêmement dubitatif sur l’objectif inédit de -4% de dépenses de fonctionnement », une partie de la réponse à cette question peut-être trouvée du côté du budget culture, annoncé comme « sanctuarisé » par l’exécutif. Un choix que le parti d’extrême droite dénonce plus que fermement. Pour l’UDI, reconnaissant une santé financière et un fonctionnement « corrects » du Conseil régional post fusion, Jean Dionis souligne tout de même que «les chiffres sont moins bons que la moyenne des autres régions françaises ». Si Alain Rousset concède « le décrochage » au niveau du taux d’épargne brute, « nous restons dans des créneaux acceptables en terme de désendettement où nous sommes meilleurs que la moyenne nationale », pointe-t-il. Quant aux représentants EELV et Génération.s, « satisfaits » des équilibres présentés, ils plaident pour que la Région, à commencer par son budget, prennent « un virage écologique, et sortent des objectifs strictement financiers », en incluant, cite en exemple Nicolas Gamache pour EELV, « un budget carbone régional dans les orientations budgétaires. »

Une séance plénière exceptionnelle annoncée sur le climat
Un sujet climatique et environnemental qui n’a pas échappé au Président de la Région, qui dès son discours introductif annonçait un « engagement politique de la région » dans ce sens, frappé de constater que « le ring est en feu, mais la prise de conscience n’est pas si avérée dans les esprits. C’est une situation affreuse ! ». Un engagement sur le climat qui au-delà, notamment, de l’entente sur l’eau signée à l’échelle du Sud-Ouest il y a quelques jours (voir notre article), ou encore la production des rapports AcclimaTerra commandités par la Région sur les impacts du changement climatique, devrait prendre la forme au premier semestre 2019, « d’une assemblée plénière exceptionnelle dédiée à ces thématiques. Nous devons réfléchir au logement, à l’agriculture, à l’eau… Il nous faudrait pourquoi pas des « territoires hors CO2 » où l’on pourrait mener un certain nombre d’expérimentations en la matière », cite-t-il en exemple. Autre initiative évoquée : « réunir les industriels et les politiques pour un débat sur les technologies critiques et voir comment avancer sur le sujet ».
Si ces propos sur le climat auront été appréciés sur tous les bancs, le thème, a priori fédérateur, aura pourtant provoqué une petite tension au sein de la majorité même. En cause, l’initiative du groupe EELV de proposer à la signature de l’ensemble des élus régionaux un « Manifeste pour le Climat » visant à « une prise en compte ambitieuse de la transition écologique dans l’ensemble des politiques publiques » de la région et « à ne rien lâcher sur l’urgence écologique », détaillait Léonore Moncond’huy, co-présidente du groupe. Mais, le bel élan de fond, s’est fracassé sur une maladroitesse de forme… Le groupe socialiste, à travers la voix de son président Matthias Fekl, dénonçant une proposition trop tardive (arrivée la veille au soir de la séance plénière) empêchant aux autres élus de l’assemblée de prendre part à la rédaction et à la réflexion de ce texte se voulant pourtant trans-partisan. Un désaccord sur la méthode, d’autant plus appuyé par le Président du Conseil régional lui-même, adressant aux élus verts, membre de sa majorité, une remarque brève mais cinglante sous forme de rappel à l’ordre : « Sur le climat il y a donc deux propositions. La vôtre et la mienne ».
Pas de signataires d’élus socialistes donc en bas de ce Manifeste, qui aura au total réuni les signatures d’une quarantaine d’élus des groupes UDI, LR, Radicaux de gauche et bien sûr EELV.

Un budget agricole en hausse
Les questions de la transition énergétique, plus que liées à celle de l’urgence climatique auront pourtant étaient un fil rouge ou presque de cette plénière, avec des délibérations sur l’élargissement du dispositif lié à la rénovation énergétique des logements, une évolution du règlement d’intervention sur les projets participatifs et citoyens pour la transition énergétique, la création du parc naturel du Médoc, ou encore l’adoption à l’unanimité d’une feuille de route « Alimentation, Agriculture et Territoire ». Celle-ci prône une meilleure structuration des circuits courts et l’ancrage territorial des filières alimentaires, en parallèle de l’accompagnement des mutations des modèles de productions agricoles tant d’un point de vue environnemental qu’en terme de maintien de la valeur ajoutée de ces productions à l’agriculteur. Sur ce sujet de la mutation agricole, le budget dédié à l’agriculture, a par ailleurs été annoncé en hausse (de 45 à 62 M€ selon les chiffres cités) pour 2019 à l’occasion du débat des orientations budgétaires, « en échange d’un virage agrobiologique de l’agriculture » a plusieurs fois souligné Alain Rousset.

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