Economie, tourisme et précarité : des délibérations réussies autour du Covid-19


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Temps de lecture 9 min

Publication PUBLIÉ LE 29/05/2020 PAR Lucile Bonnin

La salle où se tient habituellement les délibérations du Conseil Régional de la Nouvelle-Aquitaine n’a jamais été aussi vide… Pourtant, tous les élus sont bien présents… mais par écrans interposés ! Une situation inhabituelle qui n’a pour autant pas empêché les élus de s’accorder sur la marche à suivre pour reprendre les rennes face à la crise du Covid-19. La séance plénière s’est ouverte sur le vibrant hommage d’Alain Rousset, Président de la Nouvelle-Aquitaine, à Laurent Lenoir, conseiller régional, disparu des suites d’une chute accidentelle. En harmonie, les différents représentants des partis politiques ont rendu un bel hommage à l’élu de la Corrèze. Une minute de silence a été observée à cet effet avant d’entrer dans le vif du sujet. Le président de la Nouvelle-Aquitaine a ensuite tenu à remercier les groupes politiques qui ont fait connaître leurs intentions de vote en prémices de cette réunion exceptionnelle, en regrettant la non participation du Rassemblement National à cet exercice de facilitation des délibérations. « Cette séance est particulière car c’est à la fois un premier bilan de la situation et une amorce de la réflexion des plans de rebondissement et de résilience », a précisé Alain Rousset.

De nombreux élus se sont alors exprimés sur ce premier bilan lié directement à l’action de la Région dans la crise sanitaire actuelle. Si beaucoup ont regretté que la séance pleinière ne puisse se faire physiquement, de nombreuses remarques ont été apportées concernant cette gestion de la crise. Guillaume Guérin le président du groupe LR/CPNT au Conseil Régional a tenu à saluer « de nombreux dispositifs et notamment le fonds de prêt de proximité et de solidarité géré par les plateformes d’initiatives locales ». De son côté, Pascale Requenna, conseillère régionale Modem et Union Centriste constate que la Région répond « présente au rendez-vous ». De nombreuses remarques positives ont donc été faites sur l’action de la Région.

Des leçons et des conclusions variées

Mais que retient-on réellement de la crise ? Cette réunion a aussi été l’occasion pour chaque élu de relever des points primordiaux, sur lesquels un travail est encore à faire. Pour Stéphane Delpeyrat-Vincent, président du groupe socialiste à la Région, «  la crise a avant tout mis à jour les inégalités », ce qui a fait basculer une grande partie de la population dans la précarité. Benoit Biteau, conseiller régional Parti Radical de Gauche, rejoint cette inquiétude sur la précarité de la population mais salue la volonté de la Région d’accompagner notamment les étudiants qui sont restés confinés seuls sur le territoire. En termes de tourisme, ce dernier ajoute que « l’innovation ne doit plus être uniquement technologique mais aussi sociale et humaine ». Léonore Moncond’huy, élue EELV le rejoint sur ce point et parle de « saisir l’occasion pour revenir vers un mode de vie plus respectueux ». Les préoccupations partagées des élus sont d’ordre sociales et environnementales, mais l’économie de la Nouvelle-Aquitaine a aussi fait l’objet de diverses remarques avant l’étude des grands dossiers pour la séance plénière de ce jour. Jacques Colombier, du Rassemblement National, interpelle le Président de la Région sur ce sujet : « La Région peut aider mais des priorités s’imposent. Soyez cohérent, œuvrez pour l’essentiel et le nécessaire ! » La conseillère régionale Nathalie Le Guen, représentante des Droites indépendantes de Nouvelle-Aquitaine, rejoint l’élu sur ce point en expliquant que le libre échange mondialisé est un vrai danger, et que la période a été révélatrice en la matière. Nicolas Fekl, conseiller régional Parti Socialiste et apparenté, insiste pour sa part sur « le besoin d’être vigilent sur les rachats hostiles d’entreprises du territoire, que cela soit pour les PME ou les TPE ». Un pêle-mêle de réflexions qui a permis, en guise d’introduction aux grands dossiers à voter à propos du Covid-19, de clarifier le débat sur la direction que la Région Nouvelle-Aquitaine doit prendre après cette rude épreuve encore jamais expérimentée.

Développement économique et touristique

La pandémie de Covid-19 a déjà de lourdes conséquences pour les entreprises, et fait craindre des impacts majeurs, tout particulièrement pour les commerces, l’artisanat et les services de proximité. Dans ce contexte, la Région Nouvelle-Aquitaine a décidé de venir en aide aux très petites entreprises (TPE) en soutenant les investissements indispensables à leur maintien ou à leur reprise d’activité durant toute la période d’urgence sanitaire. Un plan de relance pour les TPE a été voté ce jour en séance pleinière afin de soutenir les très petites entreprises à réaliser les investissements indispensables à leur maintien ou au développement de leur activité qui étaient prévus, avant ou durant le confinement. Présenté par Philippe Nauche, Vice-Président du Conseil Régional, ce plan a fait l’objet d’une délibération car « des dossiers d’entreprises qui ne rentrent pas précisément dans le cadre de l’intervention ont été quand même intéressants et étudiés. « Cela vise à soutenir toutes les initiatives porteuses de reprise ou d’embauches », ajoute le vice-président. Séverine Werbrouck, élue RN, se prononce pour ce dossier mais observe cela comme un « effet d’annonce ». « Il faut agir avec la révision des conditions d’octroi des dispositifs, l’ouvrir aux dirigeants non salariés et enfin ouvrir la communication sur le terrain », affirme t-elle. Certains voient en ce plan de grandes inégalités comme Marie Françoise Nadau, conseillère régionale LR, qui parle de  « prime aux chanceux ». Ce premier dossier économique a donc fait parler, mais le Président a tenu à rappeler que « toutes les entreprises ne souffrent pas et pour aider les plus fragiles, il faut sélectionner ». Le plan de relance a été adopté, à l’unanimité. La Région Nouvelle-Aquitaine met par conséquent en place un plan d’urgence conjoncturelle de 2 millions d’euros à destination des TPE.

Conseil régional de Nouvelle-Aquitaine

La Région réaffirme aussi fortement son engagement auprès de la filière touristique et organise son « plan de reprise des activités touristiques ». Sandrine Derville, Vice-Présidente en charge du Tourisme qui a présenté ce plan rappelle à quel point les dommages sont importants et à quel point le secteur est primordial en Nouvelle-Aquitaine : « On observe une baisse de 25% du PIB touristique et nous craignons que près de 10% des entreprises soient menacées par des cessations d’activité, indique t-elle. Mais le tourisme est un secteur essentiel, et le premier secteur d’activité dans la région, ce qui représente environ 140 000 emplois… » Ce plan de redémarrage progressif consiste avant tout à accompagner les professionnels (en fournissant des équipements de sécurité par exemple), à soutenir les acteurs avec des mesures visant à accompagner la formation, le recrutement des saisonniers, l’innovation avec un tourisme lab et lancer une campagne de communication pour le tourisme de proximité dans la région. Un chèque solidarité tourisme va notamment être mis en place pour les familles de classe moyenne. « Un néo-aquitain sur deux ne peut pas partir en vacances aujourd’hui », rappelle Sandrine Derville. Un soutien particulier va aussi être apporté aux acteurs du tourisme social et de l’éducation populaire, ce que l’élue Léonore Moncond’huy (EELV) salue car « ces acteurs fonctionnent habituellement sans aide publique ». Pour Nathalie Fontaliran, élue régionale du groupe LR/CNPT, ce soutien arrive trop tard et l’aide financière de 4 millions d’euros n’est pas suffisante. Alain Rousset tient à rappeler de son coté que la Région a déjà mis en place de nombreux fonds concernant le tourisme. Ces mesures, qui sont un plus pour préparer le tourisme de demain, ont été adoptées à la quasi unanimité, n’étant pas validées par le groupe des Droites indépendantes de Nouvelle-Aquitaine.

Le Schéma Régional des Véloroutes a également été étudié au cours de cette séance. La volonté de la Région est de développer des infrastructures pour favoriser le tourisme à vélo. Alain Rousset, parle de ce plan comme d’un « joli dossier ». Dans le prolongement du Schéma de développement du Tourisme et des Loisirs, au sein duquel la filière «itinérance douce» ressortait comme une filière régionale importante pour nos destinations touristiques, la Région Nouvelle-Aquitaine a souhaité se doter d’un nouveau schéma régional des véloroutes couvrant la période 2020-2030. Jean Dionis du Séjour, Président du groupe UDI, réagit à ce plan en citant un article de Libération : « le vélo a un boulevard devant lui ». Puis, il exprime sa déception quant à la timidité de ce dossier qui  « manque d’ambition en cette période post-covid ». Stéphane Trifiletti, conseiller régional en charge de l’éducation à l’environnement, souhaite que ce schéma soit « le fil d’Ariane vers de nouvelles mobilités » avec pourquoi pas la mise en place d’une Maison du vélo. Cette effervescence vers une transition touristique durable a permis à la Région de voter pour ce plan à l’unanimité.

Les étudiants et le Covid-19 : un thème central qui fait consensus

La crise sanitaire, en lien avec l’épidémie de Covid-19, a provoqué la perte de la plupart des emplois étudiants et la réduction du service de la restauration universitaire ; elle a accentué les difficultés des étudiants vulnérables qui ne peuvent supporter un accroissement de leurs dépenses consacrées à l’alimentaire. Des actions relatives à l’aide alimentaire des publics étudiants ont donc été présentées par Gérard Blanchard, Vice-Président chargé de l’enseignement supérieur et de la recherche, puis votées. « Cette délibération a pour objectif d’apporter un aide alimentaire aux étudiants en précarité accrue à cause de la crise, déclare monsieur Blanchard. 6 000 étudiants sont restés sur le territoire pendant le confinement et aujourd’hui ils sont environ 3 000. Cette aide alimentaire s’appliquera pour les 3 mois à venir et les besoins ont été identifiés par les CROUS. Les 13 Banques Alimentaires de la région distribueront 25 000 colis à ces étudiants. » Alexandra Siarri, conseillère régionale LR, alerte sur le fait que beaucoup d’étudiants ne sont pas identifiés par le CROUS et qu’il faut par conséquent, « plus travailler avec les collectifs et associations universitaires » pour que ce genre de plan soit efficient. Une remarque validée par Gérard Blanchard, et prise en compte. Le plan d’aide alimentaire a été adopté à l’unanimité, même si Stéphane Delpeyrat-Vincent ajoute qu’il est regrettable que ces questions de précarité ne soient pas traitées de manière plus globale… « Il n’y a pas que les étudiants ! »

Conseil régional de Nouvelle-Aquitaine

Le logement et la mobilité des jeunes ont aussi été abordés sous le prisme de la crise sanitaire. La Région a d’abord proposé aux élus de voter « un travail collectif et un objectif ambitieux » qui supposerait un ratio de 12 logements sociaux pour 100 étudiants dans la métropole bordelaise à l’horizon 2030. Véronique Marendat rappelle que pour ce genre de convention il est utile d’avoir une action équilibrée sur tout le territoire. Alain Rousset rassure sur ce point : « les villes les plus attractives sont le plus en tension mais nous sommes attentifs à tout le territoire ». Tous les élus ont adopté ce contrat d’objectifs à l’unanimité. Une adaptation du règlement d’intervention sur la mobilité internationale pour le rendre plus opérationnel et pour plus d’équité, notamment en raison de la situation sanitaire actuelle a aussi été votée avec l’approbation de tous, sauf du parti des Droites indépendantes de Nouvelle-Aquitaine.

Environnement et transition écologique : un sujet d’avenir

Les sujets environnementaux n’ont pas été mis sur le banc de touche, et pour cause ! La Région a fait depuis longtemps son réveil écologique mais ne compte pas, au vu de la crise sanitaire actuelle, laisser de côté ce qui a été une priorité pendant longtemps. De nombreux dossiers ont alors été voté comme l’abrogation des 10 anciens schémas et plans régionaux auxquels se substitue le SRADDET. « Cela met un terme à la multiplication des documents sectoriels régionaux dans un objectif de simplification et de mise en cohérence » explique Reine-Marie Waszak, vice-présidente du Conseil régional de Nouvelle-Aquitaine en charge de l’aménagement du territoire. Un partenariat entre la Région et Madrange pour anticiper les effets du dérèglement climatique a aussi été abordé au cours de cette séance plénière pourtant spéciale. « La Région soutient les entreprises indépendantes qui contribuent au développement des énergies renouvelables, à la politique régionale de sobriété et efficacité énergétique, et au développement durable des territoires » précise Alain Rousset, président du Conseil régional de Nouvelle-Aquitaine. Autre exemple : un contrat de Parc naturel régional Médoc 2020-2022 a été voté pour concilier développement économique et social avec la préservation d’un territoire d’exception. Le fait environnemental a été encore une fois très présent dans cette séance plénière du vendredi 29 mai, pourtant placée sous le signe du virus… Une preuve une fois encore que les questions liées à l’environnement sont décisives pour la vie en Nouvelle-Aquitaine et que, la crise sanitaire, a rappelé à quel point l’urgence climatique pesait sur notre planète.

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