ETA: la fin de la dernière confrontation armée en Europe


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Temps de lecture 6 min

Publication PUBLIÉ LE 03/05/2018 PAR Felix Dufour

Alors se referme -il faut l’espérer – la dernière page de l’histoire du groupe indépendantiste et terroriste ETA aux 826 victimes. Il convient de retracer ces cinquante années d’une sale guerre au coeur de l’Europe à laquelle l’organisation indépendantiste paya aussi son lot.

 

 

31 Juillet 1959.– Création officielle d’Euskadi ta Askasasuna (ETA). En réalité, en pleine période franquiste, des étudiants de l’université de Bilbao créent le groupe clandestin d’étude Ekin (Agir) dès 1952. Trois ans plus tard il s’unit avec EGI, les Jeunesses d’EAJ-PNV, ce PNV, Parti national basque avec lequel il rompt en 1959. Sa devise « Bietan jarrai », continuer dans les deux voies. Sa signature, une hache autour de laquelle s’enroule un serpent.

7 juin 1968.– la Guardia civil tue deux Etaras Txabi Etxebarrieta et capture Iñaki Sarasketa lors d’un contrôle routier à Olarrain (Tolosa). En réponse, ETA tue le commissaire Meliton Manzanas, commandant de la police de San Sebastian. C’est le premier engrenage de la lutte armée.

1er décembre 1970.- Enlèvement du consul honoraire allemand à Saint-Sébastien Eugen Beilh. Séquestré  au Pays basque français, il sera attribué à un des chefs de guerre de l’organisation Domingo Iturbe Abasolo, dit « Txomin » qui voulait l’échanger contre des prisonniers politiques. Le diplomate sera retrouvé par la DST dans une église…de Soule.

20 décembre 1973 .- Attentat à Madrid qui tue l’amiral Carrero Blanco, chef du gouvernement du général Franco. Sa voiture est désintégrée par une bombe enterrée sous la chaussée. A quelques mètres d’une église des Jésuites où il va  prier tous les matins.

20 novembre 1975 .- Mort du dictateur espagnol, le général Franco.

 14 mars 1977 .- En Espagne, le roi Juan Carlos déclare l’amnistie générale  des prisonniers politiques, dont ceux d’ETA sans victime mortelle.

Voiture carrero blanco

27 avril 1978 .- Création de Herri Batasuna (Union populaire), coalition d’abord et parti en 1986, considérée comme le bras politique d’ETA. Ce dont elle s’est toujours défendue.

25 octobre 1979 Le Statut d’autonomie du Pays basque dit Statut de Guernica, approuvé par référendum le 25 octobre 1979 avec un taux de participation de 58,8 % et 90,3 % des suffrages en faveur du « oui », met en place un système parlementaire dans lequel le Lehendakari (Chef du Gouvernement) doit obtenir la confiance du Parlement basque. Il est élu par les 75 députés (25 pour chacun des trois territoires historiques qui forment la communauté autonome).

1983: et le GAL vint « faire justice » au Pays Basque français

19 décembre 1983 .- Assassinat au bar Kaietenia  de l’etara Ramon Oñaederra Bergara « Kattu ». C’est la première signature des Groupes antiterroristes de Libération (GAL). Madrid considérant que le statut d’autonomie n’a pas ramené la paix au Pays basque et considérant depuis longtemps que le Pays français sert de refuge, de sanctuaire, aux terroristes d’ETA. Ces mercenaires, entre 1983 et 1987, vont tuer 20 personnes dont 14 Etarras. Ils vont cesser quand le ministre de l’Intérieur Charles Pasqua assurera, ce que souhaitait le gouvernement espagnol, d’arrêter les Etaras en France.

19 juin 1987 .- Le plus meurtrier attentat à la voiture piégée de l’ETA,  dans les sous-sols de l’Hiperore, un grand magasin de Barcelone qui fait 21 morts et 45 blessés. Quatre ans plus tard, en 1991, une attaque à la voiture piégée contre le quartier général de la Guardia civile en Catalogne fera dix morts dont cinq mineurs.

13 juillet 1997 .- Miguel Angel Blanco, conseiller municipal du Parti Populaire d’Emua en Biscaye pris en otage deux jours auparavant contre le rapprochement de prisonniers basques de Madrid au Pays basque. Devant le refus, il est blessé de deux balles dans la tête, retrouvé en forêt et meurt le 13 juillet. Sa mort soulève une émotion intense en Espagne, et six millions d’Espagnols se répandent dans les rues pour réclamer la paix.

30 décembre 2006 .- Attentat à l’aéroport de Madrid, deux morts.

1er décembre 2007 .- Premier attentat d’ETA sur le territoire français sur le parking de la cafeteria Leclerc de Capbreton (Landes) Deux gardes civils espagnols, en civil, qui menaient une mission de renseignement son abattus. Ils auraient repéré un haut dirigeant de l’organisation dans la station balnéaire des Landes. Le premier meurt sur le coup, le second décèdera de ses blessures au Centre hospitalier de Bayonne deux jours plus tard.

17 mars 2010 .- Lors d’une fusillade avec la police à Dammarie-les-Lys en Seine et Marne, un brigadier de gendarmerie français tombe sous les balles d’un commando d’Etaras .

17 octobre 2011 .- Conférence internationale pour la paix de Aiete -ancienne résidence de Franco- à Saint-Sebastien avec six experts dont l’ancien secrétaire général de l’ONU et prix Nobel Kofi Annan, l’Irlandais président du Sinn Feinn, Gerry Adams, l’ancien ministre français de l’Intérieur Pierre Joxe et l’ancien chef de cabinet de Tony Blair, Jonathan Powell, etc… « Nous sommes venus au Pays Basque aujourd’hui car nous croyons qu’il est temps, et aussi qu’il est possible, de mettre un terme à la dernière confrontation armée d’Europe. » écrivent-ils dans une déclaration…..

La récupération des armes d’ETA sous haute surveillance

20 0ctobre 2011.- Deux jours après, ETA annonce l’arrêt définitif de son activité armée.

19 janvier 2014.- ETA réaffirme l’abandon de la lutte armée. Entre temps, le 18 février 2013 a eu lieu à Paris le procès  des dix derniers chefs d’ETA dont « Txeroki », comme en Espagne celui de 36 militants indépendantistes pour appartenance et collaboration à un groupe armé. Comme doit se régler la question des stocks d’armes impressionnants que détient l’organisation, celui aussi des prisonniers basques…

21 février 2014 .- Une commission internationale d’experts affirme que ETA a commencé son désarmement.

Vérité de l'arbre

8 avril 2017 .- Le matin, Jean-Noel Etcheverry, remet au maire de Bayonne et président de la Communauté d’agglomération Pays basque, la liste de la localisation de l’arsenal d’ETA, en présence  de l’archevêque de Bologne, Matteo Zuppi, du révérend Harold Good et du président de la commission internationale de vérification.

En milieu d’après-midi 20 000 personnes, dont de nombreux basques espagnols, se rassemblent place Paul Bert, dans le Petit Bayonne pour saluer les artisans de la Paix en une journée du désarmement avec l’ancien président de la Ligue des Droits de l’Homme Michel Tubiana et Harold Good, le pasteur qui avait contribué au désarmement de l’Armée républicaine irlandaise (IRA). C’est l’agriculteur Michel Berhocoirigoin, un des artisans de la Paix qui ouvrira les discours.

16 décembre 2017 .- A Louhossoa en Pays basque français, cinq militants abertzale sont interpellés. Ils se réclament artisans de la paix désirant accélérer le processus de paix et de désarmement afin de dénoncer l’immobilisme des gouvernements français et espagnol; ils tentaient de neutraliser un stock d’armes. Parmi eux, la journaliste Béatrice Molle-Haran, l’ancien président de la Chambre d’agriculture du Pays Basque Michel Berhocoirigoin, le viticulteur de l’AOP Irouléguy Michel Bergougnan, Jean-Noël Etcheverry dit « Txetx », fondateur de l’association altermondialiste Bizi et du mouvement Alternatiba, et Stéphane Etchegaray, journaliste cameraman indépendant. Ils seront remis en liberté après 96 heures de garde à vue.

8 avril 2018 .- Les associations et le président de la Communauté d’agglomération Pays basque souhaitent marquer l’anniversaire du travail effectué par les Artisans de la paix et le matérialiser par la réalisation de « La vérité de l’arbre », (Arbolaren Egia, en euskara) une statue réalisée par l’artiste basque Koldobika Jauregi. Mas la hache, symbole d’ETA, enterrée soit-elle tranchant dans le sol,  est mal acceptée. Elle a été mise provisoirement au frigo.

3 mai 2018.- Par voie de presse en Espagne, ETA annonce sa dissolution définitive

4 mai.- Dans le cadre de la prestigieuse Maison d’Edmond Rostand, les collectifs Bake Bidea et le Forum social permanent réunissent  une conférence internationale avec tous ceux qui ont contribué à ce long chemin vers la paix en présence des élus basques, Jean-René Etchegaray,  président de la Communauté d’agglomération Pays basque en tête, les députés Bru et Lasserre-David, les sénateurs Brisson et Espagnac, etc.. en présence de Gerry Adams, leader historique du Sins Fein irlandais et qui aura accompagné et encouragé les négociations basques. En sortira, comme à Aieté, une déclaration solennelle baptisée déclaration d’Arnaga évidemment. « Construire la paix est plus difficile que faire la paix » résumera le leader indépendantiste irlandais. « Dans tous les processus de paix il faut faire des concessions et la vengeance n’est pas la solution. Nos petits enfants ne comprendraient pas la vengeance. Cette déclaration reconnaît que les communautés et les familles sont toujours divisées. » Mais le texte précise et invite « à faire preuve d’honnêteté de toutes parts vis à vis du passé et de générosité d’esprit pour soigner les plaies.. »

C’est ce qui sera le plus long à accomplir après cette sale guerre en Pays basque…

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