Politique | Crise oblige, l'Europe finit par s'entendre
21/07/2020 |

Bien sûr celles et ceux qui croient que l'Union Européenne doit être protégée de toutes les dérives populistes poussent un grand soupir de soulagement. Après un très long marathon, ponctué de fortes tensions, les 27 ont fini par accoucher d'un accord pour financer la relance de l'économie, fortement ébranlée par la crise du Covid 19. La singularité de cette manière de « New Deal » à l'européenne tient au fait que les 27 ont notamment accepté le principe de mutualiser des dettes pour venir surtout en aide aux pays les plus nécessiteux, en l'occurrence l'Espagne et l'Italie, sans compter dans une moindre mesure la France. Et, même si l'accord a pu se faire à un niveau de subventions inférieures à ce que France et Allemagne réunies avaient imaginé, avec la présidente de la Commission, les sommes mises en jeu sont considérables, subventions et prêts réunis (390 milliards et 360 milliards).
Si l'accord a finalement éte rendu possible, c'est bien entendu parce que le tandem Merkel-Macron a pesé de tout son poids avec la ténacité du président belge du Conseil Européen Charles Michel, aux manettes des débats, mais aussi parce que des concessions ont été faites aux pays qui portent leur vertu gestionnaire en bandouillère. A commencer par le premier ministre néerlandais qui s'est donné le beau rôle, a obtenu des rabais, oubliant de dire que la bonne santé de l'économie des Pays Bas devait d'abord, et avant tout, au marché unique si souvent décrié mais qui permet d'assurer les trois quarts de ses débouchés. Derrière la pugnacité et les rodomontades du libéral Mark Rutte on ne peut, en effet, ignorer le contexte politique d'un pays travaillé, lui-aussi, par l'extrême droite .
Ces constats faits, il n'ya pas lieu de hurler victoire sur tous les tons et, en particulier, de voir dans cet accord une manière de vrai départ du fédéralisme dont les pères fondateurs avaient pu rêver. Nous sommes bien loin d'une union politique avec ce que tout cela implique. Cependant, ce sursaut, encore impensable avant la grave crise sanitaire et la dépression économique qu'elle provoque, peut recréer les conditions d'une forte dynamique, à un moment où les bases d'une nouvelle économie, où l'impératif écologique doit être massivement soutenu, doivent être mises sur la table et défendues.
Et, croisons les doigts pour que de la conjonction de cet accord, de la volonté de la chancelière allemande de marquer l'Histoire européenne, quelque part à l'égal d'un Adenauer, avec le soutien d'Emmanuel Macron, naisse une nouvelle prise de conscience des peuples eux-mêmes. Leur destin, celui de nos enfants, dans ce monde subverti par la Chine et son emprise sur l'économie mondiale, est plus que jamais indissociable du leadership européen. D'une nouvelle économie à inventer, d'une vie sociale à promouvoir au sein de toute l'Union, d'un patrimoine culturel à partager, d'une sécurité collective à assurer.
Par Joël Aubert
Crédit Photo : Aqui.fr