Itinéraire : Alexandra Siarri, adjointe au maire de Bordeaux en charge des « nouvelles précarités »


Isabelle Camus
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Temps de lecture 5 min

Publication PUBLIÉ LE 10/02/2011 PAR Isabelle Camus
 
 

Alexandra Courjaud-Siarri vient du pays de la chance.  C’est ainsi en tout cas qu’elle définit sa Charente natale où elle est née, 38 ans plus tôt, à Passirac.  Petit village de… soixante habitants où ses parents sont responsables d’une maison familiale rurale d’éducation. Elle y fera toute son école, dans une classe unique avec la même instit. « On vivait dans l’école. Mes parents, pour qui l’éducation était aussi un accompagnement,  avaient un gros attachement pour tous ces enfants au parcours particulier ». Des parents, très tôt chefs de famille, qui, ayant entrepris sur le tard des études pour devenir enseignants, porteront haut les valeurs  laïques et  républicaines de l’école publique. De là viendra  son obsession du souci des autres  partagée par une bonne partie des siens : du père élu, à sa mère qui l’a été, aux oncles et aux tantes agriculteurs (le signe de l’héritage politique étant : gaulliste ascendant droite sociale), toute sa famille a un jour ou l’autre assumé un rôle politique ou associatif.  A l’évidence, les notions de  collectif et de participatif sont loin pour elle de n’être que virtuelles. Alexandra Siarri a toujours vu les mondes de l’enseignement, de l’agriculture et du social se croiser. Ils formeront la clef de voute de sa future trajectoire.

 

Des lectures décisives
Alexandra Siarri « fait ses humanités » à Barbezieux. Prépare un bac C. Tombe raide dingue de Sartre et Duras, ses choix à elle. Car avant eux, elle a lu tout Zola et Balzac. Lectures à l’issue desquelles elle devait rédiger des fiches de lecture. C’est ainsi qu’à 12 ans, pendant les vacances d’été, Alexandra résumait Germinal. À 17 ans, c’est l’arrivée à Bordeaux. Elle découvre La Ferme des animaux d’Orwel et Le Procès  de Kafka. Inscrite en fac de droit, elle vit au domaine universitaire. Loin de ses repères familiers, c’est le choc de l’anonymat et d’une certaine forme de misère : « La mamie qui traine sa poubelle dans la rue, toute seule, en chaussettes… ». Son choix d’orientation résulte de sa rencontre avec l’essai de Michel Foucault : Surveiller et Punir. Un livre phare encore pour elle. La mise de côté de ceux à qui on ne demande jamais leur avis (les vieux, les roms, les taulards…) la révolte. Elle s’insurge. Elle sera directeur de prison ! Des immersions à la maison d’arrêt de Gradignan et de Fleury Mérogis la marquent profondément. Alexandra se sent comme une éponge traversée d’émotions dans un univers trop prenant. Si elle a eu l’écrit de son concours, poussée dans ses retranchements à l’oral, elle craque. Recalée, elle en porte toujours la cicatrice.

 

Du Tram au DD
Conseillère régionale depuis 2010Détentrice d’un DEA de droit privé, d’une maîtrise en droit criminel, d’un certificat d’études européennes, elle donne des cours d’anglais, de français et de maths à des enfants des Aubiers, du Grand Parc, de Bègles et de Mérignac (Beaudésert). Exit le monde carcéral. Elle fait une demande de stage en droit public à la Communauté Urbaine de Bordeaux. Et là tout s’enchaîne… Embauchée à la mission Tram en 1998, elle fait la connaissance de Véronique Guillermo, l’ex attachée de presse du Alain Juppé, premier ministre, devenue directrice de la communication de la CUB. Alexandra apprend le métier de la com’ et découvre les rouages de la « res politica » locale. Elle adore. Sa vision à elle, c’est « l’Entrisme » : « Ne pas se complaire dans un univers qui nous ressemble, mais aller dans un univers différent. On meurt du manque ». Idéalisme ? Réalisme ? En tout cas, celle qui aura eu Juppé, Rousset puis Feltesse comme présidents se retrouve à la tête des Juniors du Développement Durable de la CUB : un dispositif de sensibilisation auprès des jeunes, favorisant l’accompagnement en milieu scolaire à la mise en oeuvre de comportements écocitoyens concrets. Retour à la case agricole et enseignement. 

 

Quand Alex rencontre Alain
En Mai 2007, elle a un entretien décisif dans le cadre de… la Foire internationale avec Alain Juppé, qui s’interroge sur la pertinence d’une maison écocitoyenne. Arrivent les élections législatives. Alexandra,  qui se défend d’être fascinée mais évoque plutôt un profond respect pour la personnalité et le parcours du maire de Bordeaux, s’engage derrière lui. 0rganise des réunions chez elle, où des gens de tous bords sont invités à débattre avec le candidat  UMP de la seconde circonscription. Souffre quand il est hué, lors des résultats. « Je l’avais vu faire le projet du tram. Il a une ouverture d’esprit à 360° et l’intelligence de l’écoute ». Alain Juppé n’est pas prolixe. Il repère la personne la plus apte à faire ce qu’il veut. Il propose. C’est oui, c’est non. « Adjointe à la précarité ça vous intéresse ? ». La feuille de route lui plait. De la pure efficacité. Les précarités vont rentrer dans les réunions. Toujours aussi acharnée à défendre le sujet, Alexandra Siarri  alors conseillère municipale déléguée au logement, à l’énergie et à l’éco-habitat,  dit oui. 

Vous avez dit nouvelles précarités ?
Véronique Fayet (Solidarité) et Alexandra Siarri (Nouvelles précarités)Véronique Fayet, adjointe au maire chargée des politiques de solidarité, de santé et des seniors en solo depuis 20 ans n’est plus toute seule. Désormais elles  seront deux à oeuvrer auprès des publics vulnérables dont on constate déjà qu’ils seront au coeur de la future campagne présidentielle. Et les mauvaises langues en seront pour leur frais: les deux femmes s’entendent très bien. Ne leur reste qu’à trouver une harmonie entre leurs deux missions et définir le périmètre entre solidarité et  « nouvelles précarités ».  Pourquoi « nouvelles » vous direz-vous ? « La société française change et de nouvelles précarités apparaissent qui ne sont pas diagnostiquées précisément ni analysées, il s’agit de les mettre en lumière et de réfléchir au moyen d’y faire face  » explique celle dont c’est désormais la tâche.  « Allongement de la durée de vie du nombre d’années d’études, augmentation de la solitude, du nombre de familles monoparentales, apparition de nouvelles formes d’exclusion comme le numérique par exemple et action très concrète presque coup de poing sur des sujets d’hyper actualités : centres d’hébergement d’urgence, roms, travailleurs pauvres…. » A la fois conseillère régionale depuis son mandat électoral  en 2010, toujours fonctionnaire à la CUB (elle veut continuer à travailler) et adjointe à la mairie de BX, Alexandra Siarri a du pain sur la planche. Elle est attendue au tournant. Elle le sait. Son non encartement en irrite certains, sa mise en avant en exaspère d’autres et certaine question de ses  enfants (elle en a trois) sur la compatibilité de ses engagements de terrain avec sa proximité  du parti sarkozyste la bouscule. Heureusement. Dans une gestion du temps optimisée, découpée en séquences, de 5h 45 du matin jusqu’ à 23h30, Alexandra Siarri n’a plus qu’à faire ses preuves.

Isabelle Camus & Joël Aubert

Crédit photos : Isabelle Camus

Le prochain Itinéraire d’Aqui sera celui d’Isabelle Boudineau, vice-présidente de la Région et  première adjointe à la mairie de Bègles

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