La Charente-Maritime veut garder la main sur son développement durable


Anne-Lise Durif
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Temps de lecture 5 min

Publication PUBLIÉ LE 20/12/2020 PAR Anne-Lise Durif

@qui! : Ce schéma du développement durable, c’est pour quand exactement ? Qu’est-ce qu’il y a dedans ?

Lionel Quillet : L’objectif, c’est de l’avoir le plus rapidement possible, pour la fin du mandat départemental, afin que la nouvelle mandature puisse travailler à sa mise en place. Elle reprend plusieurs axes comme le développement d’un mix énergétique, améliorer les performances énergétiques des bâti, l’aménagement de l’espace, la préservation des paysages et notre environnement en général, comme les Espaces naturels sensibles… Sans oublier les pratiques internes du Département, avec tout un volet social pour accompagner les plus fragiles et favoriser l’accès à l’emploi. L’idée, c’est de faire le liant entre les 13 EPCI de Charente-Maritime, qui ne nous ont pas attendues pour mettre un certain nombre de projets en place ; ce schéma permettrait d’harmoniser à l’échelle du territoire et de faire un effet de levier. Nous ne sommes pas inquiets sur sa mise en application sur le littoral, mais nous le sommes plus sur la ruralité. C’est dans les zones rurales que nous comptons mettre le plus d’efforts financiers pour les habitants puissent se dire un jour qu’il est aussi agréable de vivre sur la côte qu’à la campagne car il y a des services, une mobilité, une solution énergétique, un accès à internet… similaires. Cette période de Covid-19 a engendré une très forte demande d’installation dans le département.  Mais il n’est pas utile que tout le monde aille sur le littoral. La côte a aussi ses défauts, alors qu’il y a des coins extraordinaires en Charente-Maritime.

@! : La gestion du littoral fait justement partie du schéma de développement durable. Où en est-on dans les chantiers des Plans de protection contre les inondations (PAPI) ?

L.Q.: On est en à 65% de réalisations, pour un budget de 300 millions d’euros en Charente-Maritime, de 2010 à 2030. On est toujours uniquement sur de la remise en état de l’existant : refaire des digues, des enrochements, etc. sur 250 km de côte. Il y a des disparités selon les bassins de vie. Il y a les « littoraux » lancés les plus tôt en 2011 et 2012 qui sont bien avancés, voire quasi terminés : Oléron, La Rochelle, la baie d’Yves, Chatelaillon. D’autres sont toujours en cours. Maintenant, c’est au tour des PAPI dit fluviaux, qui concernent notamment l’estuaire de la Gironde, qui ont démarré plus tard car les accords de l’Etat n’ont été donnés qu’en 2018, 2019. Pour rappel, ce sont les collectivités qui font les projets, le Département les accompagne, financièrement (20% des budgets) et en ingénierie. Depuis deux ans, on attend toujours une réponse de la Région. Elle nous a suivis sur la première génération des PAPI, en finançant à hauteur de 20%, comme cela avait été acté par la Région Poitou-Charentes à l’époque. Elle ne nous répond pas sur la suite, à savoir les avenants aux premiers chantiers et sur les nouveaux PAPI. Sans la Région, ça va être une vraie problématique financière, certaines collectivités pourraient ne pas lancer leur projet car le financement serait trop lourd. La Région est bien sûr maître de ses choix, mais qu’elle accompagne au moins sur la sécurité des Charentais-Maritimes. Certaines zones restent exposées, comme les bords de l’estuaire de la Gironde.

@! : Le schéma prévoit d’augmenter sa part d’énergie renouvelable à travers un « mix énergétique équilibré et respectueux de l’environnement ». L’éolien est de plus en plus problématique sur le département. Comment envisagez-vous son implantation à terme, et des énergies vertes en général ?

L.Q.: L’éolienne en soit est une énergie intéressante mais il ne faut pas qu’elle soit toujours au même endroit et toujours pour les mêmes – L’Observatoire de l’éolien vient de donner un avis favorable à deux projets, à Andilly et à Doeuil-sur-le Mignon, car il n’y avait aucune contre-indication par ailleurs. Mais on a aujourd’hui une centaine d’éoliennes sur le département, qui représentent 88% de l’éolien en Nouvelle-Aquitaine, en sachant que les 4 départements de l’ex Poitou-Charentes ont quasiment l’intégralité des parcs de la région. On arrive à saturation. Actuellement, il y a des projets en cours pour 400 éoliennes, de 5 opérateurs différents. Comme ils sont en concurrence, il arrive que certains proposent le même projet au même endroit ! Un nouveau problème émerge : les éoliennes sont de plus en plus grandes, aujourd’hui on a des projets avec des mâts de 200 m de haut, on n’est pas loin de la Tour Eiffel (324 mètres, antenne incluse, NDLR) ! Le problème, c’est que la loi concernant le périmètre de leur implantation n’a pas changé, on est toujours à minimum 600 m des maisons. Et c’est toujours la ruralité qui prend. Dans certains villages, les maisons sont entourées par les éoliennes des trois côtés. Qui va vouloir continuer à y habiter ? Le permis de construire n’étant plus obligatoire, l’acceptation du projet passe par l’enquête publique, qui est ensuite soumise au préfet… Lequel a des objectifs fixés par le gouvernement en matière d’implantation, même si son feu vert n’est pas systématique. Bref, aujourd’hui on peut installer une éolienne n’importe où sans permis de construire et ça devient vraiment problématique. Ca l’est d’autant plus qu’il n’y a plus de schéma de l’éolien ou des énergies vertes pour encadrer tout ça, il y a bien un schéma régional (le SRADDET, lui-même contesté par de nombreuses associations, NDLR) mais il n’impose rien. Les projets s’enchaînent les uns après les autres, il ne se passe pas une semaine sans qu’un nouveau dossier se présente. On arrive à saturation. Il finit par y avoir un rejet total des éoliennes des populations. Le problème, c’est qu’à force, c’est tout le projet de développement durable qui est remis en cause. Dès qu’on va vouloir venir avec des projets de mix-énergétiques comme le solaire ou la méthanisation, ça va être une levée de boucliers. Avec ce schéma, on voudrait être là pour rééquilibrer le territoire, et faire en sorte que les opérateurs ne se ruent pas toujours sur les mêmes zones rurales.

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