Le commissaire du gouvernement du tribunal administratif de Bordeaux ouvre la voie à une revalorisation des pensions militaires des tirailleurs marocains


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Publication PUBLIÉ LE 10/09/2008 PAR Nicolas César

Le 27 septembre 2006, le gouvernement De Villepin annonçait, symboliquement, le jour de la sortie au cinéma du film « Indigènes », un alignement des pensions d’invalidité et retraite du combattant des vétérans coloniaux sur celles des soldats français, dès le 1er janvier 2007. Une décision forte, inscrite dans la loi de finances 2007, qui mettait fin à une inégalité, qui perdurait depuis 1959. L’épineuse question de la décristallisation était réglée, pensait-on. Mais, en réalité, il n’en est rien, si l’on en croit Me Christelle Jouteau, membre de l’Institut de défense des étrangers (IDE), à Bordeaux. « Il y a une grande hypocrisie. L’Etat n’a pas revalorisé la pension militaire de retraite, qui constitue la prestation la plus importante et la plus symbolique. Elle est huit à dix fois inférieure à celle des anciens combattants français », s’indigne t-elle.

Le commissaire du gouvernement favorable à une revalorisation des pensions
Avec cinq autres avocats, elle a plaidé mercredi, devant le tribunal administratif de Bordeaux la revalorisation de cette pension pour soixante anciens tirailleurs, tous marocains, sauf un sénégalais. Une première en France. Aucune autre action collective n’a été intentée à ce jour. Pour cela, une coordination « décristallisation », collectif bordelais d’associatifs et de bénévoles soutenue par la Région Aquitaine a été créée et a travaillé pendant deux ans sur ces soixante requêtes.

Lors de cette audience, le tribunal administratif de Bordeaux n’a examiné la demande que de six anciens combattants « indigènes » marocains et celle d’un tirailleur sénégalais, pour des raisons pratiques. A cette occasion, le commissaire du gouvernement, magistrat, chargé de dire le droit, a donné un avis favorable à l’alignement de leur pension de retraite militaire sur celle des anciens combattants français. Il a argumenté son propos, en s’appuyant sur les accords Euro-Méditerranée signés en février 1996. Et plus particulièrement, sur l’article 65, qui rappelle l’égalité de traitement pour tous les travailleurs. L’ancien combattant étant assimilé à un travailleur. Par ailleurs, il a demandé la rétroactivité de cette mesure sur quatre ans, avant la date de la demande.

Alain Rousset envisage de déposer une proposition de loi sur la « décristallisation »
« C’est un succès mitigé », nuance Me Jouteau, qui regrette que cet alignement des pensions ne concerne que les marocains. En effet, le commissaire du Gouvernement a rejeté la demande d’un ancien combattant sénégalais. « Seule une loi peut donc aligner les pensions pour les anciens combattants d’autres nationalités », a-t-elle ajouté. A cet égard, le député de la Gironde et président du Conseil régional d’Aquitaine Alain Rousset a annoncé son intention de déposer rapidement une proposition de loi sur la « décristallisation » de l’ensemble des anciens combattants des ex-colonies françaises.

Faire de Bordeaux un exemple pour la revalorisation des pensions des anciens combattants des colonies
L’avis du commissaire du gouvernement étant régulièrement suivi, les anciens combattants marocains comme Omar El Zahari, ancien tirailleur marocain ont aujourd’hui beaucoup d’espoir. Car,à 85 ans, il n’a que sa modeste pension militaire de 150 euros par mois pour vivre. « C’est indigne, injuste, compte tenu de ce que nous avons fait pour la France. J’ai combattu pendant la seconde guerre mondiale, la guerre d’Indochine », rappelle t-il, avec fierté. Sa vie en France est d’une grande précarité. Il n’a pour logement qu’une simple chambre d’à peine 6m2, au foyer Sonacotra d’Eysines, dans la banlieue bordelaise. Selon la coordination « décristallisation », près de 180 anciens combattants résidant en Gironde survivent avec 600 euros par mois environ de minimum vieillesse.

« Nous espérons faire de Bordeaux un exemple, qui mettra fin à ce scandale national, qui perdure depuis 60 ans », insiste Naïma Charaï, déléguée à la politique de la ville au Conseil régional d’Aquitaine et déléguée nationale du Parti Socialiste à l’égalité des chances. C’est pourquoi, le Conseil régional et la Coordination viennent de publier un « livret pratique et juridique » rassemblant l’ensemble des démarches engagées à Bordeaux, afin de donner les « recettes » permettant aux anciens combattants des autres ex-colonies partout en France de voir leurs pensions revalorisées.

Nicolas César


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