Portrait : Les résolutions vertes de Gilbert Chabaud, maire de Saint-Pierre de Frugie


Claude Hélène Yvard
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Temps de lecture 5 min

Publication PUBLIÉ LE 07/01/2020 PAR Claude-Hélène Yvard

Situé à la frontière entre la Dordogne et la Haute Vienne, le village de Saint-Pierre de Frugie a vu sa population passer en moins de dix ans de 360 à 450 habitants. Sa couverture médiatique ferait pâlir bien des élus des grandes villes : la commune a reçu les grands médias nationaux et régionaux. Ce qui n’est pas pour déplaire à Gilbert Chabaud, ancien commerçant et maire à temps plein pour sa commune dont il est originaire.
« Je me retrouve maire en 2008, alors que je n’avais jamais exercé de mandat électif. A l’époque, il n’y avait plus aucun commerce.  L’école qui était constituée d’une classe unique avait fermé deux ans auparavant. Avec le conseil municipal, on s’est dit que faire pour que notre village ne meurt pas? Notre volonté était d’enrayer la désertification rurale en le rendant plus attractif en améliorant notamment le cadre de vie. «  La nouvelle équipe municipale décide alors de se retrousser les manches et de restaurer le petit patrimoine et de travailler sur l’environnement.  « Notre premier souhait était de supprimer tous les intrants, les pesticides sur la commune, en végétalisant le centre bourg et en créant un jardin pédagogique. Nous n’avions pas grand chose en termes d’atouts, sauf une nature préservée et une richesse en matière de biodiversité. Nous avons été une des premières communes à réaliser un inventaire sur ce thème. Et nous devions impérativement faire avec notre budget  de 350 000 euros sans le dépasser. Nous avons réalisé beaucoup de choses nous mêmes. Notre action s’est concrétisée très rapidement par l’embauche d’une troisième cantonnier à temps plein.
Durant le premier mandat, les chemins de randonnée sont réouverts avec de plus en plus d’adeptes et de visiteurs. En 2011, un restaurant bio et une épicerie bio ouvrent dans le centre bourg. La commune met à disposition, moyennant la perception de loyers, des bâtiments rénovés avec de petits moyens avec des éco- matériaux. Aujourd’hui, les deux commerces sont viables et ont créé des emplois. En parallèle, l’équipe municipale lance son plan bio misant sur les circuits courts avec les producteurs locaux. « Nous avions quelques années d’avance dans ce domaine, » sourit l’élu. 

Le retour des enfants scolarisés

En 2014, Gilbert Chaubaud est réélu sans liste concurrente en face de lui. Pendant le deuxième mandat,  des projets émanant de personnes venant de l’extérieur, de toute origine, plutôt diplômées en quête de sens vont émerger. Ils sont à la recherche d’une qualité de vie, d’un nouveau cadre. Saint Pierre de Frugie commence à intéresser les médias locaux, nationaux et fait l’objet régulièrement d’articles ou reportages sur comment la gestion écologique de la commune a été un moyen de luttte efficace contre la désertification rurale.
« C’est à partir de 2014-2015, de nouveaux habitants, des actifs, avec enfants arrivent : ils veulent  vivre et travailler au village. Les demandes affluent et tant que maire, j’ai estimé que mon rôle est d’être un facilitateur.  Je me considère au service de la population. D’ailleurs, je reçois chaque personne qui souhaite s’installer. La question de l’école va se poser. » Gilbert Chabaud va tenter de faire rouvrir l’école publique, sans succès auprès des services de l’Inspection académique. Ce sera donc une école alternative à pédagogie Montessori portée par une association «  Actuellement, nous avons 25 enfants scolarisés, âgés de 3 à 11 ans et nous avons ouvert en septembre une classe de sixième avec 10 élèves. Les inspections sont régulières  et notre projet pédagogique a séduit les services départementaux. Elle dispose d’une cantine scolaire bio qui fonctionne en collaboration avec le restaurant bio qui fournit les repas. Nous allons entamer les démarches pour que cette école soit sous contrat avec l’Etat. Aujourd’hui, notre premier souci sur l’école, c’est le manque de locaux. »  Gilbert Chabaud, le dit sans ambage : la vraie satisfaction c’est de réentendre les joies et les cris des enfants dans le bourg. Régulièrement, j’ai des appels de familles de France entière, de grandes villes (Marseille, Toulouse, Bordeaux), de l’étranger (New York, d’ Espagne),  qui veulent s’installer sauf qu’il n’y a plus de terrains et de bâtiments disponibles sur la commune. Les derniers terrains sont réservés.  Nous avons le projet de créer un nouveau lotissement de 14 maisons mais on marque un temps d’arrêt en raison des élections. Aujourd’hui, l’élu local, qui est profondément attaché à son village,  malgré ces réussites a conscience que cet apport de nouveaux habitants n’est pas forcément au goût de tous. 

« On a inversé le paradigme »

 « Nous avons  trois maraichers, qui servent des Amap, des kinésithérapeutes, des osthéopathes, des professions supérieures en télétravail. Un couple de médecins (un généraliste et une gynécologue) doit prochainement s’installer ici. Nous avons l’idée de créer une maison de santé communale. On voit réapparaître certains métiers de l’artisanat, qui avaient quasi disparu.  Ici, en quelques années, on a inversé le paradigme. Les gens ne sont pas venus ici pour trouver du travail, ils ont d’abord opté pour un cadre de vie et créent les conditions de leur travail sur place. Et ça marche. Une future école de musique est sur les rails, détaille le maire, qui accompagne toutes les démarches. « Mon but de départ en 2014 était de faire en sorte que mon village ne meurt pas. Au fil des années et en fonction de l’émergence des projets, Saint Pierre a gagné en notoriété et bénéficiant d’une couverture médiatique. Tout ceci a contribué à l’apport de nouveaux habitants. A l’heure actuelle, nous avons 24 enfants de moins de 18 ans arrivés ou nés au cours de ces dix huit derniers mois.  Tout ce qui a été réalisé est un vrai émerveillement. Il y a à nouveau des voitures qui traversent le bourg, de la vie tout simplement. Tout cela a un prix. Je me dois d’accompagner tous ces projets et je dois être à 100 % au service de la population, donc disponible. » Saint Pierre de Frugie fait figure d’exception : la bataille de la désertification rurale est gagnée et la commune devrait atteindre 500 habitants d’ici deux ou trois ans. Conscient des jalousies, qu’il a pu susciter, Gilbert Chabaud, après avoir beaucoup hésité, est candidat à un troisième et dernier mandat et souhaite pérenniser ce qui a été réalisé et surtout  recréer du lien social entre nouveaux venus et anciens, qui demeurent parfois méfiants vis à vis de « l’étranger ».  Il aura en mars, une liste d’opposition face à lui. 




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