Un front politico-économique presque uni en faveur de l’A147


Le dossier de l'A147, véritable serpent de mer depuis plus d'un demi siècle, fait à nouveau parler de lui en Vienne et Haute-Vienne.

Un front politico-économique presque uni en faveur de l'A147 Poitiers-LimogesCCI 87 et association A 47 Grand Ouest
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Temps de lecture 7 min

Publication PUBLIÉ LE 13/04/2021 PAR Corinne Merigaud

Les forces économiques et politiques de la Vienne et de la Haute-Vienne étaient réunies, lundi 12 avril à la technopole du Futuroscope, pour faire le point sur l’épineux projet d’autoroute entre Poitiers et Limoges porté par l’association A 147 Grand Ouest. Si l’idée d’une autoroute concédée semble faire l’unanimité pour pallier au désengagement de l’Etat, le financement n’est pas bouclé et le tracé reste à définir. Les citoyens pourront exprimer leurs attentes à partir de juin dans le cadre de la commission nationale du débat public.

Limoges Poitiers, 120 km de route nationale, deux heures de trajet avec un trafic poids lourds dense et un risque d’accident parmi les plus élevés de France. Les projets de mise à deux fois deux voies ont été maintes fois évoqués sans que la moindre décision ne soit prise. La création de l’association A 147 Grand Ouest par Pierre Massy, président de la CCI 87, a relancé le dossier… qui continue néanmoins à faire du sur place.

Réunis pour faire aboutir le projet de voie rapide entre Limoges et Poitiers, voilà le message qu’ont souhaité délivrer les élus des deux départements concernés par ce projet. Un véritable serpent de mer puisque le dossier avait été évoqué pour la première fois en 1954 ! Soixante-sept ans plus tard, presque rien n’a bougé, toujours pas de tracé définitif et encore moins de financement assuré. Les responsables politiques et économiques présents à savoir, les sénateurs Bruno Belin et Yves Bouloux, Pierre Venteau député de la Haute-Vienne, Sacha Houlié député de la Vienne, Alain Pichon, Président du Conseil Départemental de la Vienne, Emile-Roger Lombertie, maire de Limoges, Guillaume Guérin, président de Limoges Métropole, Pierre Massy président de la CCI 87 et son homologue Claude Lafond, Bertrand Venteau et Philippe Tabarin les présidents des deux chambres d’agriculture, Jean-Pierre Gros le président régional de la Chambre de métiers et de l’artisanat et Martine Jammet, vice-Présidente de la CCI de la Vienne et de l’Association A147 Grand-Ouest sont venus dire et redire la nécessité de créer un axe sécurisé et plus rapide pour rallier les deux ex capitales régionales.

Un dossier qui avance très lentement

Le dossier semble au point mort depuis plusieurs mois alors que le rapport sur l’aménagement de la N 147 en 2×2 voies, commandé par la Ministre des transports Elisabeth Borne, avait été présenté aux élus des deux départements le 26 janvier avec une conclusion sans appel : ce projet de voie rapide n’est possible, à moyen terme, que via une concession faute de financements de l’Etat. Une conclusion qui n’a pas surpris les porteurs du projet à commencer par Pierre Massy, qui préside l’association A 147 Grand Ouest. « Nous portons ce dossier depuis fin 2017, c’est un serpent de mer depuis 40 ans, nous avons regardé ce qui avait été fait sur l’A 65 entre Pau et Langon voulue par Alain Rousset en travaillant d’abord avec le député Jean-Baptiste Djebbari pour voir s’il avait un sens économique ou non. Car faire une autoroute parce que les autres ont une autoroute n’a aucun intérêt. Les concessionnaires consultés nous ont répondu que le modèle économique fonctionnait. »
Le projet est évalué à un milliard et le modèle concessif permettrait  » de lever 600 à 650 millions avec une tarification connue pour les voitures et les camions.  » Elle sera de 0,08 €/km pour les premières et le double pour les poids lourds. Le trafic poids lourds est estimé entre 70 et 80 % sur le futur axe et de 50% pour les véhicules légers. Le reste à charge de 350 à 400 millions incomberait à l’Etat, la Région, aux Départements et agglomérations. L’étude de concessibilité, lancée en 2019 par le Ministère des transports, devait démontrer l’intérêt socio-économique de l’autoroute. La première hypothèse de travail formulée par la DREAL ne comportait que quatre sorties sur les 120 km de voie, soit une tous les 30 km. Insuffisant pour les membres de l’association qui souhaitent « une desserte fine pour irriguer les communes tout au long du parcours ». A force d’obstination, ils ont obtenu huit sorties et deux échangeurs de tête à Limoges et Poitiers qui ne seront pas des barrières de péage mais un système à l’image des portiques éco-taxe qui scanneront les plaques d’immatriculation des véhicules.

A 147 – A 65 même combat

Un front politico-économique presque uni en faveur de l'A147 Poitiers-LimogesCCI 87 et association A 47 Grand Ouest

Un front politico-économique presque uni en faveur de l’A147 Poitiers-Limoges

 

A ce jour, seule une portion de 8 km a été aménagée en 2X2 voies à Fleuré dans la Vienne soit quatre minutes du temps de parcours réglé. « Dans le contrat de plan Etat Région 2015-2020, pas un centime n’a été engagé rappelle Pierre Massy, c’est un avantage, ce qui n’est pas engagé reste à dépenser mais depuis cinq ans, il ne s’est rien fait. »

Les travaux de la déviation de Lussac-les-Châteaux, en deux voies seulement, viennent de commencer dans la Vienne tandis que les six premiers kilomètres sont actés au nord de Limoges sans avoir démarrés. « Nous avons fait le constat que l’Etat n’est pas en capacité seul de financer cet aménagement autoroutier assure Pierre Massy, la solution de l’autoroute concédée apparaît comme la seule dans un temps relativement court. Aujourd’hui c’est important d’avoir un ensemble politico-économique sur deux territoires qui soit uni, rassemblé et déterminé.  » Il a rappelé le projet de l’A65 voulu par Alain Rousset dans les années 2000 pour raccorder le Béarn à Bordeaux en rassemblant les élus concernés de ces territoires.

Selon lui, cet axe a un intérêt pour faciliter les déplacements entre le nord et le sud et pour développer les entreprises du sud de la Vienne et du nord de la Haute-Vienne. L’accès à la ligne LGV au départ de Poitiers en serait également facilité pour les habitants de ces territoires. Ce projet auquel sera associé le déploiement de la fibre pourrait aussi renforcer l’attractivité, notamment pour des télétravailleurs en quête d’une nouvelle région de résidence. Le sénateur de la Vienne Bruno Belin estime que  » l’A 147 est l’une des solutions » mais que, si elle était retenue, il faudrait « régler très vite les paramètres du tracé », affirmant qu’il est « hors de question qu’il y ait péage à Lussac et Fleuré sur les sections déjà financées par l’argent public. » Il s’est également inquiété de l’absence de la Région et de Grand Poitiers demandant à « connaître très clairement la position de la Région, des candidats au poste de conseillers régionaux sur notre secteur et la position financière de Grand Poitiers sur ce dossier.  » Il s’est prononcé en faveur d’un tracé le plus proche de la N 147 « pour avoir la moindre consommation foncière possible, on sera très vigilant sur ce sujet. »

Dans deux mois place aux citoyens

En juin, ce projet sera soumis à la commission nationale du débat public avec des réunions qui seront animées dans ces territoires. Le député LREM Pierre Venteau a rappelé que les citoyens pourront alors exprimer leurs souhaits. « Les habitants auront des attentes, des envies et des projets pour cette autoroute de demain, notamment des questions environnementales car celle-ci devra être prête pour accueillir des véhicules électriques et à hydrogène. Ce projet sera livré au débat de façon très documenté. » Le sénateur de la Vienne Yves Bouloux, ancien maire de Montmorillon, a plaidé pour le désenclavement du Montmorillonnais éloigné de Poitiers. « Nous avons toutes les chances d’arriver sur ce projet avec tous les élus impliqués. »

Le député LREM de la Vienne Sacha Houlié a évoqué le contrat de partenariat signé, le 3 avril, entre l’Etat et la Région portant sur 1,5 milliards d’investissements pour les transports sur dix ans. « Sur la question du coût de ce projet, rien n’a avancé, chaque acteur se renvoie la balle. Ce projet est depuis trop longtemps dans les cartons, on attend maintenant qu’il soit réalisé. » Il ne souhaite pas que ce projet d’autoroute soit mis en concurrence avec la ligne ferroviaire Limoges Poitiers. Un avis partagé par le maire de Limoges Emile-Roger Lombertie qui a évoqué la dangerosité de la N 147. « Les poids lourds prennent une route extrêmement accidentogène et dangereuse pour les usagers de nos territoires qui la traversent. Depuis cinquante ans, c’est une valse hésitation entre une partie du département de la Haute-Vienne et l’Etat, il faut que nous cessions cela. Les consulaires ont su nous donner l’exemple de ce que le monde économique est capable d’organiser au service du social et de nos concitoyens car ce seront eux qui en profiteront. » Il a lui aussi regretté l’absence de l’Etat et la défiance des élus verts. « Nous n’avons pas le consensus politique pour des raisons de théologie et de dogmatisme. Cet axe, il le faut pour permettre à Limoges et Poitiers d’être connectées au reste de la France. « 

Pour Guillaume Guérin, président de Limoges Métropole, « L’autoroute concédée est la seule solution avec un concessionnaire qui paierait 65% de la facture. L’aménagement d’une 2×2 voies avec le CPER prendrait une centaine d’années ! » mentionnant le lourd tribut payé par les étudiants sur cette route. Il a fustigé l’absence de la Région à cette réunion. « Je n’ose pas croire qu’Alain Rousset ait changé de braquet pour des raisons bassement politiciennes d’accord avec les écologistes alors qu’il disait il y a deux ans, à Limoges, que c’était son idée. On sent qu’il y a des atermoiements. » Il se dit prêt à abonder dans le tour de table aux côtés de la Ville de Limoges.
Le Département de la Haute-Vienne a rappelé son engagement financier, regrettant que le dossier n’avance pas plus vite. Enfin, les présidents des Chambres d’agriculture se sont dit favorables, Bertrand Venteau y voit une opportunité pour diversifier les cultures au nord de la Haute-Vienne « quasiment en mono-production » et développer les entreprises agroalimentaires quand son homologue de la Vienne avance « le besoin d’irriguer nos territoires tout en restant vigilant sur la consommation des terres agricoles et la compensation des pertes. » En fin de réunion, Claude Lafond a annoncé qu’il rencontrait ce mercredi la maire de Poitiers qui n’avait pas été invitée face à son opposition affichée envers ce projet. L’objectif est d’inscrire ce projet au plan national infrastructures 2022 pour un début de travaux en 2030 et une mise en service espérée en 2035.

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