La future grande région, un frein pour le business ?


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Temps de lecture 4 min

Publication PUBLIÉ LE 23/01/2015 PAR Romain Béteille

« Je n’ai toujours pas compris l’objet de cette réforme des régions. On sent qu’il y a un enthousiame, un plébiscite autour de ce changement de la part des régions avoisinantes, mais quelle en est vraiment l’utilité ? » s’étonne Agnès Paillard, présidente du pôle de compétitivité Aerospace Valley, questionnée par Mikaël Lozano, rédacteur en chef de La Tribune – Objectif Aquitaine dans le cadre du débat organisé jeudi soir au sein de la Kedge Business School de Bordeaux. Le débat, qui avait pour sujet « Le business de la grande région » a notamment permis à Christian Chapotin, directeur général adjoint de la Banque Populaire Aquitaine Centre Atlantique (BPACA), Benjamin Bertran, directeur du pôle de compétitivité Elopsys, Jacques-Olivier Pesme, directeur adjoint de Kedge et Sandrine Larrouy Castera, directrice des relations institutionneles de Lisea (le concessionnaire de la future LGV Tours Bordeaux) de donner leur point de vue.

De gros chantiers structurels à prévoir ? De la LGV, il en a d’ailleurs brièvement été question devant le public de 300 personnes venu assister à ce débat au coeur du grand amphithéatre de l’école supérieure. Pour Sandrine Louis Castera, la date approche : « On est chaque jour un peu plus près de la mise en service. J-921″, note-t-elle en déclenchant quelques rires dans la salle. Quelques rappels, notamment qu’il s’agit là du plus grand chantier ferroviaire d’Europe » avec 302 kilomètres de ligne nouvelle et 38 kilomètres de raccordement (sans nouvelle gare pour faciliter les liaisons). Un projet d’une valeur de 7,8 milliard d’euros, dont 3 milliards financés par le public, environ 2 milliards pour les collectivités territoriales et le reste pour Liséa. « La LGV n’aura pas d’effet économique immédiat, ce qui est important c’est avant tout ce qu’en feront les acteurs économiques. Ce qui sera déterminant, c’est notre capacité à définir un schéma de desserte cohérent pour articuler toutes ces lignes (TGV, TER, Frêt) qui offriront ainsi de nouvelles possibilités de circulation pour la région », précise Sandrine Louis Castera. « Quand au projet Limoges-Poitiers, il est d’utilité publique mais fait l’objet de nombreuses contestations. On est attentifs pour avoir un recul sur l’impact de ces LGV, on est d’ailleurs en train de mettre en place un observatoire économique qui sera chargé de calculer l’impact de la LGV sur la mobilité et le développement des territoires ». 

La mobilité, c’est bien l’un des enjeux majeurs de cette future région, la plus vaste de France (84 060 kilomètres carrés). Une grandeur qui inquiète les professionnels interrogés, comme Jacques-Olivier Pesme : « Sur un petit territoire, on peut capitaliser sur des forces convergentes, il est plus facile de se développer économiquement sur ce territoire lorsqu’on le maîtrise », affirme le directeur. De même lorsqu’il est question de fusionner les entreprises locales avec celles des autres territoires : « On aimerait grossir, oui, mais dans des proportions raisonnables », affirme ainsi Benjamin Bertran. La plus sceptique restera tout de même Agnès Paillard, pour qui « cette réforme est microscopique par rapport à ce que tout le monde attendait. On est dans une région qui a donné la priorité aux entreprises, l’Aquitaine a une politique qui s’est donnée le temps d’aboutir à des résultats. Quel est donc l’intérêt d’avoir une grande région si elle n’a aucun pouvoir supplémentaire ? On attend toujours la loi de décentralisation, on risque d’éloigner les acteurs, les décideurs. Alain Rousset va-t-il pouvoir s’investir pleinement lorsqu’il aura trois régions à gérer ? ». Un avis tranché conforté par les propos de Jacques Olivier Pesme : « c’est vrai qu’on a plutôt accru les difficultés que diminué.

De l’incertitude à l’espoirMalgré toutes ces incertitudes, l’homogénéïté reste de mise pour décrire l’activité économique des trois régions, comme l’explique Christian Chapotin (sa banque couvre tout le périmètre de la future grande région depuis sa fusion) : « Il y a en réalité plus de points communs que de différences entre ces régions. Il y a notamment une grande homogénéité sur les départements du littoral et de l’intérieur. La Rochelle et Biarritz ne sont pas si différents, de même que Limoges ou Pau… On va certainement tirer des bénéfices de cet agrandissement, notamment dans les filières agricoles ou le tourisme notamment. En Dordogne, il y a des activités de niche très exportatrices. Les différences sont au niveau globales, mais quand on regarde dans le détail, le PIB par habitant n’est pas si différent d’un territoire à l’autre », précise-t-il. 

En effet, la démographie est dynamique mais impactée par un vieilissement de la population (comme l’avait révélée une précédente enquête de l’INSEE sur le recensement) et une hausse des 60 ans et plus, d’où le développement d’un phénomène appellé la « silver economy ». Mais ce fameux « transfert des compétences » dans le monde des acteurs économiques, qui devrait être statué prochainement dans les futures décisions du Président de la grande région (les régionales en seront la clef), reste l’une des inquiétudes principales des professionnels et des investisseurs. « La région aura besoin d’une métropole. A l’international, Bordeaux parle plus aux investisseurs que Limoges… », ironise Christian Chapotin. Bref, on l’a compris, la taille du changement n’a d’égale que le scepticisme qui semble entourer les acteurs de l’économie locale…

L’info pratique : Le seizième hors-série de La Tribune -Objectif Aquitaine sortira le 30 janvier prochain. Il contient un guide complet sur les entreprises d’Aquitaine, et notamment un dossier spécial sur la future grande région. Pour plus de détails, rendez-vous sur leur site internet.

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