« Aujourd’hui, on assiste à une concentration extrême des richesses et de certaines classes dans les grandes communes, explique Hervé le Bras ». Parmi les plus touchés, on retrouve les jeunes, travailleurs ou étudiants. « Cela correspond à une période de leur vie où les précédentes générations avaient déjà un emploi stable, voire même un enfant ». Mais le phénomène touche aussi largement les cadres et les professions libérales. A contrario, « les ouvriers sont passés des villes aux faubourgs, avant d’arriver dans les périphéries isolées ». Si bien qu’aujourd’hui, « ils sont quasiment plus ruraux que les agriculteurs… ». Et les écarts de richesse s’en ressentent, « on pourrait presque expliquer la répartition des revenus par la vinification et la métropolisation ! » Comprenez : les grandes villes et la Champagne s’en tirent mieux que certaines zones du pays…
Le cas du Sud-OuestLa région bordelaise incarne assez bien la tendance : l’agglomération attire les jeunes et les plus hauts salaires, alors qu’à quelques kilomètres en amont, la vallée de la Garonne concentre de nombreuses difficultés. Résultat : un vote élevé pour le Front National qui se vérifie ailleurs en France. « C’est dans le Nord-Est, le Sud et la Corse que Marine Le Pen a fait ses meilleurs scores en 2012 », rappelle Hervé Le Bras. Contrairement aux idées reçues, « les régions à forte pratique religieuse ont été très peu touchées et la corrélation entre le vote frontiste et la présence de populations immigrées frôle le zéro ». La réalité serait plus liée à la crise et à un indice d’inégalités très fort. Des données qui s’expliquent plus au niveau régional qu’à celui des métropoles. D’où l’importance de la réforme territoriale : « une affaire un peu désolante où l’on essaye de nous vendre un redécoupage à taille européenne, alors que l’argument ne tient pas la route. En Allemagne, les Lander ont des superficies et des populations très variées et les plus gros ne réussissent pas forcément mieux. D’ailleurs, fusionner deux régions faibles n’a jamais fait une région forte ».
Une réflexion qui a ouvert la voie aux débats suivants sur l’identité du Sud Ouest…