Au Resto Chut, signer pour mieux communiquer


Marianne Chenou
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Temps de lecture 3 min

Publication PUBLIÉ LE 22/03/2019 PAR Marianne Chenou

Le but de ce restaurant, réunir les sourds et les entendants dans un même lieu et casser la barrière de la langue des signes. Quelques détails par rapport à un restaurant « classique » sont adaptés. Ici pas de numéros, mais des lettres de table : chaque table est dotée d’un modèle de main articulée signant une lettre de l’alphabet. Pour annoncer les plats prêts à être envoyés, pas de sonnette, mais une petite lumière en salle, qui s’allume et s’éteint depuis la cuisine.

Resto Chut

Certaines barrières invisibles sont aussi révélées : écrire un menu sur une ardoise, quoi de plus simple ? Quand on est entendant, certainement. Pour les sourds, la tâche s’avère un peu plus compliquée. « Je suis toujours admiratif de leur mémoire », avoue Baptiste Boucherie, gérant et entendant. En effet, l’apprentissage de l’orthographe n’est que du par cœur. Même des mots simples dont toutes les lettres se prononcent doivent être appris, puisqu’avec la surdité, impossible d’associer les sons à leur orthographe.

Pour communiquer avec Fanny, la serveuse, pas de panique, tout est prévu. Sur la table, une affiche avec l’essentiel des signes nécessaires pour communiquer. Bonjour, merci, quelques aliments de base… Au bout de quelques minutes, la curiosité prend le pas sur la perte de repères et on se prend à signer ce que l’on va manger. Et en cas de grande incompréhension, des ardoises à chaque table permettront de communiquer par écrit. Mais en général, un peu de patience et d’humanité suffisent à faire en sorte que tout le monde se comprenne.

Resto Chut

Réunir sourds et entendants dans un même lieu

Baptiste Boucherie, 41 ans, est le gérant du Resto Chut. Entendant, il est rentré de Nouvelle-Calédonie il y a deux ans, ce projet lui tenait à cœur. « Depuis que je suis revenu, après 12 ans là-bas, je travaille sur ce projet ». Cet entendant a découvert la langue des signes il y a une vingtaine d’années : « Un de mes meilleurs amis était sourd, il m’a appris un peu la langue, puis j’ai fait des formations pour mieux signer », complète-t-il. Ce restaurant n’est pas « pour les sourds », insiste le gérant. « Il faut que tout le monde s’y mélange, ils ne sont pas en dehors de notre société, ils en font partie ».

Resto Chut

Dans l’assiette, on se régale, à prix très raisonnable, même avec une carte pour le moment réduite : « On fait petit à petit. Geoffroy est seul en cuisine, on ne peut pas proposer une très grande gamme de plats ». Geoffroy, a lui perdu l’ouïe à l’âge de 3 ans. Mais ce n’est que plus tard, à 16 ans, qu’il a appris la langue des signes. À l’origine diplômé en photographie, il a ensuite effectué plusieurs métiers, avant de passer en cuisine. Après deux ans d’expérience dans un restaurant bordelais, il a rejoint l’aventure du Resto Chut.

Fanny, quant à elle, a 33 ans et est sourde de naissance, comme toute sa famille. Bordelaise, elle a effectué plusieurs emplois au sein de grandes entreprises : McDonald’s, Décathlon… C’est son premier emploi de serveuse. Après un premier jour assez intense, elle commence à prendre ses marques.

Pour le moment, le Resto Chut est ouvert le midi, du lundi au vendredi. Le jeudi et le vendredi de 18 à 21h, l’équipe propose également un afterwork avec des planches de charcuterie et fromage. Si le succès est au rendez-vous, le restaurant aimerait devenir un pôle de formation pour les sourds et mettre en avant leurs capacités. « Mais pour le moment on prend le temps d’installer les choses », tempère Baptiste Boucherie. En attendant, on signe !

Resto Chut

Resto Chut, 91 rue Lecocq à Bordeaux / Réservations au 05 54 51 20 24 ou par SMS au 06 02 11 88 76 / Restochut.fr

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