Audit financier de Bordeaux : des résultats et des doutes


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Temps de lecture 4 min

Publication PUBLIÉ LE 09/02/2021 PAR Emmanuelle Diaz

Faisant état de ratios plutôt satisfaisants parmi ceux les plus couramment utilisés pour décrire la santé financière d’une collectivité (notamment l’épargne brute de Bordeaux qui s’élevait à 56,5 millions d’euros en 2019), l’audit financier demandé par Pierre Hurmic et réalisé par le cabinet indépendant Klopfer semblait, a priori, ne pas devoir réserver de mauvaises surprises. Bénéficiant de recettes conséquentes, La Belle Endormie se classe en effet dans le top 4 des villes comparables avec un niveau de recettes d’un montant de 1 570 € par habitant (très au-delà des villes de même strate qui « stagnent » à 1 335 € par habitant).

Hausse de la fiscalité et métropolisation des dépenses

Des recettes dont l’origine est cependant à près de 60% fiscale, ce que dénonce l’actuelle majorité : « Il y a très clairement, sous le précédent mandat, un choix d’augmenter la fiscalité que l’on peut qualifier d’opportuniste », s’insurge Claudine Bichet, 1re adjointe en charge des finances et du défi climatique. Une évolution qui s’est amorcée en trois étapes : un premier passage en 2015 avec une hausse des taux de fiscalité de +5%, la réduction en 2018 du taux dérogatoire d’abattement de la taxe d’habitation et en 2017 et 2019, la majoration de 20% puis de 50% de la taxe d’habitation sur les résidences secondaires.

Côté dépenses, Bordeaux apparaît dans le top 6 des villes comparables avec une moyenne de 1 344€ par habitant. Des dépenses qui semblent avoir augmenté lors du précédent mandat et notamment au travers des dépenses de personnel (+ 20 millions d’euros, soit en moyenne, une augmentation de 3,2% par an et qui resterait de 2,8% en fin de mandat, une partie de ces dépenses ayant été transférées à la Métropole). Un transfert que la nouvelle municipalité estime à 85 millions d’euros ; ce qui représenterait 1 335 agents. « Les ratios sont bons mais ils sont l’addition d’opportunités exercées sous la précédente majorité », précise-t-elle.

Une croissance du personnel avec laquelle la nouvelle équipe municipale va devoir composer. « C’est quelque chose dont on a hérité et qui va être un point de vigilance dans l’analyse de nos marges de manœuvre futures », note l’élue qui s’inquiète pour la perte des revenus liés à la fin de la taxe d’habitation. « Beaucoup de collectivités ont anticipé la suppression de cette taxe en essayant de contenir les dépenses et d’éviter une inflation trop forte, et notamment des dépenses de personnel. Or, ce n’est pas ce qu’a fait la précédente majorité. C’est une chose que l’on va devoir prendre en compte à l’avenir ».

Des dépenses somptuaires

Également dans la ligne de mire de l’actuelle municipalité, les grands équipements dont Alain Juppé a souhaité doter la ville : le Matmut, la Cité Municipale et la Cité du Vin. « Des équipements que nous pourrions qualifier de somptuaires puisqu’ils ne bénéficient pas directement à l’amélioration de la vie quotidienne des Bordelais », précise-t-elle. « Le stade Matmut nous coûte encore 2,4 millions d’euros par an à vie. Pour ce qui est de la Cité Municipale, nous devons financer aujourd’hui 3,5 millions d’euros par an et ce jusqu’à la fin du contrat. Quant à la Cité du Vin, nous sommes en train de rééquilibrer les besoins d’investissements de cet équipement très récent mais pour lequel il faut encore réinvestir pour la scénographie. Au total, il y en a pour près de 7 millions d’euros. C’est un investissement lourd pour la ville. Rien qu’avec les 2,4 millions d’euros du stade, on peut financer une crèche de 60 places ! »

Des équipements d’ailleurs financés « grâce à des cessions », dont la vente de Régaz, société de distribution du gaz de Bordeaux « vendue pour 104 millions d’euros », poursuit l’élue.

Également mentionnée, la crise sanitaire aura coûté un peu plus de 20 millions d’euros à la ville (soit près de 40% de l’épargne brute de 2019).

Des priorités mais une marge de manœuvre réduite

Forte de priorités sensiblement différentes de celles de la majorité précédente, Claudine Bichet avoue s’interroger sur les choix des « équipements somptueux » précédemment effectués au détriment d’équipements de proximité.

« Sur une capacité d’investissement qui se situerait autour de 550 millions d’euros, on en a une très grosse partie (plus de 420 millions d’euros) qui est le poids hérité du passé (équipements non acquis et entretien insuffisant du matériel existant) ».

« Le poids de la gestion du personnel est aussi quelque chose dont nous héritons et que nous allons devoir gérer d’autant que la ville livre aujourd’hui beaucoup d’équipements (crèches, écoles…). Il faut les pourvoir en personnel ». Tenue de préserver autant que possible sa marge de manœuvre en matière d’investissements, la municipalité doit gérer au plus près l’augmentation de cette masse salariale.

Souhaitant maintenir l’investissement au même niveau que précédemment (« pour donner à (notre) ville les moyens de faire face à la crise »), l’équipe de Pierre Hurmic s’est fixée comme priorités de remettre en état le patrimoine délaissé, de faire face aux impératifs (livraison de crèches, d’écoles et autres équipements de proximité…) et de répondre à l’urgence climatique en investissant dans la rénovation énergétique des bâtiments, dans la végétalisation de la ville et en réaménageant l’espace urbain au travers de zones piétonnes et de mobilités douces.

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