Cancer et innovation : des médecins optimistes pour leurs patients


Marianne Chenou
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Temps de lecture 5 min

Publication PUBLIÉ LE 01/02/2019 PAR Marianne Chenou

Quatre professionnels de l’institut Bergonié, centre de lutte contre le cancer, ont ainsi défilé autour de quatre thématiques. Premier d’entre eux et non des moindres, François-Xavier Mahon, directeur de l’institut Bergonié. Ou plutôt de la « Maison Bergonié » comme il aime l’appeler, selon l’esprit humain qui anime l’institut. Un centre où l’on traite « des patients et non pas juste des cancers », rappelle-t-il.

Évoquant l’avenir de l’institut, dont les travaux s’achèveront prochainement, il a annoncé de futures collaborations renforcées avec les CHU de Limoges et Poitiers, dans une volonté toujours plus grande de soins, au sein du seul centre de lutte contre le cancer de Nouvelle-Aquitaine. La recherche, autre mission de l’institut, se porte bien. « Aujourd’hui, nos publications sont reconnues. Lorsqu’on se déplace dans des colloques internationaux, nous sommes à la recherche de nouvelles molécules, nous savons ce que nous recherchons spécifiquement pour les formes de cancer qui touchent nos patients », explique François-Xavier Mahon.

L’immunothérapie, un pas vers la rémission ?

Le chef de file de l’institut a ensuite laissé place au professeur Antoine Italiano, cancérologue, venu évoquer l’immunothérapie, une immense piste de recherches pour un traitement moins agressif de la maladie. La chimiothérapie, très efficace, implique de nombreux effets secondaires, souvent lourds et difficiles à vivre pour les patients. Avec l’immunothérapie, il s’agit d’injecter des anticorps par perfusion. Ceux-ci vont bloquer les récepteurs des cellules cancéreuses, et ainsi permettre aux globules blancs de les détruire. Utilisé en complément de la chimiothérapie, ce procédé pourrait notamment permettre d’envisager des rémissions complètes chez certains patients, même dans le cas de cancers du poumon avancés.

Les patients concernés par ces essais sont à la fois des personnes avec une maladie avancée et d’autres pour lesquels le diagnostic vient à peine d’être posé. Utilisé dès le début de la maladie, ce procédé n’en est que plus efficace. Une avancée scientifique qui permet à Antoine Italiano de l’affirmer : « Dans 20 ans, la plupart des cancers seront chroniques. Nous ne les guérirons pas forcément, mais les patients vivront avec, comme on vit aujourd’hui avec le diabète ».

Le numérique pour un suivi au quotidien des patients

Autre volet au cœur de l’innovation : la e-santé. Le numérique bouleverse le soin apporté au patient. C’est une véritable révolution pour les soignants et les malades qui peuvent désormais rester en contact permanent, même à distance. Un projet auquel croit Nathalie Quenel-Tueux, oncologue spécialisée dans le cancer du sein.

Avec le programme e-DomSanté testé sur 2 ans ces dernières années, une vingtaine de patientes vivant dans les Landes et atteintes de cancer du sein se sont vu fournir des tablettes pour faciliter leur suivi par l’institut Bergonié. Sur la base de questionnaires hebdomadaires, les patientes de 36 à 82 ans pouvaient rendre compte de leur état de santé, leur sommeil, leur moral, leur appétit, leurs symptômes, par le biais d’une simple application.

« Ce travail s’est fait en constante coordination avec les patientes. Elles nous ont aidé à améliorer l’application pour répondre aux mieux à leurs besoins ». Un dispositif qui a conquis les malades, quel que soit leur âge. S’il a fallu expliquer au départ, la prise en main s’est tout de même faite rapidement. Avec un tiers des patientes qui avaient plus de 75 ans ou n’avaient jamais utilisé d’ordinateur, le défi n’était pourtant pas gagné d’avance. Demander une téléconsultation, avertir d’une chute, d’un changement brutal de l’état de santé, tous ces événements pouvaient être transmis directement par l’application entre tous les maillons de la chaine du soin, patients et soignants.

Ce relais, entre deux rendez-vous, a parfois permis à certaines patientes d’éviter de se déplacer, lorsqu’elles se sentaient trop faibles pour le faire. « Bien sûr, cela ne remplace pas une vraie consultation. Mais on instaure un lien de confiance et on crée un vrai contact humain, via le téléphone et via les écrans », insiste Nathalie Quenel-Tueux. « Lorsque je vois ma patiente, même au travers de la caméra, je perçois son état général, si elle va bien, si elle a l’air fatiguée… » Cela permet de coordonner l’action avec des infirmiers et médecins traitants présents auprès de ces femmes, en fonction des urgences et des cas.  

Le bilan du dispositif a dépassé les espérances du service d’oncologie. On relève chez les patientes une amélioration de la qualité de vie, même lorsque la maladie progresse. L’espérance a été prolongée de 7 mois grâce au suivi permis par l’application. L’outil numérique rassurant pour les utilisatrices a aussi aidé les familles, soucieuses d’avoir un relais sur lequel s’appuyer pour leurs proches. Face au succès de ce dispositif, un programme e-DomSanté 2 va prochainement voir le jour, à une échelle bien plus grande, concernant 500 patients de Nouvelle-Aquitaine atteints de tous types de cancer.

La douleur, souvent la grande oubliée des traitements

Dernier intervenant à monter sur l’estrade, Laurent Labrèze, algologue. Un métier mal connu et pourtant si important pour les patients. Ce médecin spécialiste de la douleur et de sa gestion intervient au quotidien pour permettre aux malades de vivre avec des douleurs parfois insupportables, en les apaisant, au travers des médicaments, certes, mais pas uniquement. De nombreuses méthodes voient le jour. La radio interventionnelle est une des principales techniques employées pour cibler la tumeur douloureuse. Une stimulation par électrodes est aussi proposée dans certains cas, tout comme l’hypnose ou la méditation. Détourner l’attention du patient est une des clés pour l’aider à oublier sa douleur.

Mais l’algologie est souvent une des grandes oubliées des spécialités médicales. Avec seulement 55 algologues en France, les délais d’attente pour un rendez-vous peuvent aller jusqu’à deux ans. En Nouvelle-Aquitaine, seulement 5 professionnels officient pour 6 millions d’habitants. À ce faible nombre de praticiens, se rajoute souvent la méconnaissance des autres médecins sur l’existence de ces relais pour aider les patients à gérer leur souffrance au mieux. « La réactivité est actuellement trop longue. Il faut informer les médecins pour qu’ils orientent leurs patients vers nous », explique Laurent Labrèze. Une nécessité pour soulager au plus vite les malades : « Si on traite la douleur tôt, elle ne s’installe pas ».

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